Archive

Articles taggués ‘L’Echoppe enténébrée’

Où l’on reparle des rêves

04/03/2009 un commentaire

indicible !

J’adore les récits de rêves, même ceux des autres.

Nathalie Etienne, grande rêveuse, m’avait déjà confié quelques-uns des siens, notamment après la publication de l’Echoppe enténébrée. Elle m’en offre un nouveau que je reproduis ici avec grand plaisir, et d’autant plus de gourmandise qu’il s’agit d’un rêve joyeux, contrairement à d’autres qu’elle me confia… (Et je précise à la cantonade, avant que cette dernière ne me taxe de narcissisme parce que la cantonade est toujours de mauvaise foi, que j’adore les récits de rêves, même ceux des autres, même quand je n’y apparais pas. Il se trouve, que, dans celui-ci, j’apparais, bon…)

« Je rêve énormément, tout le temps (c’est un vraie vie parallèle pour moi), de tout le monde pratiquement…. de gens qui me sont proches ou éloignés, avec qui je suis très liée ou pas sur le plan affectif (je peux rêver du maire de mon village, par exemple), je peux même rêver de gens que je n’ai pas vu depuis 30 ans ! Cette nuit, j’ai fait un rêve dans lequel tu étais. Le rêve était très court, je te le raconte : Je suis dans un théâtre à l’italienne, à l’orchestre. Je suis venue pour voir Philippe Claudel, je dois l’accompagner sur scène pour recevoir des prix (rien que ça! la fille à peine mégalo !) Je vois dans la salle trois hommes qui se ressemblent beaucoup, ils regardent la scène et attendent eux aussi Philippe Claudel. Tous les trois portent le même prénom, « Fabrice », je ne sais plus comment je le sais mais je le sais. Une ouvreuse vient me dire, « allez-y, il faut jouer maintenant, ne vous trompez pas! ». Les trois « Fabrice » se mélangent (un peu comme les dés que tu dois retrouver sous un gobelet), je le dis d’ailleurs à l’ouvreuse , je lui dis « Mais c’est comme le jeu de dés dans la rue ! », elle me répond « oui c’est ça, exactement ! ». Je désigne le « bon Fabrice » que j’aperçois de trois quart, je sais que je dois trouver Fabrice Vigne et je ne me trompe pas. Je suis contente et je dis à l’ouvreuse, « je ne l’ai vu qu’une fois, Fabrice Vigne, mais je suis sûre que c’est lui ». Et là, tu te retournes, et tu me dis « Gagné ! » avec un sourire ravi et des yeux très doux, puis tu disparais et philippe Claudel entre sur la scène et je me réveille….. Sympathique comme rêve non ? en tout cas il m’a semblé de bon augure, pour mes démarches vis-à-vis de Castells.
Ciao ciao »

Lumières : « les démarches vis à vis de Castells » désignent nos démêlées longuettes auprès de notre éditeur commun ; Philippe Claudel, ami de Nathalie, est pour elle l’exemple type de l’intégrité littéraire, et de la justice dont font preuve, à l’occasion, les trompettes de la renommée ; il est normal que Nathalie et moi nous reconnaissions au théâtre, puisqu’elle et moi avons le théâtre en ligne de mire à notre horizon littéraire : une de ses pièces, écrite à partir du témoignage qu’elle a recueilli auprès d’un ex jeune détenu de la prison Metz-Queuleu, Quartier d’en bas, sera prochainement jouée à Nancy, tandis que j’attends impatiemment l’adaptation de mes Giètes à Lyon au mois de mai ; c’est un fait, nous ne nous sommes vus qu’une seule fois ; mais alors pourquoi cette partie de bonneteau sur ma personne ? Pourquoi suis-je triple ? Je ne sais pas. Mais ça me plaît. La cantonade peut bien me taxer de narcissisme.

Le Flux dans l’Echoppe

05/12/2008 un commentaire

Rêve des livres en papillotes de papier sulfurisé

Lundi 1er décembre 2008

Je suis assis à mon stand, qui est un bureau de modèle collège très ancien (avec trou pour l’encrier), sur un salon du livre. Le « salon » est en réalité une galerie unique, longue et étroite, où de semblables bureaux sont alignés. C’est apparemment la fin de la journée, parce qu’il n’y a plus grand monde, les allées sont jonchées de détritus, nappes déchirées, prospectus, gobelets, papiers divers. Personne ne fait attention à moi. Je suis très nerveux pourtant, parce que j’attends une livraison. Je ne peux quitter ce salon absurde sans avoir reçu ce que j’attends.
Finalement, à un moment où je reviens m’asseoir à ma place, la livraison a eu lieu pendant mon absence, je n’ai pas vu le livreur. Il s’agit de deux cartons empilés par terre, devant mon stand. J’ouvre fébrilement le premier carton avec un cutter. Il contient de minuscules cocons de papier sulfurisés, comme des poissons en papillotes prêts à mettre au four. Je déploie un de ces cocons dans le creux de ma main : il contient bel et bien mon nouveau livre « Fond du tiroir », intitulé Le Flux, que j’attendais. Il se présente sous la forme de quatre feuilles volantes et infimes, comme du papier à cigarette, quatre feuilles pliées en deux les unes dans les autres. Je peine à lire ce qui est imprimé dessus, je suis perplexe, quel lecteur va s’intéresser à ce « livre » illisible ?
J’ouvre le deuxième carton. Il contient l’accessoire indispensable à la lecture de ce livre : une visionneuse en plastique, de la taille d’un grille-pain mais bien plus légère, comme si elle n’était qu’une coque vide. Je l’inspecte de tous côtés, je hoche la tête, je la trouve bien sale pour un matériel neuf, je crois bien que je me suis fait refiler un truc d’occasion, et je me demande si je vais parvenir à en saisir le mode d’emploi. Peut-être qu’en rajoutant le logo Fond du Tiroir sur le côté… Non, même comme ça, cet engin abscons pue la camelote. Je le secoue légèrement, des bruits de légers entrechocs trahissent des pièces brisées. Je crois reconnaître sur le côté, en ôtant la poussière avec mes doigts, un gyrophare bleu, mais je ne vois pas où sont cachées les piles. Ce gyrophare est mort, ainsi peut-être que l’objet en entier. J’essaye de comprendre comment je dois insérer à l’intérieur le cocon de papier sulfurisé afin de rendre possible la lecture du Flux.

