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Arrigo Beyle, Milanese

18/05/2015 Aucun commentaire

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Je marche dans les rues de Milan pour la première fois, et je ne me lasse pas de ce délice toujours réinventé : arpenter nez en l’air une ville inconnue. En plus, là, c’est l’Italie. Soit le plus beau pays du monde. Le seul dont j’ai envie même quand j’en reviens, celui qui est bon pour la santé. Je présume que vivre en Italie doit fatalement rendre meilleur. Mais comme je ne comprends pas tout, je n’ai pas d’explication au fait que périodiquement ce pays engendre des connards comme Berlusconi ou Mussolini ou paparazzi ou tifosi.

Or les rues de Milan sont merveilleuses, pleines d’histoires et de géographies, de luxe calme et voluptés en pack, de surprises aussi (mate un peu cette bizarre tour rétro-futuriste), à la fois très italiennes (façades, fenêtres, arcades, couleurs jaune et rouge, lignes et volumes) et cependant un peu suisses (l’esprit de sérieux prévaut davantage que dans le Sud de la Botte, l’utilitaire, l’argent aussi, la réussite économique, Milan est une grande bourgeoise).

Parmi quelques autres splendeurs, je m’ébaubis devant la dernière oeuvre de Michelange, une pietà inachevée, très différente de celle si vigoureuse qu’il sculpta cinquante ans plus tôt et qu’on peut voir à Saint-Pierre de Rome. Je souffre sans doute du « syndrome de Stendhal » puisque face à elle je faiblis, je m’assois, je chiale doucement, saisi. Que Jésus soit Dieu me paraît louche ; que sa maman soit vierge me la baille belle… Mais qu’une mère pleure son grand garçon mort assassiné par la haine, voilà qui me bouleverse. Cela, « j’y crois » – comment ne pas y croire, on le voit tous les jours.

En redescendant du château des Sforza qui abrite ce marbre, dans une rue piétonne et bondée un barbu tout sourire m’aborde, en djellaba. Il tient à me présenter « la sola vera religione, quella di Allah » et me glisse entre les mains une brochure à ce sujet. Je le remercie et empoche la brochure. Je la lis dans le métro. C’est étonnant : dans le ton (doucereux) comme dans le graphisme (kitchounet) on jurerait la propagande des témoins de Jéhovah, j’ignorais que les musulmans pratiquaient le même type de retape.

Je sors du métro, je monte l’escalier et c’est comme si la ligne de fuite vers le ciel n’en finissait plus : la vision du Duomo me coupe le souffle. Quel miracle. Je me souviens que j’apprenais l’italien au collège dans une méthode intitulée Piazza Duomo, où un certain Gigi et son copain Bruno draguaient les filles en Vespa place du Dôme à Milan et, franchement, le décor est encore plus époustouflant que dans mon souvenir : en vrai c’est mieux dessiné (toutefois, respect à l’illustrateur Daniel Billon, qui n’a pas enluminé que des méthodes d’italien, il a également illustré bien des volumes de la Bibliothèque Verte que je dévorais, Bennett etc., et puis il a collaboré avec Forest sur Barbarella mais là, à part du point de vue des sonorités, on s’éloigne trop de l’Italie).

La splendeur de cette cathédrale me plonge dans la mélancolie. Je me dis que la foi, quand elle décide de construire au lieu de détruire, est une bien belle chose. Pourtant, ni création ni destruction ne prouveront jamais l’existence ou la non-existance de Dieu… Seulement celle de l’homme, éternellement génial et dégueulasse… Méditant sur les six siècles nécessaires pour achever ce Duomo, et tout en observant les ouvriers qui continuent de travailler sur son toit, je ne peux m’empêcher de penser que Daesh, avec des masses adéquates, des bazookas et quelques bâtons de dynamite, pourrait en avoir raison en deux jours, drôles d’idées, hein, mais qu’y puis-je.

Nous regardons la queue devant le portail d’entrée. Des femmes se font refouler parce que leurs épaules sont nues, incontestable insulte à Dieu. Cela nous fournit, à ma fille et moi, assis au soleil sur la place, le prétexte d’intéressants débats théologiques : au commencement était la différence physiologique essentielle entre les hommes et les femmes, ce sont les femmes qui portent le bébé dans leur corps. Donc, une mère est toujours certaine d’être mère, tandis qu’un père gardera toujours un léger doute.

