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Articles taggués ‘Patrick « Factotum » Villecourt’

Je remonte mon groupe

09/07/2014 4 commentaires

fabrice vigne45316

Le portrait ci-dessus, signé Denis Rouvre, me fait peur. Tout porte à croire que la personne représentée est Fabrice Vigne. Disons que je le sais. Je ne le sens pas. Je me reconnais à peine. Mais qui se reconnaît, qui d’abord se connaît ? L’image n’est pas la réalité, pourtant elle est réelle. Contrairement à ce que prétendent certaines images pour nous égarer, ceci est bien une pipe, ceci est bien une pomme, ceci est bien Fabrice Vigne. La vache.

Forte expérience, passer entre les mains d’un photographe de cette trempe. Quelqu’un soudain vous regarde vraiment, et en sus est capable de montrer comment il vous regarde. J’ai eu la chance de faire partie de l’échantillon de Français dont Denis Rouvre a tiré le portrait en même temps qu’il leur demandait : ça vous fait quoi, ça veut dire quoi pour vous être français, la francitude s’inscrivait sur nos traits et sous le flash, pour un projet intitulé Des Français, Identités et territoires de l’intime. Le projet désormais achevé prend simultanément la forme d’un livre aux éditions Somogy, et d’une exposition visible en ce moment et jusqu’au 21 septembre dans le cadre des Rencontres photographiques d’Arles. L’expo est également déclinée sous la forme d’un film de 35 minutes visible sur le site de Denis Rouvre, au long duquel défilent nos trognes et nos voix.

Les images et les textes y sont saisissants, beaux d’une part, essentiels d’autre part en tant que contribution plurielle et paradoxale au débat le plus moisi de la décennie, celui sur l’identité française. (Le climat social actuel, qui rend possibles divers surgissements de violence identitaire, incite à suspecter qu’un débat sur l’identité n’est pas autre chose qu’une rationalisation du repli identitaire. On sait depuis longtemps, on sait pour rien, on sait sans solution, que identitaire c’est eux, et que l’identité est une panthère féroce et avide de sang.)

Me v’là d’vant vous là, dans mon vieux cuir, mes plis, mes tempes grises. Ne dirait-on pas une rock star sur le retour, rejouant le défi et promouvant l’énième tournée d’adieu de son groupe.

Tiens, puisqu’on parle de Mick Jagger.

Mick Jagger m’a bien fait rire en se prêtant à une promotion à rebours pour la reformation sur scène des Monty Python. Il déclare, pince-sans-rire, « Les Monty Python ? Ils sont encore là ? Oh, non… Qui a envie de payer une fortune pour voir cette bande de vieillards fripés qui ne cherchent qu’à se faire un max de blé et revivre leur jeunesse… D’accord, ils étaient cool dans les années 60, mais là, à rabâcher encore une fois leurs vieux numéros que tout le monde a déjà vus sur Youtube, c’est pas seulement du réchauffé, c’est limite ringard. De toute façon, le meilleur de leur bande est mort il y a des années. » Il enchaîne distraitement en donnant à son assistant la playlist du prochain concert des Stones, Satisfaction, Let’s spend the night together

Mesdames et messieurs, j’ai l’honneur et l’immense joie de profiter de cette conférence de presse pour vous annoncer que moi aussi je reforme mon groupe pour une tournée d’adieu. Le prochain livre du Fond du tiroir sortira cet hiver, en pleine saison du loup, et pour l’occasion j’ai reconstitué le duo originel du FdT canal historique : le sémillant mais désormais bourdonnant Patrick Villecourt, factotum éternel, compositeur des sept premiers titres figurant au catalogue, a accepté de reprendre du service en compagnie de moi-même-dans-mon-vieux-cuir. Les affaires comme on dit reprennent. On laisse passer l’été et on en recause.

Lonesome George(s)

19/11/2012 Aucun commentaire

Il y a quelques jours, j’ai croisé dans le bus une dame, très gentille, qui m’a abordé : « Vous êtes Fabrice Vigne, n’est-ce pas ? Je me souviens de vous, vous étiez venu présenter votre livre sur le suicide dans ma bibliothèque il y a… Oh, peut-être dix ans. Vous avez publié un deuxième livre, depuis ?  » Il arrive aussi qu’en cours de conversation, profitant d’un moment creux, un interlocuteur me demande, très bienveillant : « Et sinon, au fait, tu écris toujours ? » Je réponds toujours poliment, je suis un gars civil. Mais grince au tréfonds de moi la réponse que fit Louis Armstrong à un journaliste qui lui demandait de définir ce qu’était le swing : If you need to ask, you don’t need to know.

Oui, j’écris toujours, j’écris encore, j’écris parfois, je réécris. Mon nouveau livre est en vente par souscription dès aujourd’hui, et sera envoyé aux souscripteurs dès sa sortie de l’imprimerie dans une bonne quinzaine de jours. Il s’appelle Lonesome George(s). Il est imprimé à 300 exemplaires, coûte 9 euros, compte 32 pages plus une élégante jaquette à rabats et fenêtre, sa couverture et ses culs-de-lampe sont dessinés par Jean-Pierre Blanpain, et son ISBN, sans pareil à travers le vaste monde, est le plus sexy qu’on ait su voir, attention roulement de tambour s’il vous plaît, ISBN 978-2-9531876-6-3. Il est mon opus 13, finalisé deux mois après mon opus 14, Double tranchant, car nos chronologies sont moins plates que la ligne d’horizon observée à la jumelle en pleine mer un jour sans vent. On tombe parfois sur des os. J’ai dit adieu à mon factotum, et j’ai dû chercher une alternative – que fallait-il faire, privé de mon acolyte ? Un seul salut : Laurel s’enhardit.

D’autres questions ?