Je me réveille.

En vente partout !

14/11/2008 Aucun commentaire

En vente nulle part, oui. Je l’ai déjà dit, L’Échoppe enténébrée, récits incontestables n’est pas en vente en librairie (mais seulement sous le manteau). Pourquoi ? Eh bien, pour certaines raisons évidentes (étant donné le prix de revient, si on enlève la marge du libraire, je vends ce livre à perte et préfère donc ne pas le vendre du tout) et pour d’autres plus occultes (voilà un ouvrage underground, pas tête-de-gondole pantoute, dédaigneux de ses chiffres de vente, exclusivité réservée aux lecteurs sérieusement motivés, qu’ils se débrouillent donc pour trouver le chemin, le Fond du tiroir ça se mérite).

Certains libraires (bonjour Yves, bonjour Christian) m’en ont affectueusement fait le reproche, mais c’est comme ça. Pas d’échoppe pour l’Echoppe.

Et pourtant, j’ai fait à ce jour deux exceptions.

1) J’ai déposé le mois dernier une poignée d’exemplaires à la librairie Bonnes nouvelles, 3 rue Dominique Villars à Grenoble. Pourquoi acceptè-je de vendre à perte ici et pas ailleurs ? Eh bien, pour certaines raisons évidentes (cette librairie-ci se distingue par son fonds, constitué de curiosités introuvables, de mille et un livres rares et précieux, exclus des circuits commerciaux ordinaires, L’Échoppe y est bien entourée), et pour d’autres plus occultes. Je dois une fière chandelle aux Bonnes nouvelles. En 2005 je leur avais confié un manuscrit, pour avis. Elles l’avaient transmis à Philippe Castells, un autre client de leur boutique. Dans l’année qui a suivi cette entremise, j’ai publié deux livres aux éditions Castells – expérience au bilan nuancé mais sans laquelle je ne me serais jamais lancé dans l’auto-édition. C’est dire si, d’aile de papillon en aile de papillon, sans l’échoppe « Bonnes nouvelles », L’Échoppe « incontestable » n’existerait pas.

2) Je reviens de Saint-Etienne, où une animation sur Les Giètes a eu lieu tant bien que mal (les gens qui m’accueillaient étaient tout à fait charmants mais foutredieu j’ai rarement vu une organisation aussi par-dessus-la-jambe ! les libraires croyant que les bibliothécaires se chargeaient de tout, et réciproquement, personne finalement n’a rien organisé du tout. Parlez-vous un peu, messieurs-dames ! Vous êtes voisins ! bref…). J’étais venu avec sous le bras quelques exemplaires de l’Echoppe, et avant de repartir je les ai confiés à la librairie Les Croquelinottes. Pourquoi ? Eh bien, pour certaines raisons évidentes (on me l’a demandé gentiment), et pour d’autres plus occultes (ils ont accepté que je ne leur concède qu’une remise ridicule de 10%, au lieu des 35% habituels).

Et c’est ainsi que L’Échoppe enténébrée, récits incontestables est désormais en vente dans deux librairies au monde. Je me demande si je ne suis pas en train de me faire récupérer par le système, corrompu, pourri, vicié, laminé, en un mot : vendu…

Volatil comme un rêve

02/09/2008 3 commentaires

« Nous avons tous du génie
dans la position horizontale
et les yeux clos »
André Hardellet, Lourdes, lentes…

One satisfied customer. Pendant l’été, la vente par correspondance continue. Un seul exemplaire de l’Echoppe m’a été commandé ce mois-ci (il m’en reste ! plein ! profitez-en ! n’hésitez pas !). Cette singularité n’a pas empêché, et a peut-être favorisé, une prise de contact directe puis une convivialité de type 2.0, c’est à dire une correspondance soutenue et blogoïde, avec le commanditaire, un certain Yves Mabon, animateur (auteur ? dit-on « auteur » pour un blog ou bien ce mot est-il trop sacré ?) d’un blog intitulé Lyvres.

Je reproduis ci-dessous cette correspondance, qui a essentiellement trait aux rêves, comme il se doit.

