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Introduire/Fold (Troyes épisode 86)

Hier, prenant patience dans la queue du bureau de poste pour réceptionner une bouteille d’huile qui n’entrait pas dans ma boîte aux lettres, j’ai entendu le postier poser cette très intéressante question à l’usager qui me précédait : « Cela n’a aucune valeur ? Ce ne sont que des écrits ? » On est bien peu de chose. J’ai attendu mon tour, et je suis reparti avec mon litre d’huile sans faire d’histoires.

Parmi les écrits sans valeur dont il m’a été donné de me nourrir par le passé, Le Pékinois de Jacques Perry-Salkow, délicieux recueil d’anagrammes (Albert Einstein = Rien n’est établiClaude Levi-Strauss = A des avis culturels ; Roméo Montaigu/Juliette Capulet = J’aime trop ta gueule/Et moi, ton cul ; Robert Doisneau = D’où notre baiser, etc.) Ainsi que le Discours sur l’origine de l’univers d’Etienne Klein, captivante méditation vulgarisatrice.

Je me supposais un goût fort original, pour enchaîner deux lectures aussi disparates… Mais voilà que ces deux auteurs, le farceur anagrammatique et le brillant physicien, sont plus originaux que moi : ils viennent de signer un livre à quatre mains, intitulé Anagrammes renversantes ou Le sens caché du monde. Ce livre étonnant jongle avec l’ordre des lettres et celui des particules élémentaires, deux sortes de quêtes, deux révélations homothétiques. On découvre pantois que percer les mystères du langage faute de ceux de l’univers, eh bien c’est drôlement mieux que rien, et, même, que c’est de la poésie. Je me réjouis très sincèrement d’apprendre que La courbure de l’espace-temps contient dans son principe Superbe spectacle de l’amour. La cohérence est miraculeuse comme de se souvenir que, puisqu’aucun atome n’a été créé depuis le big bang, nous sommes faits des mêmes poussières d’étoile que feu les dinosaures.

Comme ce livre est très stimulant, j’ai passé une heure et demie à tenter de faire surgir le sens anagrammatique caché du Fond du Tiroir – oui, une heure et demie d’anagrammes, je présente mes excuses à ceux qui peut-être s’imaginaient que je consacrais toutes mes heures de veille à forger des chefs-d’oeuvre (je ne crois plus aux chefs-d’oeuvre depuis que je connais l’avis du facteur). Et voici le résultat de mes recherches non subventionnées par le CNRS :

Le Fond du Tiroir = Introduire/Fold

Qu’est-ce à dire ? Introduire et fold, deux mots qui semblent sortir d’une partie de poker et qui pourraient se traduire par : lancer la partie, puis se coucher. Ouvrir puis fermer. S’engager puis se retirer (je préciserais bien ‘rien de sexuel’ mais mon déni serait suspect). Entreprendre, puis renoncer. Commencer, et ne pas terminer. Hum… Pas un très bon présage. C’est tout des conneries finalement ces histoires d’anagrammes.

Ça suffit. Bonne nuit. Je me couche.

(Londonomètre : 2)

  1. anagrammeur
    07/12/2011 à 20:07 | #1

    « dore un droit-fil » pour tisser une belle histoire …

  2. 07/12/2011 à 20:12 | #2

    Ah comme c’est beau ! Bien meilleur que ma solution ! Je n’avais pas lancé de concours, mais vous l’avez tout de même remporté : donnez-moi votre adresse, je vous envoie un livre.

  3. Muriel L
    07/12/2011 à 23:05 | #3

    Autre idée : « dire loin du fort »…
    Tout un programme !

  4. zorglub
    07/12/2011 à 23:49 | #4

    puisque phrase est phares et harpes…en sonorités éclairées le fond du tiroir devient « dore un droit-fil » car « dorure dit filon » … Le présage apparait tout de suite plus favorable … ;-D

    quand bien même le londonomètre de ce jour est de 2, histoire s’épanouit au fil d’âme affûtée …

    Bien à vous

  5. Vincent Karle
    09/12/2011 à 13:25 | #5

    Sans oublier l’auteur, -ce gar(s) bien vif- (ça tombe bien, en plus, il y habite – aux 2).
    Ahh, je fréquente également (quoique de loin en loin) cette chère Anna Graham, cette magicienne du verbe, qui par l’alchimie du mot me révélait un soir, après plusieurs Guinness au pub James Joyce, que Lewis D. Carol n’était autre que Oscar L. Wilde…
    Vincent

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