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Articles taggués ‘Le Fond du Tiroir’

Culture de masse

01/03/2009 2 commentaires

fonciforme

Patrick Villecourt, facétieux et perspicace homme de main du Fond du Tiroir, n’a pas que des qualités : il lit aussi Télérama. Du moins, chaque mercredi, il remplit consciencieusement la grille de mots croisés de cette auguste revue de télé-, comme son nom l’indique, mais aussi de culture (c’est la partie –rama). Or voilà que tout soudain Patrick me tonitrue : « Télérama parle de nous ! Vise un peu les mots croisés de cette semaine ! » Et de m’envoyer l’irréfutable montage ci-dessus (vous pouvez cliquer pour l’agrandir).

Effectivement. Nous sommes sauvés ! Si le FdT a enfin pénétré les pages cet officiel bulletin de la culture comme-il-faut, alors sa fortune est faite ! Le Tiroir ailé a achevé son destin, il a pénétré le goût dominant ! Mieux : il est le goût dominant ! Merci Télérama ! Fort de cette heureuse nouvelle, nous allons nous consacrer sereinement à la fabrication de notre quatrième « livre », qui sera tiré à bon marché quoiqu’à 1000 exemplaires (à peu près autant que les trois premiers réunis), et dont le bon de souscription mesdames et messieurs pourrait être disponible dès la semaine prochaine.

Ah oui, on ne traîne pas, on ne fait pas que des mots croisés, le quatrième est pratiquement prêt (mais c’est le dernier avant longtemps – ensuite plus rien d’ici l’automne, au moins)… Que voulez-vous savoir sur ce livre ? Son ISBN ? Vous êtes bien curieux ! Bon, d’accord, mais c’est bien parce que c’est vous : 978-2-9531876-3-2. Ne le répétez pas à n’importe qui.

(Pour de vrai, et pour l’anecdote, sans vouloir me hausser du col ni la ramener avec mon bouc, j’ai déjà été cité une fois dans Télérama, qui m’a qualifié de « sociologue » dans son n°2794 de juillet 2003, à propos d’un article que j’avais publié en revue : « Dans « Une Iliade ou une Odyssée ? Le voyage et son double », très belle étude qui nous a donné l’envie de savoir ce que voyage veut encore dire, le sociologue Fabrice Vigne laisse à son lecteur le soin de conclure etc…« , alors hein, c’est dire si je suis autorisé à en causer, de la culture de masse. Mais je vous laisse le soin de conclure.)

Quoi d’autre ? Ah, oui : en attendant l’avènement du prochain livre, vous pouvez vous occuper en lisant l’instructif échange qui vient d’avoir lieu sous un précédent article : ça barde, au Fond du tiroir. Je suis tricard en Tricastin, et plutôt triste, je l’avoue… Cherchez pas plus loin, c’est pour ça que je fais le clown…

« Du pain et des jeux ! » (Juvénal, 45? – 128?)

22/02/2009 2 commentaires

stylo habile

Hé… Psst… Vous cherchez quelque chose, citoyen ?

Ne prenez pas cet air innocent… Si vous vous promenez tout seul ici, c’est que vous cherchez quelque chose… Une petite diversion en temps de crise, peut-être ? Allons, citoyen, deux mots ! La recette du divertissement est connue depuis 2000 ans ! Apportez votre pain, et je fournis les jeux !

L’an dernier, j’ai quasiment inauguré ce blog en lançant à la cantonade un grand concours, avec à la clé non pas des dizaines, non pas des centaines, non pas des milliers de cadeaux, mais tenez-vous bien un seul magnifique lot à gagner ; et puis la solution a été trouvée par une perspicace lectrice dès le surlendemain.

J’ai voulu rééditer l’émulation ludique voici quelques semaines… Mais cette fois-ci, nul n’a répondu à mon grand jeu international. Je ne sais que conclure de ce silence… Personne (ni moi non plus, au fait) ne connaît la réponse à la trop difficile question que j’ai posée ? ou bien tout le monde s’en fout ? ou alors vous n’avez pas pris au sérieux le superbe lot que j’ai mis en jeu, l’authentique stylo série limitée FdT en vrai plastique et sa bille qui écrit sans bavures ni fautes d’orthographe ? vous avez jugé hâtivement qu’il n’en valait pas la peine ? Je n’ose le croire. (Cf. sur le document exclusif ci-dessus, notre suggestion de présentation : l’objet, discret, efficace, aussi pratique qu’élégant, vous sera d’un précieux secours en cas de dédicace impromptue de l’ABC Mademoiselle).