« Bonjour. Je viens de recevoir mon exemplaire à moi de L’échoppe enténébrée (tuyau piqué chez Sylire). Je n’ai encore lu que deux ou trois rêves, et bien qu’assez prosaïque, j’avoue y avoir pris un goût certain ! Assez amateur en général de livres sortant de l’ordinaire soit par l’histoire, soit par l’écriture, je pense être tombé sur un beau petit livre fait pour moi. Bonne continuation
Yves Mabon »

« Merci Yves, me voilà très touché (ma seule vente de livre de tout l’été, et elle fait mouche ! chic), et merci aussi à Sylire, par procuration. Je viens de fureter dans votre blog, du coup. Si je partage certains de vos enthousiasmes (ah ! Ali Farka Touré !), en revanche, je suis désolé que vous n’ayez pas goûté Casse-Pipe de Céline, livre avorté certes, mais quel vigoureux avorton ! Je l’ai lu autrefois, juste après mon service militaire, et il m’a vengé de bien des choses. Mais peut-être n’avez-vous pas fait l’armée ? Avec tous mes voeux de fertiles et cependant absconses rêveries,
Fabrice »

« Et pourtant si, je l’ai bien fait ce satané service militaire, contraint et forcé. J’ai trouvé la lecture de Casse pipe très difficile : tout ce qui était dialogue m’a fatigué, je n’ai pas apprécié. (J’aurais dû le lire moi aussi juste après cette sinistre période) Par contre, j’aimais bien la prose de Céline, de même que j’ai adoré Voyage au bout de la nuitMort à crédit. Je viens de finir votre échoppe d’une première lecture, histoire de savoir à quoi j’avais affaire. Dans l’ensemble, j’aime bien vos rêves : quelques uns sont très beaux ! (j’en ferai une petite critique sur mon blog). Je suis donc ravi par le livre, petit cadeau que
je me suis fait à moi-même. Je relirai plus lentement, peut-être juste un par soir, avant de dormir, histoire de faire venir mes propres rêves. Bonne continuation à vous
PS : du coup, je viens d’emprunter à la bibliothèque, TS d’un certain Fabrice Vigne. n’hésitez pas à revenir me voir. Puisque j’ai partagé vos rêves, je me permets de vous saluer amicalement,
Yves »

« Bon, puisque vous aimez Voyage au bout de la nuit, nous n’allons certainement pas nous fâcher. Céline est l’un de mes écrivains essentiels, l’un de ceux sans qui je n’écrirais pas moi-même, et je considère que beaucoup d’écrivains contemporains (je me compte dans le lot) ne sont à côté de lui que des petits garçons. Je ne me lasse jamais de « l’entendre parler » (puisque il disait écrire « comme on parle à l’oreille du lecteur »), y compris dans ses livres les plus mineurs, comme Casse-Pipe.
Merci pour votre critique de l’échoppe. Et puisque vous avez emprunté TS, je vous recommande de ne relire l’échoppe que lorsque vous aurez terminé l’autre, avec lequel il a quelques liens : le grand secret du livre rouge, c’est qu’il s’agit d’un journal occulte d’écriture du livre bleu, narrant épisode par épisode les effets de la conception de ce texte princeps, jusqu’à ceux de sa publication.
Le récit de rêve est un genre littéraire à part entière, et si cela vous intéresse, je vous recommande ceux de Perec, de Queneau, de Leiris, de Kerouac, de Michaux, par exemple. Moi, j’adore ça. C’est de la poésie brute, sans affectation. En bande dessinée, ceux de David B. ou JC Menu sont également très beaux.
Bien amicalement à vous, et bonne(s) lecture(s)
Fabrice »

« D’accord pour dire que beaucoup d’écrivains sont tout petits à côté de Céline et de son écriture si forte, toujours, à mon sens, sur le fil du rasoir, si près de passer dans le vulgaire, mais restant néanmoins du « bon côté » du rasoir. Sûrement ce qui en fait sa force. Pour Casse-pipe, j’ai senti qu’il avait franchi ce fil, mais cela reste mon interprétation personnelle.
Quant aux rêves, je ne savais pas que c’était un genre littéraire à part entière, et que Queneau (un des écrivains que je préfère) y avait participé. Je lirai sans doute, moi qui ne suis pas forcément amateur de poésie pure, mais qui aime bien les récits poétiques (comme votre échoppe) : je ne connais pas non plus cet aspect de Perec. Je n’ai pas encore osé m’aventurer dans Kerouac ni Michaux et ne connais pas Leiris, ni les auteurs de BD que vous citez. Que de belles découvertes en perspective !
Merci des conseils
Yves »

« Peut-être que Casse-Pipe est plus vulgaire que ses autres livres parce que la matière première (l’expérience militaire) l’était en proportion ?
En ce qui concerne les rêves de Queneau, voilà un cas intéressant. Il s’est entraîné, comme beaucoup de ses ex-camarades surréalistes, à rédiger ses rêves, mais il a aussi, et c’est plus original, concocté de FAUX rêves, rédigés à la manière onirique, retrouvant en plein jour l’énergie de l’imagination nocturne. Très curieux. On en trouve des échantillons recueillis dans le livre Contes et propos, si le coeur vous en dit…
Merci pour la causette, bonne journée…
Fabrice »

« En lisant votre mail, je me suis dit, bon sang, mais c’est bien sûr, je connais ce titre (Contes et propos) de Queneau. alors, je monte quatre à quatre les escaliers pour me retrouver devant ma bibliothèque, qui contient ce fameux opus. Honte sur moi d’avoir oublié cet ouvrage, lu il y a assez longtemps. Bien sûr, je l’ai ouvert, j’ai feuilleté la préface, signée… Michel Leiris. Et hop un bouquin et un auteur soit-disant inconnus qui me reviennent en pleine figure. Quelle aventure !
A bientôt
Yves »

Accident nocturne

10/07/2008 Aucun commentaire

« Sauf accident, il n’y aura pas de nouvel article posté ici avant l’automne », ai-je dit ? Okay, alors voici un accident et n’en parlons plus.

Ci-dessous un échange par mails avec Nathalie Etienne, dramaturge et romancière que j’ai rencontrée à l’époque des éditions Castells.