Non ? Alors je continue à soliloquer. Je précise que pour George(s), le FdT n’enverra pas de bon de souscription par courrier postal, mais seulement par mail à imprimer. Pardon d’avance à ceux que ce spam importunera. Je compatis : quant à moi je suis, tel que vous me voyez, fumasse, mon premier mail de la journée ayant été une sollicitation pour signer une pétition CONTRE le mariage homo. Qu’est-ce que j’ai fait juste ciel, dans quelle newsletter malpropre ai-je donc traîné, pour recevoir ce torchon ? Pourquoi pas un appel à départager Fillé et Copon, les Dupondt de l’UMP ! Quel foutu pays rance et moisi, celui qui mobilise une plus grosse manif pour renvoyer les homos en enfer que contre un aéroport inutile désastreux destructeur et offert à cette bande de racailles racketteurs de Vinci ! Qu’on leur foute donc la paix, aux homos ! Qu’ils le prennent et le gardent, le mariage, je le leur laisse, ils en ont plus besoin que moi puisque la société n’a visiblement toujours pas admis que leur couple était possible, moi on s’en fout de mon couple, je suis pacsé ne vous déplaise. Le mois dernier à Paris j’ai visité l’instructive expo Bêtes de sexe, consacrée à la sexualité des animaux. (Étaient notamment projetés les désopilants courts métrages d’Isabella Rossellini, Green porno). Là, j’ai appris que des pratiques homosexuelles étaient recensées chez 430 espèces (on ne sait pas si l’homo sapiens était inclus dans les statistiques). Voilà qui volatilise une fois pour toutes l’argument des cathos selon lequel l’homosexualité est contre-nature.

Allez tous en paix dans le giron notre mère nature, bienveillante et généreuse ! Hétéros et homos, embrassez-vous, et commandez ensemble et offrez-vous les uns les autres des tas de Lonesome George !

On a tous besoin d’hamour

25/06/2012 4 commentaires


Ma petite entreprise, mon terrain de jeu et de liberté, mon utopie à roulettes, mon « Fond du tiroir », a donc volé en éclats. Alors que j’avais un planning de deux publications en 2012 (mai et octobre), Patrick Villecourt, mon graphiste, factotum et ami, co-inventeur de tout ce qui concerne le Fond du tiroir, me tire sa révérence dans le dos, mettant un terme brutal à quelque chose comme six ans (puisqu’il y eut une vie avant le FdT) de collaboration fructueuse, fébrile et rigolote. Il m’explique qu’il n’est plus capable de rester des heures devant un écran à composer des livres, ça l’emmerde, ça le fait souffrir, ça le laisse froid, il n’a qu’une envie, déguerpir, prendre l’air, s’occuper de ses ruches, de ses essaims et de son miel. Que faudrait-il répondre ? Naturellement je ne lui en veux pas, comment pourrais-je, il me reste encore un paquet de mercis à lui dire. Je te souhaite bon miel, vieux.

Pour me consoler il me la joue « les cimetières sont pleins de gens irremplaçables, tu peux continuer avec n’importe qui », mais je ne vois pas les choses ainsi, je considère Patrick comme le co-auteur des 7 livres réalisés ensemble (le summum étant bien sûr J’ai inauguré IKEA, objet particulièrement graphique, où sa part de travail est supérieure à la mienne). Moi j’avais dans l’idée que le FdT était un duo, j’écrivais, il visualisait, on éditait à deux. Certes rien ne m’empêcherait, rien ne m’empêchera, de reformer un duo avec n’importe qui (l’un des deux livres prévus, au moins, reste à l’ordre du jour, sans que je sache ni où ni quand ni comment, et à peine pourquoi), mais ce ne sera pas le même cadre, ce ne sera pas sous le logo dessiné par Patrick.

Cette fin brutale était (presque) imprévisible, elle est en tout cas malencontreuse, parce qu’elle advient au moment précis où, ayant échoué depuis lurette intéresser des éditeurs traditionnels à mon travail (le dernier contrat que j’ai passé pour un livre date de 2009), j’avais fait une croix sur toute velléité de pénétrer le paysage éditorial français, bien décidé à occuper, en guise de position stratégique, le seul fond de mon tiroir. Le tiroir se délite et me voici tout nu.

Merci à tous ceux qui, dans mon dénuement, m’ont adressé un petit message d’hamour.

Je vais écrire un petit peu. Et voir ce que ça devient. Comme toujours.

Cette chronique est dédiée à la mémoire de Lonesome George, mort hier, dans la force de l’âge.

Le club des fétichistes

14/04/2011 un commentaire

Hervé Bougel est un fétichiste : il a suspendu en son atelier, dans l’antre même, confortable et secrète, où il bichonne à la main chaque exemplaire des publications du pré # carré, un immense poster représentant Georges Perec rue Vilin, figure tutélaire et pensive face à l’éphémère des paysages.

Patrick Villecourt est un fétichiste : le mur en face de son bureau est orné d’une tête de Perec redessinée par Enki Bilal, sous le regard duquel Patrick factotumise en orfèvre les livres du Fond du Tiroir (ou d’autres ouvrages moins glorieux mais, à l’occasion, mieux rétribués).

Je suis, il est temps de l’avouer malgré que j’en ai, un fétichiste : je porte en permanence dans mon portefeuille, à l’horizontale du cœur, un timbre à l’effigie de Perec un chat sur l’épaule, que je me garde bien de mélanger avec les bêtes Mariannes ordinaires identité-nationale mon cul,  il s’agit de ne pas le salir, minuscule grigri, trésor non affranchi que pour rien au monde je ne voudrais voir disparaître sur la première enveloppe venue et se prendre des coups de tampons sur la coupe afro.

Il était fatal que nous nous rencontrassions, et pas seulement pour les plaisirs raffinés de l’imparfait du subjonctif. Quand un fétichiste rencontre deux autres fétichistes, qu’est-ce qu’ils se racontouzent ?