De là, l’archaïque obsession des hommes de contrôler à toute force la sexualité des femmes. Obsession qui comporte mille conséquences funestes, allant de Nique-ta-mère au Niqab, allant de l’excision (exemple jeté dans la conversation par ma fille, moi-même je ne songeais pas à cette horreur extrême) aux insultes de type « ta mère la pute » (= tu es l’enfant d’une femme à la sexualité dévoyée), allant de l’invention de maladies imaginaires (l’hystérie ou la nymphomanie, deux dérégulations du désir féminin) aux figures mythiques culpabilisatrices (Pandore chez les Grecs, Eve chez les Juifs et leurs cousins : les malheurs des hommes proviennent du désir des femmes)… en passant par l’irrationnelle importance accordée à la virginité des femmes (celle des hommes, on s’en cogne) et, en corollaire, par la prégnance du mythe de Marie Bonne-Mère (la faribole de la vierge qui accouche, dont les exemples exemples sont innombrables dans les mythologies du monde entier, telles la maman de Jésus et celle de Bouddha… une femme « pure », enceinte sans avoir péché)… et enfin, naturellement : le voile et toutes ses variantes, jusqu’à l’injonction débile de dissimuler ses épaules pour passer la porte du Duomo, parce que ton épaule, femme, choque Dieu – foutrement susceptible ce con-là.

Les culs-bénis chrétiens sont à peu près aussi neuneus que les islamistes, mais en ce moment ils sont a priori moins dangereux, moins armés. Encore que : songeons que, depuis les Manifs pour tous, les cas d’agressions homophobes ont fait un bond en France, « décomplexées » – quelle responsabilité pour les activistes cathos ?

Ce genre d’idées, qui s’associent. Je pense à présent à Cabu, abattu d’une balle dans la tête pour avoir griffonné des dessins dans le genre des deux reproduits ci-dessus (dessins semblant se répondre, pourtant réalisés à plus de dix ans d’écart, le premier constituant la une du Charlie n°434 d’octobre 2000). La mélancolie ne se dissipe pas vite, même plongée en un si beau pays.

Cloaque

12/05/2015 un commentaire

gastinel

Je lis beaucoup la presse en ligne.

Aujourd’hui, je lis la dernière chronique de Noël Mamère sur Rue89, qui dresse le bilan calamiteux des trois ans de pouvoir de Hollande. J’y vois une énumération terrible, précise et exacte. Pas de quoi se réjouir, mais au moins de quoi penser.

En revanche, dans la foulée j’ai le malheur de lire les commentaires laissés par les internautes au pied de l’article… Je suis à nouveau estomaqué par cette « République des commentaires fielleux » qui émerge sous n’importe quel papier de n’importe quel site d’info. De la haine anonyme, du mépris sectaire, de la suffisance compulsive, des objections irascibles, des raccourcis aigres, des quolibets, des « petites phrases », des « clash » des « buzz » des « tacles »… Et zéro arguments. Je crains que ces commentaires ne reflètent l’état d’esprit (inquiétant) des Français davantage que l’article de Mamère lui-même. Et dire que Rue89 a été fondé sur le projet participatif d’une mythique info à trois voix, Rédaction/Spécialistes/Internautes eux-mêmes, « qui participent à la vie de Rue89 par leur commentaires mais aussi en soumettant des articles, des liens vers d’autres sites, des photos et des vidéos »… La troisième voix pue de la gueule.

Il y a 45 ans, François Truffaut disait « Les Français ont tous deux métiers : le leur, et critique de cinéma. » Il semble que leur second métier soit devenu critique de l’actualité, commentateur acerbe du monde. Le phénomène de ces caniveaux-commentaires pré-fascistes me révulse et me fascine, je crois même qu’il me passionne (j’y fais une allusion dans l’un des chapitres Fatale Spirale, celui sur les trolls), et pas seulement parce que j’ai pu, à l’occasion, en être moi-même la cible.