Après, il en fera ce qu’il voudra, l’heureux lauréat, de ce beau stylo… Il écrira des livres ou il cochera des cases sur un bulletin de Loto…

De ce côté-ci du Tiroir, oui, merci, on joue, on écrit. Patrick F. Villecourt et moi-même planchons sur notre quatrième expérience. Elle est très bizarre, je vous préviens, une drôle de tête en kit. Mais quand réussirons-nous à la publier ? Pas demain la veille ! Plus un sou vaillant, au fond du Tiroir ! Et vous, ça va, sinon ? Alors ? Cette crise mondiale ? Partout-partout ?

Je dis ça, je dis rien

04/02/2009 8 commentaires

Abaissez quoi, au juste ?

ABC Mademoiselle : un troisième opus jaillit orgasmatiquement du tréfonds du tiroir. C’est mon huitième livre, je dis ça, je dis rien…

Et c’est mon premier livre érotique, je dis ça, je dis rien…

Je réalise au passage que, jusqu’à présent, je n’avais encore jamais publié trois livres chez le même éditeur. Un seul chez l’Ampoule, deux chez Magnier, deux chez Castells.

Trois chez moi.

Je dis ça, je ne dis rien de spécial.

Ce que je dis, en revanche, c’est que vous êtes cordialement invités au vernissage du nouveau-né, demain jeudi 5 février 2008 à 18h30 à la bibliothèque du centre-ville de Grenoble, où la charmante Marilyne Mangione et moi-même tâcherons d’accomplir une lecture de cet ouvrage en conservant notre sang-froid.

Et puis faites-vous donc plaisir en commandant l’ouvrage, car du même coup vous me ferez également plaisir : cet ABC a beau chanter les plaisirs solitaires, quand c’est partagé, c’est bien, aussi.

Voilà l'invitation diffusée par Marilyne. Je suis très choqué ! Je suis un auteur jeunesse, moi ! C'est obscène ! Indécent ! Scandaleux ! Que fait la police des moeurs ?

(bien sîr que c’est fait exprès, les deux V de Février, qu’est-ce que vous croyez.)

DIY

24/01/2009 3 commentaires

L'anarcho-punk à brushing et sa boîte à out'

Voici quelques semaines, j’ai été contacté par Catherine Leblanc qui m’a présenté un projet original : « J’ai envie de créer un site, La fabrique d’albums, pour mettre des albums gratuits en ligne. L’idée initiale est d’encourager une création libre de toute notion de rentabilité, de découvrir des talents, de permettre les rencontres entres auteurs et illustrateurs. » Ce projet, qui n’en est qu’à ses balbutiements, inclurait un volet d’édition des albums à la demande ; aussi Catherine me demandait-elle de lui exposer comment je me débrouillais pour publier moi-même mes livres.

Je reproduis ci-dessous la réponse que je lui ai faite, en guise de prière d’insérer, de note d’intention, ou bien de résumé des épisodes précédents

« Bonjour Catherine
Vive l’édition alternative, sans but lucratif, pure beauté du geste, anti-commerciale, anti-librairie, anti-réseau, anti-service de presse, anti-parisien, anti-province aussi bien, anti-tout, underground, punk, « do-it-yourself », équitable, libertaire ! Peu importe son nom, mais vive elle, ah ça oui ! Qu’elle vive !
Je vous adresse tous mes vœux pour votre projet de site, et je suis prêt à vous faire part de mon expérience, même si ceci est très différent de cela.