Je reviens de chez l’imprimeur, les bras heureux et chargés d’un carton de livres, le plus beau livre de notre catalogue comme tous les autres livres de notre catalogue : « Ce qui stimule ma racontouze » de Georges Perec, splendide sixième livre et demi (demi pour cause de co-édition) publié par le Fond du Tiroir, fruit du minutieux et passionné travail de trois fétichistes.

Pour assurer la promotion de ce bel objet (qui n’en a guère besoin, après tout : nous sommes assurés d’écouler l’essentiel du tirage lors du Printemps du livre de Grenoble – spéchol sinx à Mmes Carine d’Inca et Vanessa Curton), je viens de me prêter à une interview au micro de Michèle Caron pour France Bleu Isère. Si tout fonctionne correct c’est écoutable ici.

Oh oui Ferdinand, fais-moi peur !

30/01/2011 2 commentaires

Si vous êtes dans les petits papiers du Fond du Tiroir, vous avez déjà reçu le courriel ci-dessous, rédigé façon spam pour rire. Pourquoi un tel exercice de style ?

Primo parce que j’aime bien les spams. Je lis consciencieusement ceux que je reçois, du moins lorsque je ne reçois rien d’autre, ça me fait toujours un écho du monde, et quel écho. J’aime les spams. Je l’avoue franchement, j’aime leur roublardise pataude comme un gyrophare posé sur un piège à loup, j’aime leur irréductible absurdité qui rappelle l’étymologie montypythonnienne du mot spam, j’aime même leur débilité candide, symptôme de la dégradation fatale à l’oeuvre dans la « communication » moderne… Suis-je pervers ? Les spams m’émeuvent très sincèrement, j’y perçois une certaine poésie désespéréehouellebecquienne en quelque sorte.

Secundo parce que, comme toujours, à l’heure d’annoncer publiquement quelque évènement me concernant, l’idée même de la publicité me dégoutte à un point tel que j’enrobe névrotiquement ma réclame au sein d’une quasi-illisible satire anti-réclame… On s’amuse comme on peut. Si le Fond du Tiroir disposait d’un directeur marketing, je me serais fait virer depuis lurette. Heureusement, c’est moi le patron. Or donc voici ce que, dans un premier temps, j’ai envoyé à tout mon carnet d’adresse :

Bonjour cher ami de mon coeur.
Je est une Russe jeune de 21 années et je est joyeuse de fait ta connaissante.
C’est tout a fait un réel plaisire pour moi de t’écrire car mon plus grand désire est de faire des connaissantes et de partager mes idées avec d’autres.
Je ne fume pas et je voudrais corresprondre avec tu parce que je…

Oups ! Pardon ! Ce n’est pas ça du tout ! Au temps pour moi, le message ci-dessus ne vous était pas destiné, j’ai mélangé mes fiches ! J’escomptais vous soutirer du pognon pour un tout autre prétexte. Pour des livres, comme d’hab. Je reprends.

Vous êtes toujours là ? Si vous n’avez pas encore classé ce mail en « indésirable » d’un clic distrait, sachez que : Rome n’est plus dans Rome, et le Fond n’est plus dans le tiroir. Je m’exporte dans un pays frère. En effet, ma prochaine publication n’adviendra pas sous l’enseigne maison « Le Fond du tiroir », mais sous celle du Pré#Carré de mon estimé confrère Hervé Bougel.

A paraître, donc, en mars prochain : une élégante plaquette intitulée « Dr. Haricot, de la Faculté de médecine de Paris » au sein de la série « Un pas à la fois » qui, selon la présentation de l’éditeur, est « une collection de lettres adressées par des auteurs à d’autres auteurs ». À qui écrirais-je ? Au Dr haricot, bien sûr. Soit un écrivain-médecin dont il convient de se méfier parce qu’il sait faire rire. Il ne s’agit pas de François Rabelais, mais d’un rude tricard dont on ne fêtera pas le cinquantenaire de la disparition, sous prétexte que ça énerve Serge Klarsfeld, et que ça émeut Frédéric Mitterrand (le même Frédéric Mitterrand qui, toute bonne conscience politique dehors, déclarait il y a peu « La Tunisie, une dictature ? Allons allons c’est très exagéré… »). C’est bon, vous voyez qui ?

L’objet est à commander (6 euros franco de port) auprès du Pré#Carré… ou au Fond du tiroir.

Par ailleurs, toujours dans le registre « Le Fond du tiroir hors les murs », vous êtes invités à admirer l’affiche ci-jointe conçue par le trop rare (c’est de ma faute, c’est moi qui ne lui donne pas assez de boulot) Patrick « Factotum » Villecourt et à assister en masse, si vous êtes dans le coin, au lugubre spectacle que ce poster promeut : « Fais-moi peur ! saison 2 », vendredi 18 février 20h30, auditorium l’Odyssée d’Eybens, avec les élèves du CRC d’Eybens, entrée libre, composition et direction musicale : Olivier Destephany / lectures : moi-même en personne et de noir vêtu. Au programme : Bram Stoker, E. A. Poe, Maupassant, Lovecraft, Joseph Delaney. Et vous pages pervers, courez au cimetière, prévenez de ma part mes amis nécrophages que ce soir nous sommes attendus dans les marécages.

En revanche, si vous avez lu ce long message jusqu’au bout uniquement émoustillé par la perspective d’une jeune femme russe honnête et fidèle pour une relation épistolaire suivie et peut-être davantage, un jour, qui sait, voyez plutôt ici.

