Au secours, je me abricot !
Je me souviens d’avoir vu Charlie Schlingo, un jour, au festival d’Angoulême. De loin. Il était debout à côté d’un stand, derrière sa moustache, sur ses deux jambes et sa béquille. Il était seul et immobile, avait l’air de se faire chier, ou de cuver. Je n’ai pas osé m’approcher et lui dire « Bonjour monsieur, vous êtes un génie. » Si c’est pour m’entendre rétorquer « Et toi tu es une pomme de terre » merci bien.
Charlie Schlingo faisait peur à beaucoup de gens. Voilà une phrase que l’on peut lire, parmi des centaines d’autres débutant toutes par Charlie Schlingo (principe oulipien du texte à démarreur), dans Charlie Schlingo, de Joko, paru dans la collection Patte de mouche de l’Association.
Je l’ai lu en riant aux éclats, puis aux larmes, puis aux éclats de nouveau. Je ne l’ai trouvé que trop court, ce recueil de souvenirs en flashes de l’ineffable Charlie, j’en aurais bien voulu encore. J’incline à penser que nous n’aurons jamais trop de Schlingo, irremplaçable poète punk, « minable » , « connard » , et j’emploie ces termes avec une infinie tendresse.
L’existence même de Charlie Schlingo, si improbable et brève (1955-2005) qu’elle soit, nous console de celles de tant de malfaisants qui travaillent à faire du monde un endroit pénible, Poutine, Trump, Abdeslam, Jérôme Cahuzac, Carlos Ghosn… Schlingo sauve, Schlingo rachète l’humanité en perdition ! Saucisse et pomme de terre !
Heureusement que l’on peut retrouver à volonté les larmes et les éclats, les saucisses et les pommes de terre, il suffit de relire les livres de Schlingo, d’écouter ses CD, ou de se procurer les récits dont il est le héros, celui-ci de Joko, Je voudrais me suicider mais j’ai pas le temps de Teulé et Cestac, ou Charlie Schlingo Charlie Schlingall écrit par sa « veuve » Christine Taunay, cf. cette archive 2020 au Fond du Tiroir.
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