Voici : je disposais d’un petit pécule, gagné sur mes livres publiés chez de « vrais » éditeurs ; chérissant ma liberté plus que tout et en tout cas plus que les chiffres de vente, supportant de plus en plus mal d’envoyer des manuscrits (« Cher Monsieur ou Madame, voudriez-vous lire mon livre ? J’y ai consacré des années, juste un regard s’il vous plait ?« ), j’ai décidé d’engloutir (d’occulter, pourrait-on dire) cette somme dans un label d’auto-édition, pour publier ce que bon me semble, comme bon me semble, avec qui bon me semble, et dans un parfait dédain pour le sort commercial du livre. La « philosophie » en était :  je me paye le luxe de faire des livres à perte, grâce à l’argent que je gagne avec des livres rentables (toujours plus rentables pour les éditeurs que pour les auteurs, du reste), argent « détourné », en quelque sorte. J’ai ainsi auto-publié deux livres en 2008, et deux ou trois autres sont prévus en 2009 – si j’ai l’argent ! sinon ce sera 2010…

Détail crucial : je ne suis pas vraiment seul. Je n’aurais jamais entrepris cette démarche si je n’avais pas travaillé main dans la main avec un graphiste hors-pair (avec qui j’avais déjà réalisé deux livres chez un autre éditeur), prêt à l’aventure, et qui m’a assuré le logo, la charte graphique, la mise en page, l’élégance générale, et surtout l’émulation, le regard critique, le plaisir de créer à deux. C’est beaucoup : son titre de factotum n’est pas usurpé. Le résultat  visuellement parlant, m’enchante, je dois dire. Car d’ordinaire micro-édition signifie souvent, hélas, « édition moche » – or la médiocrité graphique était hors de question pour le Fond du Tiroir, micro-éditeur certes, mais maxi-exigeant esthétiquement. Ainsi, le personnel au complet du Fond du Tiroir se compose de moi-même et du graphiste, ce dernier étant le seul rémunéré : je lui fais un petit chèque forfaitaire pour chaque livre, bien en-deça d’ailleurs de la valeur et de la somme de travail qu’il fournit.

Je me monterai un jour ou l’autre en association loi 1901, afin d’afficher un statut légal (pour le moment, je suis dans l’absolu vide juridique : les dépenses et recettes du Fond du Tiroir sont mêlées à mon compte en banque personnel), mais cela est moins urgent que la pure et simple envie de faire des livres… La France est un pays où la liberté des livres est une authentique tradition, apprécions, et profitons-en : point besoin d’être une SARL ou quoi que ce soit d’autre… N’importe quel particulier (et je vous prie de me croire particulier) peut « faire un livre », demander à l’AFNIL un numéro d’ISBN afin de profiter de la TVA à 5,5%, etc… Ce que j’ai fait. (Je vous conseille, au chapitre des détails pratiques, la consultation de l’ouvrage qui hélas commence à dater un peu, L’auteur en liberté de Claude Vallier.)

Ensuite j’ai démarché divers imprimeurs dans la région de Grenoble (je suppose qu’il y en a autant dans la région d’Angers), j’ai comparé les devis, choisi en fonction du rapport qualité-prix… Pour mes deux premiers livres, j’ai ainsi fait appel sans le moindre scrupule à deux imprimeurs différents : je cherchais pour le premier une meilleure finition (un façonnage qui finalement s’est révélé impossible), et pour le second une garantie de rapidité et d’efficacité, j’ai donc opté pour un imprimeur davantage spécialiste du numérique… C’est tout simple, au fond ! Croyez-moi, consacrer une matinée, avec le graphiste et/ou l’imprimeur pour calibrer la couleur de couverture de SON livre, procure des joies comparables en intensité à celles de l’écriture, et nullement incompatibles.

Dernière étape, la plus fastidieuse : vendre le livre une fois qu’il existe. Je procède essentiellement par la vente par correspondance à partir de mon blog, et exceptionnellement je confie quelques exemplaires à des libraires que j’aime bien et qui m’aiment bien (sachant que ce dépôt est fatalement à perte : la marge que le libraire garde sur le livre, habituellement 30%, étant supérieure à ma propre marge « d’éditeur », plutôt située vers 15%.)