Si vous voulez que je vous réponds dans l’immédiat à mon adresse personnelle fvigne(arobase)fonddutiroir.com, je serai heureuse de te lire ta réponse mon amour à très bientôt. (Je est non fumeuse blonde.)
Fabrice « Irina » Vigne

… Ensuite, lorsqu’un destinataire de ce pseudo pourriel mordait à l’hameçon et me répondait d’un petit mot, je ferrais, comme les vrais ! J’amorçais la seconde étape, le ton plus direct, la demande explicite, et j’envoyais même la photo d’Irina. Qu’est-ce que je suis marrant.

Merci cher [Coller ici l’adresse de l’interlocuteur] !
Je très contente de ton message. Tu est quelqu’un avec quoi j’adore
discuter de mes idées et d’autres choses ! Je t’envoies ici ma photo (cf.
pièce-ajoutée
), j’espère qu’elle à ton goût ! Malheureusemente ma mère est
rès malade et j’est besoin de 10000 roubles pour l’opérer. Donne-moi vite
ton numéro de carte bleue pour que je puisse la soigner !
Tenderement,
Irina

Et une fois que j’ai fini de rire, je regarde à nouveau la photo de cette fille qui existe à peine, que je ventriloquise, et je reste perplexe. Qui est-elle, au juste ? Un roman à écrire, comme on dit.

De la qualité des rencontres sur les salons du livre, des larmes versées sur la tragédie ouvrière, du vent du Nord qui emporte dans la nuit, du monde décidément tout petit-petit, de la sodomie comme formule de politesse, et des oeuvres complètes d’Efix

10/01/2010 3 commentaires

Bonjour Efix

Mon nom est Fabrice Vigne. Nous nous sommes croisés sur le salon de la
Côte Saint André, j'étais sur le stand d'en face. Je t'ai acheté là-bas
Putain d'usine, et j'ai trouvé ça tellement bien que j'ai enchaîné illico
avec Les fantômes du vieux bourg - que j'ai trouvé exactement aussi bon -
à l'exception peut-être d'une petite réserve pour la couverture : je ne
saisis pas le sens ni la pertinence graphique de ce croquis négatif.
Peu importe.
Il y a quelques années, quand je lisais Mon amie la poof, je me disais, wow,
nom de Dieu quel excellent dessinateur, quel virtuose de première bourre,
quelle expressivité, quel mouvement... Mais il serait grand temps qu'il se
trouve un scénariste, ou alors quelque chose à dire, parce que là si je peux
me permettre c'est du brio un peu à vide...
Eh bien, voilà, ici au contraire c'est indéniable, il y a quelque chose à
raconter, il y a Levaray, le contenu est aussi fort que le contenant, le
ramage et le plumage, j'en ai chialé, même, quelques fois. C'est pour dire.
Je passais juste dire cela : félicitations. Et bonne continuation.
Fabrice
Cher Fabrice,
Un petit mot de remerciement pour le mail que m'a fait suivre mon éditeur.
C'est con à dire, mais ça m'a fait plaisir de t'imaginer touché au point d'en
chialer.
Bon, sur ma poof qui est un digest d'une vie parallèle un peu plus opiacée et
aussi mon bébé —au sens où c'est ma première BD, imaginée et réalisée tout
seul — je suis désolé que tu n'aies pas été touché, mais on ne peut pas
viser juste tout le temps... et avec tout le monde. Rassure-toi, j'en suis
le premier critique. Et d'autres aiment, heureusement (des sales drogués,
faut croire).
Pour le reste, ben, simplement merci d'avoir pris le temps de venir me le dire.
C'est toujours un grand plaisir de savoir que certains, comme moi d'ailleurs,
apprécient un travail au point de prendre la plume pour en informer l'auteur.
Je me fais toujours un petit bonheur (pour ne pas redire plaisir et encore
moins obligation) de répondre. Et je dois reconnaître que c'est cette usine
qui me vaut le plus de retours positifs.
Du coup, je suis allé voir ton blog qui est bien intéressant aussi...
Et comme tout ça semble t'intéresser, sache que nous allons mettre en chantier
le troisième volet de ce que nous appelons, Jean-Pierre et moi, notre trilogie
prolo : "Tue ton patron", ça va s'appeler, en toute simplicité.
J'espère qu'on le terminera pour fin 2010.
1. A l'usine.
2. Autour de l'usine.
3. A la Défense, là où les décisions se prennent !
En attendant, je m'offre une récréation sur un western Music box avec mon pote
Stéphane Nappez. Avant de revenir à cet univers que j'affectionne tant mais qui
est socialement si sombre, j'avais besoin d'un petit remontant fictif.
Voilà, tu sais tout des temps à venir, si les petits cochons ne nous
mangent pas avant, comme disait... heu... ma grand-mère !
Bonne continuation et encore merci !
Amicalement.
efisque
Merci pour ta réponse, et pour ce scoop : "Tue ton patron" ? Ah, ça me
plait, c'est punk, j'ai hâte. Je resterai à l'écoute, sans faute.
Une précision quant à la Poof : certes je n'ai pas été touché, mais j'ai
admiré la virtuosité. Je finissais par regarder les planches sans lire
l'histoire, que je trouvais un peu vaine, un peu facile... Oh ! Je sais
que je me montre bien culotté et con de te dire ces choses aussi
candidement, et tu serais en droit de m'envoyer chier, parce que de ton
point de vue, c'était sûrement très difficile ! Disons juste que ce
n'était pas ma came. Mais je sais que la Poof a de nombreux fans... J'en
connais...
(Et au fait, j'avais bien aimé K une jolie comète, aussi. Ah oui, là
aussi, cela touchait aux tripes, le plaisir n'était pas que rétinien.)

Anecdote "le monde est petit" : je suis très lié avec un particulier nommé
Patrick Villecourt, grand admirateur de la Poof justement, graphiste qui a conçu
tous mes ouvrages autoproduits, et qui a longtemps travaillé à Seyssinet dans le
même bureau que Jean-Jacques Barelli, qui composait autrefois des affiches avec
tes oeuvres en matière première. C'est ainsi que, par hasard, alors que je
planchais sur mes livres, j'ai eu l'occasion de voir en avant première certains
de tes dessins.