Nathalie me cite, parmi ses lectures de l’été, Henri Bauchau. Hasard objectif : peu après, je feuillette le Telerama de la semaine, à cataloguer pour les usagers de la médiathèque, et Je tombe sur cette titraille : “L’histoire du monde serait plus juste si l’on tenait compte de l’histoire des dormeurs et de leurs songes. Henry Bauchau”. Forcément, je lis attentivement l’interview qui se déploie sous cette accroche.

“… développer le côté du coeur, celui qui indique la capacité de vivre ensemble sans lutte, sans rivalité. [Comment ?] En repoussant les barrières intérieures, en écoutant ses rêves. J’ai toujours été frappé que tant de gens vivent dans l’ignorance de leur activité onirique. Pourtant, l’histoire du monde serait plus juste si l’on tenait compte de l’histoire des dormeurs et de leurs songes. Ce qui se passe pendant le sommeil a une influence considérable sur l’éveil [NDFV : Et dire que c’est l’inverse que le sens commun tient pour une vérité indiscutable…]. En prendre conscience ouvre des horizons”.

Eh bien, soit : que mon Echoppe soit en toute modestie mais ni plus ni moins, une contribution à “L’histoire du monde”. C’est ce que j’écris à Nathalie. Elle me répond :

« Fabrice !
je pensais justement à toi cet après-midi, je me disais qu’il fallait que je t’écrive pour te parler de l’Echoppe que je viens de terminer. Tu vois, quand je te disais que Bauchau était un gars bien ! c’est très flatteur pour toi d’appartenir au même « monde » que le sien………évidemment j’adhère à 100% à ce qu’il dit…… Je me suis intéressée très tôt au rêve, par Jung pendant mon adolescence puis… par moi-même tout simplement. Je vais te raconter une anecdote que tu pourras certainement comprendre avec ton coeur justement (ensuite je te parle de ton livre) :
Quand ma deuxième fille est morte, je me suis beaucoup réfugiée dans les rêves (classique comme démarche) au début parce que j’espérais ainsi retrouver les sensations que j’avais connes à travers mon expérience de N.D.E, ensuite pour apaiser ma peine. Une nuit, quelques mois après sa mort, j’ai rêvé d’elle, elle m’est apparue sous les traits d’un beau garçon, jeune, une vingtaine d’années, mais je savais que c’était elle, et j’accomplissais (je résume mais le rêve était extrêmement précis) toutes les tâches maternelles que je n’avais pu accomplir avec elle. J’étais parfaitement heureuse. Je me suis réveillée avec la certitude de la retrouver un jour…comment? sous quelle forme? je ne sais… je ne crois pas en Dieu……..et même si cela procède d’un fantasme, ma souffrance était moindre……c’est déjà ça…..
Ton livre :
J’ai été partagée entre deux sentiments : la gène et l’intérêt, qui ne sont pas -me semble-t-il- antinomiques.
Pourquoi la gène? Parce que tu te dévoiles beaucoup (tes enfants par exemple) dans ce livre…. il y a chez moi une forme de pudeur qui se manifeste d’autant plus que mon interlocuteur (et c’est ton cas à mes yeux) se montre généralement non pas distant mais réservé (ce qui me plaît bien). En clair, tu ne t’es jamais (et c’est très respectable) livré (dans nos échanges épistolaires) sur ta vie privée (ta femme tes enfants etc….) J’avais l’impression en avançant dans ma lecture de « déflorer » quelque chose en toi…….. et cela me gênait…un peu….pourtant il n’y a rien d’indécent dans ton livre, ce n’est pas de cet ordre-là, c’est autre chose…….peut-être parce que de par ma thérapie (j’ai longtemps été en analyse) je sais à quel point les rêves sont importants et à quel point on se découvre (dans tous les sens du terme….)quand on les raconte…..et peut-être aussi parce que je ne te connais que par ton « statut » d’auteur…je sais pas trop……à part cela j’ai été impressionnée par les ressources « fictionnelles » de tes rêves ! Ca « fictionne bien » donc ça fonctionne bien…… Ils sont d’une précision hallucinante ! tu es un grand dormeur et un grand rêveur devant l’éternel !
Bien à toi
Nathalie »

« Bonjour Nathalie
Merci pour ton message, commentaire parmi les plus fournis et argumentés que je reçois au sujet de mon Echoppe. Certes, dévoiler ses rêves a un côté « indécent » (Vincent Karle [NDFV : un autre « auteur Castells »] a formulé la même réserve), mais quant à moi je trouve très innocent de révéler mon activité onirique (c’est le sens de l’épigraphe, la chanson de Tom Waits, « You’re innocent when you dream »), geste infiniment plus mystérieux, poétique, et au fond : pudique, que de dévoiler un VRAI journal intime avec des VRAIS morceaux de ma vie, ce que je pense, ce que je vois, ce que je crois, etc (certes c’est ce que je fais, un peu, avec ce blog, et précisément je constate les limites esthétiques de cette pratique). Comme tu le dis très justement, le cerveau qui dort est une machine à fabriquer de la fiction, et ce caractère de « littérature brute », « incréée » comme les musulmans disent au sujet du Coran « non écrit », ne cesse de me fasciner. Tous ces récits sont à la fois vrais et faux, comme des romans, comme ce que l’on attend des romans.
Merci aussi pour ton rêve… Ta fille en jeune homme… C’est beau. Je ne peux ni ne veux analyser plus avant : c’est beau, voilà tout, émouvant.
Fabrice »