Bilan chiffré de mes premiers livres :
le premier m’a coûté 2700 euros (1800 d’imprimeur et 900 de graphiste). Il sera rentabilisé si j’écoule 220 exemplaires sur un tirage de 260 – or j’en suis à environ 110 ventes, à mi-chemin de ce seuil…
Le deuxième, plus petit et beaucoup moins cher, m’a coûté seulement 850 euros (550 euros d’imprimeur et 300 de graphiste) – celui-là sera rentabilisé plus rapidement, même si cela adviendra dans la même tranche : aux alentours des quatre-cinquièmes du tirage. À ce jour, sur un tirage de 365, j’en ai vendu 60… et offert une cinquantaine : à nouveau, j’arrive à un chiffre total d’une grosse centaine – je crains que ce soit là tout « mon public » (j’ai lu il y a quelques mois un intéressant article intitulé Mille vrais fans qui expose puis critique la théorie très « web 2.0 » selon laquelle un artiste sans éditeur (sans « major », puisqu’il y était essentiellement question de musique) mais avec un public de 1000 personnes seulement, est économiquement viable. J’en suis donc à 10% de cet objectif de viabilité !)
Le troisième livre FdT, qui sortira le 5 février, et sur lequel je travaille actuellement, est une folie douce. Très cher à fabriquer comme à vendre, il sera en quadrichromie et reproduira des gravures aux couleurs très délicates – celui-ci va me ruiner une bonne fois (reçu un devis de l’éditeur : 3800 euros, je ne dispose pas d’une telle somme, mon pécule est à présent épuisé, je vais lancer une souscription), et sera par conséquent peut-être le dernier – banco !

– Si, malgré l’adversité (et la crise mondiale partout-partout), j’équilibre mes comptes, je ferai un quatrième livre, puis un cinquième. Les idées ne manquent pas, comme on dit.

Voilà ! J’ignore si ces informations peuvent vous servir… Je termine en mentionnant un auteur-éditeur que j’admire énormément et qui est, dans le milieu de la littérature jeunesse, un exemple accompli de « l’auto-édition qui réussit » : Benoît Jacques. Voilà des années que Benoît creuse son sillon sans aucunement dévier sa charrue, il fait ses livres voilà tout, ses albums aux formats variés et ses bandes dessinées, souverainement, et ils sont magnifiques. Je n’en suis certes pas là (le FdT n’étant même pas distribué), mais, au moins de loin, Benoît Jacques est l’un de mes héros.

Bien à vous, bonne chance, et bon an neuf,
Fabrice

En post-scriptums, trois éléments de réflexion complémentaires :
1) Je crois (mais je me trompe peut-être) que les illustrateurs sont, d’une façon générale, davantage que les auteurs dans une démarche « professionnalisante », n’ont pas d’autre « métier » que leur art, et rechigneront par conséquent à offrir gratis des travaux à un site pour la pure beauté du geste, sans revenu garanti… Il est bien clair que, en ce qui me concerne, je dispose d’un salaire régulier (quoique modeste), pour une activité autre, qui assure mon quotidien et me permet de consacrer mes gains littéraires à des pures pertes littéraires.
2) J’avais discuté avec Thierry Lenain autrefois d’un projet qu’il avait conçu de monter une maison d’édition associative, gérée par les auteurs eux-mêmes, « Faire en quelque sorte », disait-il, « pour la littérature jeunesse ce que l’Association a fait pour la bande dessinée ». C’était une belle utopie, qui ne s’est jamais concrétisée, faute d’énergie et de motivation. Peut-être devriez-vous parler avec Thierry ? Peut-être que son projet et le vôtre sont compatibles ?
3) Un peu d’eau dans mon vin, finalement. Je commençais cette lettre par une énumération de qualificatifs négatifs, me posant anti-ceci, anti-cela, anti-monde de l’édition traditionnelle… Aujourd’hui, je dirais plutôt non-ceci, non-cela, plutôt qu’anti. Ce que je fais, je le fais sans eux, mais pas contre eux. »

Ci-dessous, pour illustrer le propos, la tête-de-moi-en-punk (ah ! que de souvenirs ! toute une époque ! canettes, chiens et pogo !) et un hommage de Buznik :

no  future

Casser la Barack

Tout ça c’est dans la tête

09/01/2009 Aucun commentaire

Vous dansez mademoiselle ?rochainement sur cet écran…

ABC Mademoiselle, troisième livre édité par le FdT, existera dans moins d’un mois. Déjà un autre livre ? Est-ce bien raisonnable ? Vous avez raison, on ne voit pas le temps filer, ni le flux hanter, et ce livre-ci est tout sauf raisonnable. Les circonstances dictent et me bousculent. Même pas sûr de concocter un bon de souscription dans l’intervalle. Mais vous pouvez dès à présent et à tout moment envoyer vos dons, je vous en prie, nous ferons les comptes plus tard.