Au sujet de la culture ouvrière, et des histoires que l'on en tire...
Je travaille présentement au centre culturel de la ville d'Eybens.
Dans la salle de spectacle, le mardi 12 janvier, nous présenterons la pièce
Sortie d'Usine de Nicolas Bonneau. C'est susceptible de t'intéresser, non ?
Si tu n'es pas trop loin, je peux peut-être t'obtenir une invitation ?
Sur la même thématique, le lendemain à la médiathèque, mon camarade Hervé
Bougel procèdera à une lecture de son livre Les Pommarins, que je te
recommande aussi très chaudement, où il raconte sa jeunesse à l'usine.

Salutations, à la revoyure,
Fabrice
> Merci pour ta réponse, et pour ce scoop : "Tue ton patron" ? Ah, ça me
> plait, c'est punk, j'ai hâte. Je resterai à l'écoute, sans faute.

Je compte sur toi, mec !
Si tu n'es pas au rendez-vous, méfie-toi : j'envoie Patrick Bruel !

> Une précision quant à la Poof : certes je n'ai pas été touché, mais  
> j'ai admiré la virtuosité.

Ach, gut !

> Je finissais par regarder les planches sans lire
> l'histoire, que je trouvais un peu vaine, un peu facile... Oh ! Je sais
> que je me montre bien culotté et con de te dire ces choses aussi
> candidement, et tu serais en droit de m'envoyer chier, parce que de  
> ton point de vue, c'était sûrement très difficile ! Disons juste que ce
> n'était pas ma came. Mais je sais que la Poof a de nombreux fans...  
> J'en connais...

Va te faire enc... heu, non, merci pour ces précisions.
J'aime pas les smiley ou les messages typographiques pour préciser les
pensées, mais je précise que c'est une tentative d'humour, hein !
Le problème de la came, qu'elle soit la tienne ou pas, c'est qu'elle
est pleine de clichés, justement. C'est la loi du genre, malheureusement.
Quand un produit transforme toutes les personnalités en la même, les
histoires de junkies en deviennent banales, toutes les mêmes. Y'a qu'à
se balader à Barbès et regarder le ballet des mecs en manque : dos
cassé, air hagard, tous le même discours et les mêmes obsessions.
Affligeant, oui, mais terriblement réaliste.

> (Et au fait, j'avais bien aimé "K", aussi. Ah oui, là aussi, cela  
> touchait aux tripes, le plaisir n'était pas que rétinien.)

Ah, chouette alors !
C'est notre bébé, ça aussi.
Tu as vu passer Autour de kate ? on y raconte la genèse de tout ça...

> Anecdote : je suis très lié à un particulier nommé Patrick Villecourt, grand
> admirateur de la Poof justement, graphiste qui a conçu tous mes ouvrages
> autoproduits, et qui a longtemps travaillé à Seyssinet dans un bureau commun
> avec Jean-Jacques Barelli, qui composait des affiches avec tes oeuvres en
> matière première. C'est ainsi que, par hasard, alors que je planchais sur
> mes livres, j'ai eu l'occasion de voir en avant première certains de tes
> dessins.

 Oui, je me souviens.
Patrick et Jean-Jacques Barelli ! Que de souvenirs qui remontent...
Comment vont-ils, tu as des nouvelles ?
J'adorais jean-Jacques et je connaissais moins Patrick, mais j'ai
d'excellents souvenirs liés à eux.
Mais le vent du Nord les emporte dans le nuit froide de l'oubli. Et la
mer efface sur la sable, les pas des amants désunis...
>
> Au sujet de la culture ouvrière, et des histoires que l'on en tire...
> Je travaille présentement à l'Odyssée, le centre culturel de la ville
> d'Eybens. Dans la salle de spectacle, le mardi 12 janvier, nous  
> présenterons la pièce Sortie d'Usine de Nicolas Bonneau.
J'ai été contacté par Dominique du Polaris pour intervenir à Lyon (ou
j'habite), autour de Sortie d'usine, justement. Je ne peux pas car je
suis absent au moment des représentations. Mais je reste en contact
avec ces artistes militants bien cool et intéressants.
Pour Tue ton patron, par exemple...

> Le lendemain mon camarade Hervé Bougel procèdera à une lecture de son livre
> " Les Pommarins", que je te recommande aussi très chaudement, où il  
> raconte sa jeunesse à l'usine.

Je cours me renseigner, merci.
Pour l'invitation c'est très gentil, mais après une pause salvatrice à
partir de demain, je m'y remets direct en janvier pour finir les 100
pages de mon western Music box à rendre fin mars.
Je ne fais donc plus rien d'autre, en attendant. Je me suis envoyé
presque un festival, une intervention, ou une librairie par semaine
depuis septembre, j'arrête un moment pour reprendre mon souffle et
faire les albums que j'ai du mal à tomber quand je ne fais que
promouvoir les autres...
Mais ailleurs, pour autre chose, pas de souci, avec grand plaisir, même !