« Tu as raison Fabrice, bien raison et la démarche de « brouiller les pistes » par le biais de la fiction et que j’ai bien perçue dans ton livre est éminemment intéressante….je me demande si à la longue, et peut-être comme beaucoup de lecteurs , je n’ai pas fini par développer une méfiance vis-à-vis de « l’intime » en écriture tout simplement par que je suis saturée (contre mon gré malheureusement) d’informations très intimes (et pour le coup très indécentes) sur un tel ou une telle via les média (à commencer par la vie de Sarkozy)ça frise l’overdose. Je suis tombée par hasard sur un article qui faisait la promo du nouveau roman de Christine Angot, elle y raconte en long en large et en travers sa relation avec le chanteur Doc Gynéco….ce n’est pas indécent c’est carrément vulgaire. Toute cette littérature(et ça marche!)putassière m’écoeure et je m’interroge souvent sur le fonctionnement du lecteur actuel: qui est-il vraiment? pourquoi lit-il ce genre de livres? Qu’y cherche-t-il? Surtout lorsque l’on sait que le lecteur est un genre en voie de disparition. Je ne veux pas condamner mais j’aimerais bien comprendre, vraiment.
Bien à toi
Nathalie »

 » Je t’avoue que les dernières aventures de Christine Angot, dont certains livres m’avaient beaucoup touché, m’indiffèrent absolument, appartenant davantage à la sphère « people » qu’à la littérature. Voilà qui répond, justement, à ton questionnement : pourquoi est-ce que ça « marche » ? La réponse est connue depuis longtemps : « pipole » ! Pour vendre un livre, il ne faut pas forcément être écrivain, mais il faut à tout prix appartenir à cette sphère médiatique, qui « apparaît », et par cette apparition démontre en permanence et tautologiquement la loi énoncée par Guy Debord pour définir la société du spectacle : « Ce qui est bon apparaît, ce qui apparaît est bon ». Ainsi se poursuit le décervelage, et qu’est-ce que je suis bien au fond de mon tiroir ! Je n’apparaît pas, je disparaît.
Certes mon Echoppe rend public des pans de mon intimité, mais comme je ne suis pas, ne serai jamais, et n’aspire aucunement à être, « pipole », je suis tout à fait tranquille. Je peux parler de mes enfants : on s’en fout, ils ne passent pas à la télé. En conséquence mon livre ne peut rien révéler d’ « intéressant ». Si l’on y cherche des révélations, il peut être lu, au mieux, comme un journal d’écriture, autiste et en négatif, de mon premier roman, « TS », de sa conception aux effets de sa publication. Aucun parisien, aucun écrivain célèbre, aucun politicien, aucun rappeur, aucune tête de gondole, même pas un journaliste de « Livres hebdo », dans cette histoire.
Fabrice »

Bilan moral et financier (et un peu écologique)

19/06/2008 4 commentaires

Le Fond du tiroir existe depuis trois mois. Dans un souci de transparence, voici quelques données de type « bilan et perspective » de ma petite entreprise. Et ceci au beau milieu du temps des catastrophes, de la globalisation des violences tribales, du fatal réchauffement de la planète, de l’obligation de résultats du Ministère de la Francisque et de l’Identité Nationale, de l’effondrement conjoint du moral des ménages et du pouvoir d’achat (car le moral est lié intrinsèquement au pouvoir d’achat : voilà où nous sommes rendus), des tensions internationales et de la blingblingation de la France, des communautarismes imbéciles, des mariages annulés parce que l’épouse n’était pas vierge, des ressentiments sociaux évacués dans l’Eurofoot (hélas la catharsis a fait pschittt ! les Français sont éliminés ! ah, les nuls ! il faut par conséquent trouver un exutoire d’urgence : je propose de les lyncher en place publique), des égoïsmes décomplexés, des individualismes forcenés, des mémoires effacées, des politiques de saccage culturel, et des Rafales vendus avec le sourire en Arabie Saoudite. Et qu’est-ce que je fais, moi, au beau milieu de ce temps ? Je redécore le fond de mon tiroir. Il y fait frais. Voici l’état des lieux.

1) Le blog. Je me serai bien amusé tout au long de ce printemps pourrave avec mon joujou, merci beaucoup (grand merci, au fait, à mon webmestre qui préfère demeurer anonyme, son nom de famille étant compromettant). Mais je vais très prochainement le mettre en veilleuse, pour ne le réouvrir que lorsque j’aurai écrit un livre. Je crois qu’au fond du fond, je préfère écrire des livres que des blogs.

2) Mes apparitions publiques. Elles se sont multipliées comme jamais cette année. Hé bien, pour être franc, c’est trop. Comme un blog, c’est excitant, un agenda rempli. Mais ce n’est pas ce qui va me permettre d’écrire ce que je cherche. Par conséquent, pédale douce. En ce qui concerne mes apparitions virtuelles : les polémiques continuent de faire rage (ou plutôt de faire enrager) au sujet de la « littérature ado », chez Blandine Longre ou chez Citrouille et son forum [NDLR : ce lien-ci est pour le moment invalide, Citrouille ayant préféré déconnecté son forum où les échanges s’étaient envenimés…], mais désormais je les lis en me retenant de participer (et pourtant, je suis parfois indigné !) ; et en ce qui concerne mes apparitions physiques : ma dernière prestation de la saison aura lieu ce samedi 21 juin, 18h, à Grignan, et ensuite basta, plus rien jusqu’à l’automne. Je vais disparaître un peu, et si tout va bien j’écrirai. Ou même si tout ne va pas bien. Over and off.