Celui-ci va me coûter les yeux de la tête. J’aurais préféré, très honnêtement, qu’un autre éditeur, un vrai, le publie, c’est à dire le rende « public » davantage que je ne saurais faire. Marilyne Mangione (l’illustratrice) et moi-même n’avons pas trouvé preneur. Allai-je laisser cette belle chose au fond de mon tiroir ? Allons donc ! Je le fais ! Tant pis ! Tant mieux !

Après L’Echoppe qui, comme on sait, était un documentaire, et Le Flux, qui était une carte de vœux/faire-part, avant un hypothétique 4e ouvrage qui serait un reportage, l’ABC sera la première authentique bonne vieille fiction publiée sous label Tiroir-qui-vole. Pas n’importe quelle fiction : je me love dans la tête d’une jeune fille. Et quand je dis « dans la tête », je me comprends.

Trane

08/01/2009 2 commentaires

"Je voudrais que ma musique guérisse celui qui l'écoute." (J.C.)

L’on aura peut-être remarqué le changement d’aspect de ce blog depuis l’an nouveau. Se sont subtilement transformés l’agencement, le graphisme, pour tout dire « le thème » du blog – car c’est ainsi qu’en informatique on désigne un habillage (comme dans « parc à thème »), ce qui sémantiquement ne laisse pas d’être étonnant, confusion de la forme et du fond. J’espère que c’est pour le mieux. Pour l’heure je trouve ce « thème » encore un peu bizarre, mais je suppose que c’est seulement le temps d’adaptation. À mon âge.

Cette chirurgie esthétique s’accompagne d’une autre opération, plus discrète mais plus vitale, dans les entrailles du bazar : nous roulons désormais dans la version WordPress « 2.7 ».

Or, si je vous en parle, c’est que cette nouvelle version porte un petit nom : Coltrane. Dixit WordPress : « It’s the next generation of WordPress, which is why we’ve bestowed it with the honor of being named for John Coltrane » – notons que les versions antérieures de WordPress répondaient (?) aux noms de Mingus, Strayhorn, Duke, Ella, Getz, Dexter, Brecker, et Tyner (sic).

D’où est-ce que je vous parle ? Je vous parle depuis Coltrane. Ça me touche. Coltrane n’est pas n’importe qui. A love supreme (ici vous pourrez en entendre quelques secondes dans une version live) est peut-être le disque que j’ai le plus souvent écouté dans ma vie. Dont quelques centaines de fois, en boucle, lors de l’écriture de TS.

Le grand homme, porteur d’âme, partageur de beauté, créateur d’une oeuvre, lyrique, charnelle, spirituelle, d’une profondeur infinie en même temps que d’une perpétuelle délicatesse… devient en un clic dispositif technologique up-to-date, dernier modèle en magasin d’un moteur de gestion de contenu écrit en PHP et reposant sur une base de données MySQL, volatil et bientôt périmé (la prochaine mouture s’appelera peut-être Albert Ayler) ; et ainsi circulent parmi nous, sinon les significations, du moins les signes.

Sur quel drôle de monde nous vivons. Pourquoi pas un systéme de programmation nommé Mozart ? un « thème » de blog intitulé Kubrick ? un langage de programmation baptisé Shakespeare ? Une bagnole nommée Picasso (tant qu’on y est) ? Une société de racket légal par gestion des parkings souterrains et par lobbying en faveur de la construction d’aéroports superfétatoires nommée Vinci ? Un presse-purée de marque déposée Aristote ?

(Après vérification, il semble que tous ces exemples, à l’exception du dernier, soient authentiques.)

Toujours à propos de la circulation des signes… Connaissez-vous le site Sleeveface qui invente mille et une variations à partir des pochettes de disques vinyl ? Non seulement ces mises en scène fétichistes sont amusantes, mais elles évoquent quelque chose d’assez profond, me semble-t-il, sur ce que nos disques de chevet font à nos physionomies :

Brisavion

06/01/2009 un commentaire

Bison Ravi

On fête cette année le cinquantenaire de…

Non. Un truc cloche. Je reprends. Pouf, pouf.

« On » « fête » cette année le cinquantenaire de la mort de Boris Vian. Le Fond du Tiroir, opportuniste comme vous le connaissez, mêle au chœur sa voix toute intérieure et rend hommage ici au chanteur-écrivain-ingénieur-équarrisseur de première classe du collège de ‘pataphysique.