> Salutations, à la revoyure,
> Fabrice

Itou.
Amicalement.
efix
Patrick a connu quelques problèmes financiers qui ont remis en question son
activité fin 2008... Il a redémarré autrement, il bosse désormais chez lui
(entre autre pour mon label d'auto-édition, le Fond du tiroir, même si ce n'est
pas ça qui va le faire vivre), mais de façon un peu précaire. Quant à Jean-
Jacques Barelli, je ne sais pas, je n'ai jamais été très proche de lui, même
s'il était le graphiste de la boîte de com où bossait autrefois ma compagne
(ah comme le monde est petit).
Bon courage pour ta Music box, et à un de ces jours, alors.
Merci pour tes voeux de bonne année ! Moi aussi je te souhaite bien
amicalement de te faire enc !
Fabrice
Merci pour les nouvelles des gens.
En allant sur ton blog, il me semblait reconnaître quelques visages,
en effet. C'est tout.
Un petit mot rapide, entre deux, avant de partir à Paris (mon complet bleu,
y'a trente ans que j'le porteuh) et à Angoulême pour m'exposer l'usine (et
mes chansons ne font rireuh que moi). Juste pour te dire ça et t'en
souhaiter de bonnes. Pas laisser ton dernier mail sans réponse, quoi !
Passe le bonjour à Patrick, steuplé et profite bien de la vie.
Malgré l'enfer environnant, je l'aime bien, cette salope !
Tiens, à propos, naïf, je me suis donc fait enculer sur tes conseils.
Ah, merci, hein ! Putain de bonne idée ! J'ai eu mal au cul
pendant toutes les fêtes ! Depuis, Natacha me regarde de
travers et je n'ose plus me promener dans les bois.
Pfff ! Merci, hein !
Ah.
Bien à toi.
efix
Tu me fais rire... Et comme je suis partageur, j'aimerais bien reproduire
notre correspondance sur mon blog, afin de faire rire dans la foulée
mes trois lecteurs et demi. (Parce que les histoires de sodomie, on dira
ce qu'on voudra, ça fait toujours rire.) Est-ce que tu vois un
inconvénient à ce que je rende "publics" ces messages privés ?
Salut camarade, bon Paris, bon Angoulême, bonne pommade anale
Efvé
Pas de problème, si tu penses que des enculades suggérées peuvent
offrir quelques sourires épars, tu m'en vois bien heureux.
Longue vie à tes écrits et à bientôt, mec.
Que ton parcours soit bordé de belles fleurs turgescentes sur lesquels
tu pourra reposer (glisser ?) ton cul fatigué.
Jolie formule pour te proposer une nouvelle fois de te faire
doucement, tendrement, enculer. En toute amitié !
Comique de répétition, tu dis ? Bon, ok, faudra qu'on se trouve autre
chose... Des fleurs en forme de poings ?
Bises !
efistfucking

Ouf.

31/12/2009 un commentaire

I'm on my way

L’année du Flux se parachève avec et sans nous. L’élégant marque-page conçu par Patrick « Factotum » Villecourt pour orner ce libretto se périme simultanément, tant pis, il est là, il demeure, élégant pour toujours.

Un bilan du vieil an 9 ?
– Trois livres publiés (deux au FdT et un
nulle part, mais très beau tout de même),
– 50 articles postés sur le blog,
– des commentaires de visiteurs à la pelle (davantage lorsque je cause politique que lorsque je cause littérature, tant mieux ? tant pis ?),
– deux ou trois cuisantes polémiques,
– une bonne douzaine de représentations des Giètes pour mon registre « intermittent sans cachet »,
– de la fécondité et de la stérilité par intermittence,
– l’asso FDT
créée en bon et due forme,
– quelques bonnes rencontres,
– quelques beaux voyages, dont un à Copenhague au mois d’août avant tout le monde, quand on avait espoir qu’il s’y passe quelque chose en décembre,
– des demi-nuits d’insomnie passées à faire des réussites débiles, ou à regarder sur Youtube des trucs comme ci ou comme ça, non mais je vous demande un peu,
– des citations dans ma besace (la palme de la phrase qui condense au mieux l’année 2009 revient à Hugo Chavez : « Si le climat était une banque, vous l’auriez déjà sauvé »),
– des joies,
– des frustrations,
– la grippa,
– une crise (partout-partout) aigüe d’eczéma,
– des « nouveautés » et leur contraire (c’est quoi, le contraire de la nouveauté ? c’est un truc qui disparaît discrètement – exemple :
Zazieweb, le seul site littéraire coopératif qui recensait le Fond du tiroir dans son annuaire de petits éditeurs, et qu’on a le droit de regretter pour mille autre raisons),
– des lectures, des écritures, du pain sur la planche, la vie.

De feu 2009, retenons aussi un film souvenir : la « géniale » fête du livre de Villeurbanne a mis en ligne un clip de poétique autopromotion où l’on m’entend me fendre d’un petit compliment. Une caméra se baladait dans le salon, qui demandait à chaque stand « Si vous deviez définir la Fête de Villeurbanne en un seul mot, ce serait ?… » J’ai improvisé une gentillesse paradoxale, j’ai fait le malin, et cela a eu l’heur de plaire au monteur de ce film, puisque ma contribution est finalement la seule reproduite in extenso.

Et demain ? L’an qui vient ?

La Mèche sera peut-être le prochain livre publié par le FdT. Entre temps un autre livre sera rapatrié dans le tiroir…

Les démêlés judiciaires avec l’éditeur initial de deux de mes ouvrages, Castells, sont récemment parvenues à un tournant, qui permet au FdT d’envisager en toute sérénité l’édition de la version revue et corrigée, définitive, de La Mèche – du moins, dès que les phynances le permettront. Je ne vais pas vous déballer comme ça aussi sec le bilan financier (vous n’êtes pas adhérent de l’association, que je sache), mais sachez qu’une certaine somme dort sur le compte de l’asso, et que nous visons au moins le double avant d’entreprendre une production (et une distribution ?) correctes de la Mèche. Mais dans l’intervalle, une autre source ponctuelle de revenus pourrait surgir : Castells a rendu les droits non seulement sur la Mèche, mais aussi sur mon recueil de nouvelles, Voulez-vous effacer/archiver ces messages. Il existe quelque part un stock d’invendus de ce livre introuvable, quelques 400 volumes. Si je parviens (à quel prix ? on verra…) à mettre la main sur ce trésor, j’en ferai don illico à l’association, et ainsi ce recueil deviendra le cinquième livre du catalogue. Ce retour au bercail serait non seulement très heureux, puisqu’il rendrait cette œuvre de jeunesse (que je suis loin de renier, oh câlibouère, bien loin) à nouveau disponible, mais également tout-à-fait cohérent : cet ouvrage a beau avoir été conçu pour le compte des défuntes éditions Castells, il n’en constitue pas moins la première collaboration entre le précité Factotum et moi-même. Il s’agit donc, en quelque sorte, d’un livre « pré-FdT » sans lequel les suivants n’eussent tout bonnement pas existé.