Ce cloaque est digne de notre époque, il est la déclinaison accessible à chaque citoyen du modèle dominant de traitement ultra-contemporain de l’actualité : à l’heure où l’information n’a jamais été aussi abondante et accessible, on (s’)informe à coups de vacherie en 140 signes plutôt que d’enquête d’investigation, à coups de talk-shows matches-de-catch où l’infotainment prévaut (on retiendra de l’actu, pour recyclage dans le zapping ou dans les navrantes pages politiques d’Orange par exemple, que tel people a rabroué tel autre people), à coups d’avis péremptoires balancés dans la mêlée depuis on-ne-sait-où (je suis conscient que, rédigeant un blog où je me crois autorisé à exprimer des avis que personne ne m’a réclamés, je participe de ce brouhaha).

Les débordements sont sans nombre, surtout dans le cas d’une actualité elle-même conflictuelle (un exemple ici). Libération, journal par ailleurs en pleine crise d’identité (papier ou tout web ou brasserie-traiteur-salon-de-massage ?), qui s’est doté d’une charte prudente sur la modération des commentaires, a signalé que certains sites américains, confrontés comme de bien entendu à ces débordements avec une longueur d’avance sur nous, ne donnent tout simplement plus la parole à ses lecteurs. La censure 2.0 est-elle de mise ? Et pourtant, depuis le premier amendement, la liberté de parole est sacrée là-bas plus encore qu’ici…

Reste que de ces souterrains de l’autoroute de l’information je m’extirpe toujours lessivé, et démoralisé. À chaque fois, je me dis « Il ne faut plus les lire ! » Mais à l’encontre de mes résolutions je retourne tremper, bien fait pour moi, dans ces flots d’agressivité et de sarcasmes à courte vue, d’insultes, d’intolérance, de « bons mots » sidérants de violence, qui polluent systématiquement les articles d’opinion (ou même d’analyse) dans toute la presse en ligne. « L’esprit français » (la saillie voltairienne, disons), « la démocratie participative », la « liberté d’expression » pour laquelle paraît-il nous avons massivement marché le 11 janvier… sont ici tragiquement dénaturés. Au service de qui, au juste ?

Cette hargne démocratique est-elle représentative de l’opinion réelle, du Français moyen, des « idées » de mon pays ? J’espère que non, sinon nous traversons une grave crise civique ET intellectuelle… Est-elle, alors, le seul fait de « minorités agissantes » ? Voire d’officines, de mercenaires appointés ou de bénévoles militants, bossant pour le compte de quelques groupuscules extrémistes (le FN ? voire pire, les Soraliens, Dieudonnistes etc) dont le métier, semblable à celui des agences de publicité qui truffent les sites de commerce en ligne de faux avis de consommateurs, consisterait à pourrir sciemment le débat politique, à nous exciter comme à coups de banderilles ? J’envisage cela, et je me dis que je frise la paranoïa…

Moi, président ?

07/05/2015 Aucun commentaire

Le Fond du tiroir hors les murs : la chronique ci-dessous, faux dialogue remixant d’authentiques paroles échangées avec mon camarade Christophe Sacchettini, a été écrite pour la newsletter mai-juin 2015 de Mustradem. Elle n’y apparaîtra pas forcément in extenso, faute de place. Tandis que dans un tiroir, la place ne manque jamais. Retenez au moins l’actualité brûlante qui en émerge : rendez-vous à la Villeneuve de Grenoble ce samedi à partir de 11h30, pour une lecture de Fatale Spirale, texte inspiré par cet endroit même. Fête ‘n’ musique ‘n’ pique-nique, aux bons soins de l’association Sasfé.

Moi, président ?