Quelle tête, l’hommage ? Le visage sournois et un peu gras d’un voyeur de coulisse : nous écartons délicatement le rideau… nous jetons un regard par dessus l’épaule… nous nous apprêtons à vous révéler un secret de fabrication, à braquer le projecteur sur un détail discret du dernier livre du FdT, Le Flux (toujours en vente). Nous nous livrons en somme au bonus exclusif ! au making of ! à la scène de tournage qui explicite l’inspiration : l’ombre portée sur notre plaquette de Boris Vian, mort hélas dix ans trop tôt pour être cité dans l’ouvrage en question.

Bienvenue dans le double-fond du tiroir ! Ci-dessous quelques extraits de mails échangés entre moi-même, alias l’Auteur, et Patrick Villecourt, alias le Factotum, au sujet de la maquette de couverture. Patrick avait, comme on dit, donné libre court à sa créativité, et conçu une première version de la quat’ de couv’. Pour orner ce verso, il compliquait le jeu initié sur le recto (feuillets d’éphéméride arborant jours de la semaine et mois), en inventant un autre jour (jourdi), d’un autre mois (nocendre) :

Exclusif ! Le cul du livre avant maquillage, surpris par un paparazzi !

FV – (…) Superbe ! Bravo. J’aime énormément nocendre dont les sonorités sont piles dans le sujet. En revanche, jourdi, c’est pas terrible, ça ne m’évoque rien (si ce n’est Camille Jourdy, mais je ne vois pas le rapport). Tiens, t’as qu’à remplacer par Verdi. Primo, Verdi évoque, excuse du peu, le requiem (encore une façon de rejoindre le thème en subliminal), deuxio le verbe verdir, quant à moi, m’a toujours fait penser à la chanson de Boris Vian : Quand j’aurai du vent dans mon crâne/Quand j’aurai du vert sur mes osses/P’tet qu’on croira que je ricane/Mais ça sera une impression fosse… (…)

PV – (…) Ah ? C’est marrant que Verdi, en 4 de couv, te fasse penser (ou l’inverse, plutôt) à la chanson de Vian (que j’aime beaucoup, chantée par Reggiani), parce que je me suis inspiré de L’Arrache-Cœur pour donner les heures de lunaison en une de couv ! (…)

FV – (…) Drôle de coïncidence : on a tous les deux été influencés par Vian, de deux façons différentes, pour la couve du Flux… Eh ben, tu sais quoi ? C’est peut-être pas une coïncidence : Vian, qui prédisait qu’il n’atteindrait pas les quarante ans, est mort dans sa 40e année. Voilà qu’il hante un bouquin d’entrée dans la quarantaine (et dans la mort). Tout va bien. (…)

PV – [suite à la publication du présent article] (…) Je vais, disais-je, justifier (chose que je n’avais point encore fait) le choix initial de “jourdi” : c’était pour moi le condensé de « au jour-dit », sous-entendu « le dernier » (sinon ça ne serait pas drôle). Ce qui me semblait donc bien dans le ton et la subliminale redondance au cœur de laquelle Verdi éclate, pour le meilleur fors le pire, en sa pleine magnificence. Mais puisque que cela n’a pas éveillé d’écho chez toi, c’est que ce n’était pas bon, et je trouve Verdi plus riche en double-fonds. (…)

(Vous pouvez comparer le brouillon ci-dessus avec la version imprimée qui, elle, proclame « Verdi »… Et vous pouvez aussi consulter les horaires de lunaison en couverture, ça ne peut pas faire de mal… Mais pour cela, il faudrait déjà avoir le bouquin, n’est-ce pas ? Vous savez ce qu’il vous reste à faire ?)

Le Fond du Tiroir vous souhaite une bonne année

06/11/2008 un commentaire

Et surtout la santé. Oui, je le sais bien, que ce n’est pas du tout la saison. Seulement voilà : le FdT et je-soussigné vous adressons dès à présent nos meilleurs vœux recyclables en tout temps, à l’occasion du 50e article publié dans ces colonnes et surtout de la sortie prochaine du deuxième livre publié par nos soins.

Or, ce n’est pas un livre, à peine une plaquette (moins de 10 000 signes, si l’on parle calibre), c’est une carte de vœux.

Parfaitement.