Parfois, l’on me demande « Alors, tu sors bientôt un livre ? », et je réponds tant bien que mal, « Ben, regarde, je viens de faire quatre livres en un an, là, au Fond du tiroir… », mais l’argument semble irrecevable lorsque l’on s’intéresse, fort aimablement du reste, davantage à ce que je « sors » qu’à ce que je « fais », et l’on me rétorque, « Non, mais des VRAIS livres, je veux dire ? » Ah, oui, d’accord, ces livres-là…

Au chapitre du « vrai », doit-on attendre une publication sous mon nom en 2010 ? Oui, j’espère bien. Je viens de terminer (d’où le titre du présent article – presque « ouf » à dire vrai, puisque quelques bricoles restent à fignoler) un roman dont la conception aura été ridiculement longue, presque trois ans pour en venir à bout, des allers et retours incessants entre certaines idées qui me chatouillent et des agencements romanesques d’autant plus laborieux que je les veux impeccablement fluides. Bref, ce roman, cette séquelle, pourrait paraître chez Magnier l’an qui vient – si tout va bien, c’est-à-dire si Magnier en veut, car la question n’est pas absolument réglée. Je crois que ce bouquin sera très bien, même avec son gros défaut : deux ans de retard.

Allez, l’histoire avance, avec, et sans nous. « I’m on my way ! »

Je me souviens du film Dick Tracy de Warren Beatty, kitsch et clignotant comme un sapin de noël. Je me souviens d’une interview de Beatty, à qui un journaliste demandait quelle mouche l’avait piqué, pourquoi diable un type aussi sérieux que lui, acteur respecté, auteur capable de Dix jours qui ébranlèrent le monde, mais pourquoi donc le prestigieux Warren Beatty s’était-il entiché de cet héroïsme régressif de comic strip, de ce défenseur de la loi au premier degré pop, de cet archétype infantile en imper jaune ? Pourquoi ne sortait-il pas de vrais films, plutôt ? Beatty avait répondu un truc du style : « Poser un chapeau sur ma tête, enfiler un imper, regarder ma montre, m’exclamer I’m on my way !, et partir en courant à l’aventure, figurez-vous que ça m’excite. » Je cite de mémoire, mais j’ai parfaitement retenu l’esprit de cette explication alors que j’ai pour l’essentiel oublié le film lui-même.

I’m on my way, c’est suffisant, c’est optimiste tout de même, c’est énergique, c’est juvénile, c’est disponible, c’est solaire comme un ciré, c’est fort judicieusement naïf, c’est parfait, en guise de vœux pour un nouvel an.

J’ai inauguré « J’ai inauguré »

29/03/2009 Aucun commentaire

Ingvar Kamprad Elmtaryd Agunnaryd

Je l’ai ! Il est beau ! Plus beau encore que je ne l’espérais, et j’espérais beaucoup ! J’ai inauguré IKEA a été rendu par l’imprimeur avant-hier, tout pimpant, gorgé d’odeurs d’encres, et depuis j’en ai des bouffées de rires, je glousse comme un imbécile heureux, que je suis au fond. (Au fond de quoi ?) Et je cite à nouveau, par plaisir et par devoir, celui qui est, au minimum, co-auteur de ce livre : Patrick Villecourt, factotum et concepteur de ce livre-objet qui est le sien encore bien plus que le mien.

À présent, comme à chaque livre du FdT, je dois digérer la joie d’avoir fait le plus beau livre du monde, et m’employer à une tâche d’éditeur, que je ne suis guère au fond : le vendre. Ouïe, les ennuis commencent. Ennuis rigolos, parfois : j’ai vendu les premiers exemplaires ce week-end même sur mon stand du salon de Grenoble, j’ai testé les  réactions…  Une dame s’est exclamée devant mon stand, « Oh, IKEA ! », ça lui faisiat quelque chose, elle m’a expliqué, en anglais, que sa famille était partiellement suédoise, qu’elle avait travaillé pour IKEA, que ses enfants adoraient IKEA, qu’ils appelaient ça « The Big Blue House », et d’empoigner mon livre et de le brandir à la face de son môme, en poussette, à peine plus d’un an, « C’est quoi ça mon chéri ? Tu reconnais le logo, hein ? C’est quoi ?  Réponds à maman mon chéri ! Tu sais ce que c’est voyons ! C’est iiiii…. C’est iiiiiiiiiiiikkkkk…… C’est ikkkkkkkkééééééééé…. » Le gamin a fini par lâcher le mot magique, qu’on en finisse, j’étais plutôt embarrassé. En-deçà de tels cas limites d’émotivité, les badauds s’arrêtaient globalement perplexes (et exceptionnellement émerveillés) devant cette planche bizarre, inconcevable,  « Alors ça, donc, ces affiches, là, ce sont les épreuves de votre prochain ? les brouillons ? les extraits ? et il sort quand, celui-ci ? » Eh bien, il sort avant-hier, chère madame. Car vous avez devant vous le produit fini. (Ah, et par ailleurs, restituez-moi immédiatement cet exemplaire du Flux que vous avez glissé en douce dans votre sac, il s’agit d’un vrai livre, pas d’un prospectus, ni d’un catalogue, ni d’un produit promotionnel.)