3) L’actualité éditoriale : c’est vrai, au fait, « Le fond du tiroir » est, faute de terme plus adéquat, un « éditeur ». Une structure est née, à seule fin de bricoler des livres désintéressés et intéressants. Un premier livre est paru. Tiré à 260 exemplaires, vendu à ce jour à 84 (il en reste 176, mesdames et messieurs !). Etant donné le prix de revient calculé d’après mes frais d’impression et de graphiste, je récupèrerai ma mise, et par conséquent serai en mesure de programmer une autre publication, lorsque j’en aurai vendu 230 : il me restera alors les 30 derniers pour faire du bénef (parce que je suis un vrai biznessman)… Sauf que ce sera moins de 30, finalement, parce que j’en ai donné quelques uns…

Cet opus vit sa vie et engendre des effets à sa mesure, qui est toute petite. Une conséquence notable, toutefois : c’est fou le nombre de gens qui viennent me raconter leurs rêves (de même qu’à l’époque de TS, ils venaient me raconter leur dictionnaire). J’aime beaucoup ça. Certains même m’avouent qu’ils ne se souvenaient jamais de leurs rêves avant d’avoir lu l’Echoppe, ce qui est trop flatteur pour ne pas être suspect. Si je n’avais que ça à faire, je construirais un blog sur le champ où tout un chacun serait invité à écrire son rêve de la nuit dernière (l’idée me paraît tellement bonne que je suis certain que cela existe déjà…).

L’Echoppe est née de cinq conditions propices : le soin, la joie, la liberté, la grâce (au sens de « gratis ») et plus que tout une déterminante complicité avec le Factotum de première classe du FdT, j’ai nommé Patrick Villecourt. Patrick s’est dépassé sur ce bouquin sui generis à la mine gracieuse, mystérieux, homogène et pourtant fourmillant. Je le lui ai déjà dit en privé, mais je le répète devant tout le monde (ça va ? tout le monde est là ? serrez-vous, au fond) : merci, vieux. Nous avons bien travaillé sur cette Echoppe, MAIS ! MAIS ! MAIS ! on va faire encore mieux la prochaine fois. Parlons peu mais parlons bien, parlons de littérature, et d’avenir : voici le programme de publication 2008-2009 du FdT.

L’Echoppe ne sera jamais réimprimée, quelle que soit la durée nécessaire à l’épuisement du stock. Le caractère évanescent de ce volume fugitif comme une volute participe de la beauté du geste.

– Le deuxième livre à paraître devrait s’intituler Le plus beau pays. Il s’agit d’un projet ancien, ressuscité sur le tard, parce que très beau tout compte fait : bref, le profil idéal pour surgir miraculeux, miraculé, estampillé « Fond du tiroir ». C’est un album pour enfants, dans un format cinémascope et en quadri s’il vous plait. On rêve tout haut, on l’imagine, on ne se refuse rien, on ne vous dit que ça… Le texte est provisoirement-définitivement achevé, mais en revanche Patrick a une masse de boulot à accomplir sur les illustrations, encore plus conséquente que pour l’Echoppe. Donc on peut annoncer sa sortie pour l’hiver prochain, mais seulement pour pouvoir la retarder quand on sera parvenu là.

– Le troisième livre serait La légende du monde. Pour celui-ci, c’est surtout à moi qu’il appartient de turbiner (quoique la mise en page, à nouveau confiée à l’indispensable Factotum, sera croquignolette). Il s’agit de mon projet en alexandrins, ma saga du quotidien, mon chantier à la fois le plus sublime et le plus dérisoire. Lui aussi, il ne pourrait trouver place nulle part ailleurs qu’au Fond du tiroir. J’en ai écrit environ 15%, par conséquent son achèvement n’est pas envisageable avant 2009.

– Je ne voulais éditer au Fond du tiroir que les manuscrits au fond de MON tiroir… Sauf si je trouvais un manuscrit meilleur que les miens. Or, je crois que j’en tiens un. J’ai sous le coude un excellent texte, et encore, excellent dans une version inachevée. Son auteur est prévenu : voilà un roman que j’aimerais éditer ; mais le choix lui appartient : soit il a pour son texte de grandes ambitions, et il le propose à Galligrasseuil, soit il adhère à la démarche FdT (Soin, joie, liberté, grâce et complicité : maison de qualité, fondée en 2008), et il recherche exclusivement l’élégance et la perfection du geste, pour une distribution éthérée et underground. Ceci dit, j’apprends, je progresse, je corrige, pour ce livre-ci je ne ferai pas comme pour l’Echoppe : je ferai un tirage suffisant pour pouvoir dégager une marge adéquate permettant un dépôt en librairie. (Je rappelle que l’Echoppe n’est pas vendue en librairie pour une raison simple : la marge des libraires, environ 30%, m’obligerait à leur vendre ce livre moins cher que ce qu’il m’a coûté).

– Entre temps (mais quand ?) le FdT sera, je le suppose, devenu une association pour accéder à un statut juridique et financier. Plus ça va, plus ça ressemblera à un vrai éditeur. Dingue, non ?

– Reste le cas, sensible, d’un de mes livres publié ailleurs, et épuisé. Je suis très indécis. Savoir ce livre indisponible me brise le coeur et les couilles (excusez mon français). Je ne crois pas que le FdT soit l’éditeur qui convienne à ce livre, qui mériterait une vraie distribution, mais peut-être que je pourrais au moins faire un tirage d’appoint, une grosse poignée d’exemplaires en attendant qu’il trouve un vrai éditeur, afin de vivoter en attendant. Quoiqu’il en soit je ne ferai rien sans l’avis du co-auteur, et bien sûr de l’actuel détenteur des droits.