Je ne l’avais pas annoncé, celui-ci (j’en avais annoncé d’autres, retardés d’autant), je ne l’avais même pas vu venir… On prévoit de faire un livre, on en fait un autre (c’est ça qui est bien, je vous expliquerai à l’occasion), on ne maîtrise pas tout, on ignore quel polichinelle au juste repose au fond de son tiroir… Bref c’est ainsi, une carte de voeux jaillit de la corne d’abondance à queues d’aronde, fabriquée avec amour par Patrick « Factotum » Villecourt et moi-même dans l’absolu respect de l’éthique d’ores et déjà traditionnelle du Fond du Tiroir (maison sérieuse fondée en 2008) : désinvolture et perfectionnisme.

Ce sera une élégante bricole de 12 pages format horizontal insérable dans une enveloppe type DL (C6/5 ou C5/6), pour célébrer le jour que l’on veut, l’année qui vient ou une autre, pour marquer le temps qui passe plus vite que nous, beau prétexte pour se lancer des vœux à la figure. En tout cas, moi, je m’en servirai sans faute pour souhaiter un joyeux 2009 à mes amis et alliés – si vous êtes en train de lire ceci, vous comptez vraisemblablement parmi mes alliés et amis, mais rien ne vous empêche de m’en commander un petit stock pour l’adresser à votre tour à votre propre liste d’alliés et amis, qui ne recoupe pas forcément la mienne, ça changera des cartes UNICEF et des paysages de neige la nuit. Vous pourriez même m’en envoyer un, je vous assure que ça me ferait plaisir.

Parution deuxième quinzaine de décembre, prix de vente 3 euros, tirage 365 exemplaires. Je n’ai pas donné son titre ? Ah non, tiens, effectivement. En revanche, si vous voulez son ISBN, c’est le 978-2-9531876-1-8.

Ravalement de façade

06/09/2008 Aucun commentaire

Je signale à votre attention que mon webmestre masqué (il préfère conserver l’anonymat, son nom de famille étant compromettant) vient de rafraîchir la page d’accueil du site. Vous allez voir, c’est en couleurs, désormais. C’est dingue ce qu’on peut faire, de nos jours, avec un ordinateur.

« Over and off »

01/07/2008 2 commentaires

Sauf accident, il n’y aura pas de nouvel article posté ici avant septembre. En attendant, L’Echoppe reste en vente, et je modèrerai et répondrai aux messages déposés, naturellement.

Pendant que le rideau tombe, quelques dernières nouvelles en vracance :

– Je viens de recevoir une proposition de madame Angela Sauvage-Sanna, qui souhaite monter une adaptation théâtrale des Giètes en mai 2009, au théâtre Carré 30 (Lyon). Je lui donne carte blanche, naturellement.

– Je viens de recevoir ce matin même un courrier du salon du livre des Marches (Savoie), adressé à Jean Vigne : « Nous avons bien reçu votre candidature et vous remercions de l’intérêt que vous portez à notre salon « Livres en marches ». Nous ne sommes malheureusement pas en mesure de répondre favorablement à votre demande et le regrettons vivement »… D’après l’omniscient oracle Google, un Jean Vigne écrit des livres fantastiques publiés chez Chloé des Lysses, il n’est pas loin de la Savoie, je déduis que ce courrier lui était destiné. En lisant le blog de mon homonyme, mon-semblable-mon-frère, je suis au regret de ne pas m’intéresser à sa littérature, pas ma tasse de thé du tout. Voilà qui rend modeste : mon blog a peu de chances d’être moins dérisoire que le sien, et je réalise fugacement à quel point tout ce que je peux écrire est fort peu susceptible d’intéresser quiconque tomberait par hasard sur les présentes anecdotes narcissiques. C’est bientôt la fin du monde, et nous cherchons désespérément à attirer l’attention avec nos blo-blogs ! Ah, rien de nouveau sous le soleil de la blogosphère ! Vanitas vanitatis, naturellement !

– Je viens de gougueuliser L’Echoppe (car je ne me contente pas de gougueuliser les auteurs presque-homonymes de romans fantastiques, j’avoue en outre la manie complaisante et masturbatoire d’auto-gougueulisation), et j’ai pu constater que le tout premier site proposé par l’Oracle est, comme autrefois pour les Giètes, le blog de Sylire. Je lui suis reconnaissant de sa fidélité, naturellement.