Je m’occuperai demain des souscriptions. L’envoi par la poste est problématique : l’objet mesure 64 cms sur 45 (une fois monté, 14 x 19,5)… Soit je le plie pour le glisser dans le pli, ce qui est dommage parce que la feuille, dans l’idée, ne doit être profanée que par son lecteur (en outre pour faire simple les plis nécessaires à l’enveloppe ne correspondent pas aux plis préconnisés pour le montage de l’ouvrage), soit j’achète des tubes en carton, mais j’augmente ainsi très sensiblement les frais de port.

Bon, que cela ne vous empêche pas de commander

C’est moi, ou bien il y a comme une odeur de lapin crevé, là ?

22/03/2009 2 commentaires

lapin en suédois, c'est "kaniner", presque une anagramme avec trois consonnes en trop

Patrick Villecourt, a.k.a. Factotum-man, pour être homme de l’ombre, n’en est pas moins photographe, soit étymologiquement « écrivain de lumière ».

Le prochain livre extrait du Fond du Tiroir créditera, enfin, Patrick en tant que co-auteur à part entière (comme s’il n’avait rien fait sur les trois premiers), puisque ses photographies, ainsi que sa conception graphique, donneront à l’objet sa tenue, son fil, son liant, sa colonne vertébrale, ses grandes oreilles et ses yeux rouges, comme vous voudrez.

Mandaté par le FdT en vue de la confection de ce projet spécifique, Patrick s’en fut un beau matin en repérages sur le parking du magasin IKEA. Ce qu’il vit là-bas ? Du jaune, du bleu, et un lapin écrasé sur la chaussée. Attention, petit lapin ! Ne va pas acheter tes meubles chez IKEA ! Rentre vite dans ton terrier ! Ah, zut, trop tard…

Cette photo ne rentrait pas dans le livre, mais je l’ai trouvée belle quand même, oh, à sa façon, modeste et baudelairienne, tellement juste dans son propos qu’il vaut mieux en blaguer, enfin chacun ses goûts, alors je la publie sur le blog.

Et qu’est-il, au fait, ce quatrième Fond de tiroir qui sent bizarre ?

L’ouvrage s’intitule J’ai inauguré IKEA. Il coûte 4 euros, presque rien, parce que c’est un petit texte (à peine plus long que le Flux), mais voici, en vérité, un ouvrage fort curieux. Il vous sera livré figurez-vous en un paquet plat, sous la forme d’une seule feuille de très grand format et de très belles couleurs, complet de son mode d’emploi (pas en suédois) et de ses deux attaches parisiennes, que vous pourrez plier, couper, monter et lire confortablement à la maison, en poussant des jurons ad libitum si, le cas échéant, l’accompagnement de jurons agrémente avec profit votre pratique du bricolage téléguidé.

Le livre (appelons-le « livre », même si c’est pure convention) étant actuellement chez l’imprimeur, vous pouvez d’ores et déjà nous le commander. Pas ici, malheureux ! Rendez-vous là, plutôt ! Aucune odeur de bête crevée, chez nous !

Culture de masse

01/03/2009 2 commentaires

fonciforme

Patrick Villecourt, facétieux et perspicace homme de main du Fond du Tiroir, n’a pas que des qualités : il lit aussi Télérama. Du moins, chaque mercredi, il remplit consciencieusement la grille de mots croisés de cette auguste revue de télé-, comme son nom l’indique, mais aussi de culture (c’est la partie –rama). Or voilà que tout soudain Patrick me tonitrue : « Télérama parle de nous ! Vise un peu les mots croisés de cette semaine ! » Et de m’envoyer l’irréfutable montage ci-dessus (vous pouvez cliquer pour l’agrandir).

Effectivement. Nous sommes sauvés ! Si le FdT a enfin pénétré les pages cet officiel bulletin de la culture comme-il-faut, alors sa fortune est faite ! Le Tiroir ailé a achevé son destin, il a pénétré le goût dominant ! Mieux : il est le goût dominant ! Merci Télérama ! Fort de cette heureuse nouvelle, nous allons nous consacrer sereinement à la fabrication de notre quatrième « livre », qui sera tiré à bon marché quoiqu’à 1000 exemplaires (à peu près autant que les trois premiers réunis), et dont le bon de souscription mesdames et messieurs pourrait être disponible dès la semaine prochaine.

Ah oui, on ne traîne pas, on ne fait pas que des mots croisés, le quatrième est pratiquement prêt (mais c’est le dernier avant longtemps – ensuite plus rien d’ici l’automne, au moins)… Que voulez-vous savoir sur ce livre ? Son ISBN ? Vous êtes bien curieux ! Bon, d’accord, mais c’est bien parce que c’est vous : 978-2-9531876-3-2. Ne le répétez pas à n’importe qui.

(Pour de vrai, et pour l’anecdote, sans vouloir me hausser du col ni la ramener avec mon bouc, j’ai déjà été cité une fois dans Télérama, qui m’a qualifié de « sociologue » dans son n°2794 de juillet 2003, à propos d’un article que j’avais publié en revue : « Dans « Une Iliade ou une Odyssée ? Le voyage et son double », très belle étude qui nous a donné l’envie de savoir ce que voyage veut encore dire, le sociologue Fabrice Vigne laisse à son lecteur le soin de conclure etc…« , alors hein, c’est dire si je suis autorisé à en causer, de la culture de masse. Mais je vous laisse le soin de conclure.)

Quoi d’autre ? Ah, oui : en attendant l’avènement du prochain livre, vous pouvez vous occuper en lisant l’instructif échange qui vient d’avoir lieu sous un précédent article : ça barde, au Fond du tiroir. Je suis tricard en Tricastin, et plutôt triste, je l’avoue… Cherchez pas plus loin, c’est pour ça que je fais le clown…