Voilà ! Toutes ces ambitions doivent être nuancées par les finances. Contrairement à certains éditeurs intrépides et torpillés, je ne veux en aucun cas (EN, AUCUN, CAS) dépenser de l’argent que je n’ai pas. Or, sur ce splendide planning, je n’ai, en l’état actuel, les moyens de financer que la moitié d’un seul livre (Le plus beau pays, a priori). Pour les suivants, il faudra attendre que de l’argent rentre, afin de le faire sortir.

Par ailleurs, j’ai des projets pour d’autres éditeurs, bien sûr. Jean II le Bon, et peut-être L’arbre et le bâton pour Magnier, et, à plus court terme, le bref 1969 pour Pré carré.

Et pendant ce temps, la planète se réchauffe, le moral s’effondre, etc.

Echoppe bonus

06/06/2008 4 commentaires

L’Echoppe enténébrée (70 exemplaires écoulés sur un tirage de 260) comprend vingt-six articles. En voici un vingt-septième, déballé dans l’arrière-boutique.

Rêve de la reformation des Beatles

Vendredi 22 février 2008

Je me trouve dans un centre de vacances en été, comme quand je faisais des colos. Une réunion se prépare, préparation ou débriefing des animations en cours, et je suis tenu d’y assister. Nous nous retrouvons dans une sorte de salle des fêtes un peu délabrée, un peu miteuse, qui ressemble à la salle polyvalente des Saillants du Gua, dans une lumière très crue. Le but de cette réunion est la reformation des Beatles. Un cercle de chaise en plastique a été aménagé, nous nous asseyons, tout le monde est en short, en T-shirt, en sandales, il fait très chaud. Je remarque la présence des deux Beatles survivants, George Harisson et Ringo Starr [dans la réalité les deux survivants ne sont pas tout à fait ceux-là], qui sont là pour recruter les deux nouveaux membres. Je surprends des conversations, et j’apprends que je suis pressenti pour tenir la batterie dans la nouvelle formation. Je suis très embêté, parce que je n’ai jamais joué de batterie de ma vie, mais faire partie des Beatles, c’est quand même une sacrée occasion, ce serait dommage de louper ça, ça ne se refuse pas. J’échafaude des stratégies, je peux toujours leur dire oui maintenant, et ensuite proposer de jouer du tuba à la place de la batterie. Nous faisons un tour de table (il n’y a pas de table). Quand arrive mon tour, je me présente, « Fabrice Vigne, je suis né en 1969 »… Là-dessus Harisson sourit et glisse à l’oreille de son collègue : « Ah, 1969 ! Tu te souviens ? Nous étions en Inde. » Je suis très impressionné, mais je suis apparemment le seul dans l’assistance. Peut-être que toutes les personnes présentes dans cette salle des fêtes étaient elles aussi en Inde en 1969 ?

Soudain, je trouve saugrenu qu’on me propose la batterie alors que Ringo Starr est vivant, et même assis juste à côté de moi. Il semble deviner mes pensées et me donne une tape amicale sur l’épaule en me disant : « T’inquiète pas, tout va bien se passer ». Qu’est-ce qu’il est sympa, ce Ringo Starr. J’espère qu’il va me donner quelques tuyaux, pour la batterie. Je vais essayer de m’asseoir à côté de lui à la cantine.

Je me réveille.

Dreamcatcher

23/05/2008 2 commentaires

J’aime ce qui ne fut jamais. Odilon Redon

Les rêves sont des souvenirs. On y revient, on les ré-examine. On croit qu’ils ont changé, mais c’est peut-être nous.

Je dois aux dernières secondes d’un rêve (c’était en 1997) la phrase suivante, que j’énonçais avec courroux, semble-t-il pour mettre fin à une difficile controverse : « Oh tu sais, on ne pèse jamais que quelques grammes de plus que son inconscient ». Sitôt réveillé, je me suis jeté sur un stylo pour l’écrire. De temps en temps, je retombe sur ce bout de papier. Je ne sais toujours pas ce que ça veut dire mais c’est presque aussi joli que « nous sommes faits de l’étoffe de nos rêves » de Shakespeare.

Il est possible que mon plus vieux souvenir soit un rêve. Quel est l’âge du plus vieux souvenir ? Trois, quatre ans ? Une nuit, vers trois ou quatre ans, je me trouve dans une grande salle blanche où les seuls meubles sont des chaises, disposées en rangées erratiques mais toutes tournées vers le même mur, certaines occupées par des dames bien mises, bien habillées, jambes croisées, d’autres restées vides. Comme j’ai trois ou quatre ans, mon regard est à la hauteur de l’assise des chaises. Je cherche ma maman. J’ai peur de ne pas la reconnaître, parce que toutes les dames assises sur les chaises ont le regard fixe, aucune ne baissera les yeux vers moi, elles regardent comme hypnotisées le mur du fond où se déploie un écran géant. Sur cet écran : le visage souriant, et fixe également, d’une dame brune surmontée d’un chignon. Cette dame me terrorise. Personne ne l’a dit, mais il est question d’une boisson empoisonnée. Les dames assises ne bougent toujours pas. Je crains de ne jamais revoir ma maman. Je me cache sous la chaise la plus proche de moi, je n’ai pas vérifié si elle est occupée ou non.

L’Echoppe enténébrée, recueil de mes rêves, donc de mes souvenirs, est désormais en vente libre, quoique souterraine.