– Président ? Président de quoi ?
– De Mustradem, pardi. Mustra, en plus d’être un collectif d’artistes, un label de musique, un éditeur, un entrepreneur de spectacles, une structure de formation, un fomenteur de bals… est une association loi 1901. Il lui faut impérativement un président.
– Elle n’en a pas déjà un ?
– Si fait, mais notre Mariette à nous, présidente historique et chérie depuis l’origine, « a fait valoir ses droits à la retraite », comme on dit dans d’autres milieux.
– Aussi sec vous me proposez le job.
– C’est ça.
– Drôle d’idée.
– Pourquoi pas ? Tu nous connais et nous te connaissons, tu nous aimes et nous t’aimons, pour autant tu n’es pas tout à fait des nôtres. Tu es compagnon de route sans être partie prenante. Tu es là mais ailleurs. On en déduit que tu es peut-être pile à la bonne place pour présider.
– Ça consiste en quoi, présider ? C’est que je ne suis pas du tout un homme de pouvoir, moi…
– Oh, t’inquiète pas pour ça, du pouvoir tu n’en auras pas beaucoup. Mais il faut que tu sois là. Que tu signes les contrats. Que tu nous représentes. Que tu nous écoutes, que tu donnes ton avis, que tu n’hésites pas à dire « Vous déconnez les gars, bande de têtes de mules, on va pas revenir là-dessus alors qu’on a réglé cette question au début du conseil d’administration il y a six heures et demie », tu vois ? Ce genre de choses. Président, quoi.
– Que je me mêle de ce qui vous regarde. Par exemple… C’est quoi, là, sur ton écran ?
– Alors justement, ça c’est le nouveau logo. Nouvelle époque, nouveau président, nouveau logo… Tu en penses quelque chose ? On ne l’a pas encore validé.
– Tant mieux. Il est joli ce logo, hein… Mais il ne m’emballe pas. Il est trop régulier, trop symétrique, trop fermé. Je n’entends pas votre musique quand je le regarde. Votre musique ? Tout le contraire, ouverte, irrégulière, asymétrique, pleine de cinq-temps et sept-temps et tempi plus excentriques encore, elle retombe sur ses deux pieds mais entre temps le gauche comme le droit ont dansé dans l’air de drôles de circonvolutions. Ce logo, il est tout raide, assis, couché, il ne danse pas.
– Parfait. On consigne que tu n’es pas fou du nouveau logo.
– Ah ? Et… Vous allez tenir compte de mon avis ?
– Si on a le même que toi, sans hésiter.
– Je commence à comprendre la fonction présidentielle.
– Tu vois, c’est facile.
– Votre musique irrégulière et asymétrique, je l’aime, et plus encore. Mais mon vrai domaine, ma prédilection, ce sont les paroles plutôt que les musiques, si tu vois ce que je veux dire, les mots. Du reste, « Musique Traditionnelle de Demain »…. Voilà trois mots superbes. Et leur juxtaposition, alors là, chapeau. Un peu comme parapluie plus machine à coudre plus table de dissection, d’un seul coup l’image parle, la poésie toute crue. Des années que je l’admire, votre paradoxe temporel, votre inactuel oxymore.
– Inactuel oxymore, comme tu y vas. On consigne aussi. On verra si on valide.
– Moi, ce que je sais faire, ce sont des livres. Tiens, une idée me vient, vous ne voudriez pas en faire un ? De livre ? Sur Mustradem ? Là, au moins, je pourrais me rendre utile.
– Heu… Pourquoi pas… Ce n’est pas vraiment la priorité…
– Attends ! Je le vois d’ici, ce serait un livre fabuleux … Mustra, ça date de quand ? Vingt-cinq ans, non ? Un chiffre rond en plus, occasion idéale ! « Mustradem 1990-2015, le premier quart de siècle », un livre-CD s’impose, regorgeant de photos, de souvenirs, d’interviews… De partitions… Non ?
– Hmmm… On y réfléchira. Quand tu seras président. On n’est pas tellement dans l’auto-célébration, tu sais.