– Je viens d’apprendre que j’étais invité à la prochaine fête du livre de Saint-Paul Trois Châteaux (février 2009), dont l’invité d’honneur est ma bonne marraine, Jeanne Benameur. Je suis ravi, naturellement.

– Je viens d’avoir le détail des deux prochaines représentations de la lecture musicale des Giètes, donnée par Christophe S. et moi. La première aura lieu le lundi 18 août à Doucy-Combelouvière (Savoie) – désolé, ce n’est pas ouvert au public, ce sera une soirée privée à l’usage des stagiaires folkeux de Mustradem. La seconde aura lieu le dimanche 14 septembre au festival des Vans, fondé par Sébastien Joanniez. Si vous avez des idées d’endroits susceptibles d’accueillir procahinement ce petit spectacle, envoyez-les moi, naturellement.

– Je viens de me remettre à écrire, écrire pour de vrai je veux dire. Contrairement à ce que j’envisageais, ce n’est pas sur Jean II le Bon, mais sur l’Arbre et le bâton. [Ici figurait un lien vers un texte que je présentais comme un reportage burlesque impubliable. Printemps 2009 : je désactive le lien parce que finalement je vais le publier, elle est bonne, celle-là. Au Fond du Tiroir, naturellement.]

– Je viens de réaliser à quel point je pense en presque permanence à la fin du monde, sans déconner, ces jours-ci je pense à la fin du monde, en presque permanence. Je suis très profondément marqué par mes excellentes mauvaises lectures : un documentaire (L’humanité disparaitra, bon débarras ! d’Yves Paccalet) et un roman (La route de McCarthy, toujours elle). Et voilà, je pense à la fin du monde. L’arbre et le bâton, dont je vous causais à l’instant, est une petite fin du monde à sa manière, dans un supermarché. Hier j’ai fait les courses dans un supermarché, j’ai tout trouvé très cher et vu trop de rayons vides. Je me suis dit que ces deux signes étaient convergents, que la société d’abondance avait vécu. Aussi, j’ai pensé à la fin du monde, pour ainsi dire, naturellement.

– Je viens de pleurer toutes les larmes de mon corps en regardant la fin de Six feet under. Mon snobisme rechigne à admettre que la télévision, medium corrompu à visée essentiellement hypnotico-commerciale, euphorisant ou anesthésiant selon les besoins tout comme la chimie derrière les miroirs des salles de bain, on-off sur nos nerfs, est capable de chef d’oeuvre. Pourtant c’est un fait, Six feet under, le soap de la mort, est un superbe mega-mélo d’une cinquantaine d’heures, un intelligent tire-larme, si original et cependant si juste qu’on ne l’oublie pas. J’ai essuyé un deuil plutôt cruel, cette année. J’ai perdu la personne à qui j’ai dédié les Giètes. Et lors des formalités pour les obsèques, la seule chose amusante de la matinée aux pompes funèbres était que le croque-mort, suave, encravaté, habitant ses phrases toutes faites de compassion très professionnelle, ressemblait tellement à David Fisher que, pour me distraire les affects, je me suis demandé s’il n’était pas homosexuel. Ce deuil ne m’a rendu Six feet under ni plus aimable, ni plus repoussant. J’ai juste beaucoup pleuré à la fin du feuilleton. Ah, catharsis ! Naturellement.

– Je viens d’arrêter de fumer. Pas attendu la fin du monde. Cette fois c’est « définitif », naturellement.

– Je viens de lire un intéressant article intitulé Mille vrais fans qui expose puis critique la théorie très « web 2.0 » selon laquelle un artiste sans éditeur (sans « major », puisqu’il est essentiellement question de musique ici) mais avec un public de 1000 personnes seulement, est économiquement viable. Avec mes 87 Echoppes écoulées, j’en suis loin, naturellement.

– Je viens d’apprendre que le prix du baril de pétrole vient à nouveau de franchir un cap historique. (Ceci est une information à validité permanente, qui restera fraîche quel que soit le jour de l’été où vous lirez cette page. Très commode, naturellement.)

Voilà. Passez un bon été, je vous prie. Travaillez moins pour réfléchir plus, et aimez-vous les uns les autres afin d’éviter la fin du monde. (Ouais, c’est ça. Naturellement.)