Pour ne pas se tromper devant le présentoir ?… Le dessus du panier, c’est le Fond du tiroir !

15/05/2008 4 commentaires

Qu’est-ce que L’Echoppe enténébrée (en vente nulle part dès le mardi 20 mai) ?

Ma fille me demande: « C’est quoi, ton nouveau livre ? Un roman ?
– Non.
– Alors, c’est un documentaire. »

Elle a raison. Je documente, je rends compte, je témoigne à ma mesure des étrangetés de la nuit.

Je prends les rêves au sérieux. Pas de façon surnaturelle – je n’y cherche ni prémonition (puisque l’avenir n’existe pas), ni portail sur l’au-delà (je n’ai pas cet orgueil-là), ni universelle « clef des songes multi-usages » genre couteau suisse (puisque le sens est fermé de l’intérieur). J’y trouve simplement une matière plus riche et plus complexe, plus drôle ou plus terrifiante, plus émouvante et tellement plus étrange que certaines journées passées en plein soleil.

Je me souviens d’avoir lu un article (je crois qu’il émanait d’une université canadienne) qui affirmait avoir percé le mystère, avoir trouvé le sens du rêve, sa fonction immémoriale et primitive : combiner des éléments du réel afin d’en présenter au rêveur une formule possible, ceci afin qu’il se prépare à l’affronter si jamais elle survenait de jour. Combiner : imaginer, en somme. Ni plus, ni moins. (Par extension, cette stimulante approche pourrait être appliquée au cinéma, dont on sait depuis Cocteau qu’il est « le moyen de faire rêver le même rêve à plusieurs personnes en même temps » : effectivement, d’innombrables films m’ont préparé à d’innombrables situations, c’est un autre sujet… Sur lequel on peut voir avec profit le court métrage Just like the movies de Michal Kosakowski, qui démontre de façon époustouflante comment Hollywood s’était préparé depuis des années au 11 septembre 2001 à New York.)

L’homme des cavernes rêva peut-être d’un mammouth se ruant sur lui dans la plaine. Ce faisant, il n’avait inventé ni le mammouth ni la plaine, mais avait placé mentalement l’un sur l’autre parce que cette situation était après tout possible, et qu’il était utile de la visualiser les yeux fermés afin de ne pas être pris au dépourvu le jour venu. Tant pis si l’hypothèse est prosaïque, elle est intéressante parce qu’elle rappelle que le champ des possibles n’a rien de rationnel – il est émotionnel. Ce à quoi nous préparent les rêves (et les films), ce n’est pas tant les événements que les émotions. Un mammouth, ça fout les jetons. Je m’en souviendrai, le jour où quelque chose, un mammouth ou n’importe quoi, se ruera sur moi. De là à dire que ça me servira de leçon…

Mais depuis quand tirons-nous des leçons des documentaires ? Si c’était le cas, la paix règnerait sur la terre.

CQFD, nous voilà fixés sur la nature de L’Echoppe enténébrée (en vente nulle part dès le mardi 20 mai).

Post-scriptum quatre ans et demi plus tard : c’est curieux, cette histoire de chasse au mammouth a ressurgi tel un rêve prémonitoire dans le livre Double tranchant, sorti le 15 octobre 2012, et à son tour en vente à peu près nulle part, puisque la tradition s’est pérennisée… Ci-dessous le bon de souscription :

J -12

08/05/2008 Aucun commentaire

L’autre jour je discutais avec CLV (connue ailleurs sous le nom de Corinne Lovera-Vitali) des retards en cascade, finition et impression, de mon livre auto-produit.

Moi : « Eh ben, c’est difficile, finalement, faire un livre. Le métier d’éditeur qui rentre. C’est décidé, je ne dirai plus jamais de mal d’aucun de mes éditeurs. »

Elle : « Ah non ! Il faut continuer coûte que coûte à dire du mal de nos éditeurs ! c’est important ! »

Elle et moi : rires !

Bref. La dream team du Fond du tiroir (alias Patrick Villecourt au grand complet) vient de me donner une date de sortie à peu près ferme pour L’Echoppe. Mardi 20 mai. Après quelques hésitations, l’imprimeur retenu est celui de Pont-de-Claix et, coïncidence : l’homme sur la machine sera l’imprimeur qui autrefois officiait à Sassenage et accoucha sous son propre nom deux autres de mes livres, les Messages et la Mèche.

Je tâcherai d’être muni d’un carton d’Echoppes lors de ma journée à Lyon ce même 20 mai. En attendant, rien de plus à montrer hélas que le logo à tiroir ci-dessus.

… ce beau logo que j’exhibe depuis un mois et qui m’a valu des remarques enthousiastes telles que : « Ah oui, pas mal, mais pourquoi c’est un plagiat de celui de Thierry Magnier ? », ou bien « Ah oui, pas mal, mais pourquoi c’est un calque de celui de Thierry Magnier ? », voire « Ah non, pas terrible, et en plus c’est une parodie de Thierry Magnier. »

Zut alors, les gens se font des idées, la malice dans l’oeil… Si j’affirme que la ressemblance ne m’avait même pas effleuré (et Patrick encore moins, tu penses, pour ce qu’il en connaît de Magnier), on ne me croira pas… Il n’existe pourtant pas qu’un seul logo qui vole, à la fin ! Ange, vole ! Tiroir, vole ! Livre, vole ! Mais moi je ne suis pas un voleur. (Et en plus j’ai pris des bonnes résolutions : je reste en bons termes avec mes éditeurs…)