– Ouais. Ben, pas assez, peut-être. Parce que si l’on regarde… Ce n’est pas rien, ce que vous avez accompli. Vous êtes des héros de la culture de niche. Avec Mustradem vous avez bâti une Œuvre collective, en sus de chacune de vos petites œuvres singulières. Une grande œuvre qui dure, qui palpite. Qui fait des petits. Non seulement avez-vous pratiqué votre art, ce beau mélange tradition/demain… Mais surtout vous n’avez attendu personne pour vous expliquer comment vous deviez jouer votre musique, ni un marchand de disques, ni un directeur de salles, ni quelque relai médiatique complaisant, ni un président… Vous avez puisé aux sources de la musique qui vous inspirait, vous vous l’êtes appropriée, puis vous avez conçu vous-mêmes les conditions pour la jouer et la diffuser. Vous l’avez réinventée sans relâche, remise en jeu, et toujours par vos propres moyens. La fière indépendance du « Do-It-Yourself ». Au fond, je vous soupçonne d’être un peu punks, pour des folkeux. En plus d’être vaguement jazzmen sur les bords.
– Alors, c’est oui ?
– Êtes-vous vraiment des folkeux, d’ailleurs ? J’ai tenté plusieurs fois de comprendre la différence entre « folk » et « trad », j’ai posé la question à la cantonade… Je n’ai obtenu qu’une seule réponse cohérente : « Ben c’est évident, y’a ceux qui jouent bien et ceux qui jouent mal », sauf que, c’est ballot, j’ai oublié lesquels qui quoi.
– C’est plus compliqué que ça.
– Je m’en doutais un peu.
– Il y a des forums exprès, si tu veux creuser la question. Alors, c’est oui ?
– Je reconnais que c’est tentant. Je vous ai vus tout petits ! Je vous ai vus grandir, comme on dit aux gamins qui font une tête de plus que nous. Je me souviens d’un des premiers concerts de Dédale, le tout premier si ça se trouve, dans une MJC approximative, en Savoie, c’était en… Je ne sais plus, Mustra n’existait même pas, pour te dire. Vous aviez encore de l’acné, ou alors je confonds, c’était moi, mais déjà ce qui se passait sur scène c’était vachement bien ! J’y étais, moi, monsieur ! J’y étais !
– J’y étais aussi. Mais ce n’est pas ça qui compte, on n’est pas trop dans la nostalgie, non plus.
– Pas plus que dans l’auto-célébration, j’ai compris le message. En tout cas c’était bien… Et dire que vous êtes tous encore là… Quand est-ce que vous reformez Dédale, au fait ? Allez, je suis sûr que vous l’entendez souvent, cette question. TOUS les groupes le font. Regarde autour de toi, Téléphone, les Sex Pistols, les Stooges, Pink Floyd, Police, NTM, les Monty Python…
– Qu’est-ce que tu racontes ? On n’a rien à voir avec ces vieilles stars qui remontent sur scène pour l’argent. Nous, on n’en est jamais descendus, de la scène, avec ou sans Dédale.
– Ah, ouais. Okay. Je récapitule, si tu veux bien. Votre truc, c’est : ni l‘auto-célébration, ni la nostalgie, ni l’argent. Je prends des notes, hein, pour le cas où quelqu’un me demande ce que je préside, au juste.
– On n’auto-célèbre pas notre nostalgie, pour une bonne raison : l’agenda des deux mois à venir est rempli à ras-bord, et le présent est par principe plus passionnant que le passé !
– Formule suffisante pour expliquer le bel oxymore…
– D’ailleurs, tu y es toi aussi, sur l’agenda… Une lecture déambulatoire à la Villeneuve de Grenoble, samedi 9 mai… Ce ne serait pas sur un texte de toi, ça ?
– Si, si… Tu as raison, allons de l’avant. Je serai là, promis, le 9 mai.
– Moi aussi, tu parles. Ah, et tant que je te tiens ! Tu ne voudrais pas écrire à ma place l’édito de la prochaine newsletter ?
– Une autre prérogative présidentielle, je suppose ? Riche idée… Me faire éditorialiste d’un jour, chroniqueur remplaçant, juste assez intérimaire pour me mettre dans la peau d’un intermittent (hu hu hu)… D’un autre côté, la tâche m’intimide presque, je ne sais pas si j’ai les compétences. Moi qui distingue à peine folk et trad ! Et puis, les lecteurs seront perturbés dans leurs habitudes : je ne suis pas capable de citer au débotté Jean-Luc Godard ni Alain Robbe-Grillet.
– Tu trouveras bien quelque chose.
– Du Frank Zappa, j’ai droit ? En voilà un autre, qui jouait sa musique en se contrefichant de l’étiquette qu’on collait dessus. « L’information ne vaut pas le savoir. Le savoir ne vaut pas la sagesse. La sagesse ne vaut pas la vérité. La vérité ne vaut pas la beauté. La beauté ne vaut pas l’amour. L’amour ne vaut pas la musique. Rien ne vaut la musique. » Pas mal, non ? Mais on cause, on cause… Tu crois que les lecteurs le lisent jusqu’au bout, cet édito ?
– Il y en a. Alors, c’est oui ?
– Oui.