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Ne pas désespérer bille-en-tête (Troyes épisode 91)

Rêvé cette nuit : je courais un marathon, lesté d’un hélicon en bandoulière. Essayez, vous verrez comme c’est commode. Il y a là l’influence de la corrida de Noël de Troyes que j’ai vue, pantois, traverser les rues en courant la semaine dernière… Pour le reste, comprend qui peut.

Tic, tac, tic, tac, le ginkgo n’a plus de feuilles et la fin de ma résidence approche comme un platane vu depuis un accident de la route. Je commence à me faire à l’idée, pourtant cousue de fil blanc, que je partirai avant d’avoir terminé tout ce que j’ai entrepris. Les yeux plus gros que le coeur. Avancer coûte que coûte, ne pas se retourner. J’ai un certain nombre de pages derrière moi, elles ne suffisent pas, j’en ai davantage devant. Si je regarde ce qui est fait, je me dis que rien n’est fait. Tout reste à faire tout l’temps.

Pier Paolo Pasolini expliquait la recherche picturale dont témoignent ses films par sa passion première : la peinture de la renaissance. Il vouait une grande admiration à Giotto, et s’était réservé dans le Décaméron (1971) un rôle mince mais capital, celui d’un peintre, élève du maître toscan. Le peintre incarné par Pasolini sert de fil rouge à ce film à sketches : entre chaque conte, on le retrouve dans son chantier, au fond d’une église, juché sur l’échafaudage. Concentré, minutieux, intense, il avance couleur après couleur dans l’accomplissement de sa fresque. L’épilogue du film dévoile le chef d’oeuvre enfin terminé : les artisans rient, les peintres se congratulent, les moines sonnent les cloches, tous font la fête, à votre santé ! Seul le maître d’oeuvre, Pasolini en personne, reste perdu dans ses pensées, étranger à la joie, perplexe face à ce qui n’est finalement qu’un mur peint, a fresco, mais un mur quand même. Il murmure « À quoi bon réaliser une oeuvre, quand il est si beau de de la rêver » , brutale dernière phrase du film. FINE.

Encore une histoire mélancolique et édifiante, dédiée à Yann G.

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