Malgré tous les ennuis de notre monde, je n’ai jamais abandonné dans mon cœur l’amour dans lequel j’étais élevé ou l’espoir de l’homme dans l’amour. Dans la vie, comme sur la palette de l’artiste, il n’y a qu’une seule couleur qui donne un sens à la vie et à l’art : la couleur de l’amour.
Marc Chagall
Trilogie Un peintre en musique(s) – 2 (création 2023)
La biographie de Marc Chagall (1887-1985) est un voyage. Né au sein d’une famille juive dans un shtetl de Biélorussie, il fait ses études à Saint-Pétersbourg et dès 1910 rejoint Paris, alors capitale mondiale des arts. Il retourne en Russie pour participer à la Révolution et sera même promu « commissaire aux beaux-arts » de la jeune URSS, avant de fuir définitivement son pays natal pour Berlin, les USA, le Brésil… La dernière partie de sa vie s’ancre en France, qui reste son pays de cœur.
Nous évoquerons ses pérégrinations, son art et son époque, en mêlant le récit biographique, les images projetées… et bien entendu la musique, si présente dans son œuvre, avec un répertoire dominé par la musique russe mais s’autorisant, comme lui-même, des détours par le klezmer, la musique française du début du XXe siècle, et même l’opéra : l’une des dernières grandes œuvres de Chagall n’est-elle pas la fresque au plafond de l’opéra Garnier à Paris ?
Christine Antoine : violon Bernard Commandeur : arrangements et piano Fabrice Vigne : texte et voix
Durée approximative : 1h20
– Biographie des artistes –
Christine Antoine, violon Christine Antoine a fait ses études au CNR de Grenoble, dans un cursus complet couronné de plusieurs prix, dont celui de violon dans la classe de C. Munch. Elle se perfectionne à Paris auprès de Jean Lenert pendant 5 ans, puis entre à l’orchestre des Pays de Savoie. Après deux années avec de grands chefs, comme Patrice Fontanarosa, Tibor Varga ou Reinhart Goebel, elle se passionne pour la musique ancienne et entre au Conservatoire de Genève. Là, elle se confronte à la technique du violon baroque avec Chiara Banchini, Odile Édouard, Gabriel Garrido, Enrico Gatti, les frères Hantaî, Jaap Schrôder. Après son Diplôme mention très bien de musique ancienne, c’est tout naturellement qu’elle collabore avec divers ensembles baroques comme Ad Fontès (Allemagne), Swiss Consort (Genève) Anachronismes (Valence), l’Hôtel-Dieu (Lyon), Acorte Musicale (Lausanne). On peut l’entendre au Festival d’Ambronay, Royaumont, Sylvanès, Mont-Blanc, Jean de la Fontaine, souvent en duo avec la claveciniste Irène Assayag. Elle fonde en 2007 l’ensemble « Le Jardin Musical » qui promeut la musique ancienne et la musique contemporaine. Titulaire du C.A de violon, elle est actuellement professeur au Conservatoire d’Eybens et dirige l’orchestre symphonique « OSE ! » ainsi que le chœur « Vox Clamans ».
Bernard Commandeur, arrangements et piano Bernard Commandeur a eu un parcours musical diversifié: comme pianiste il a été l’élève d’Aldo Ciccolini au Conservatoire supérieur de Musique de Paris; comme chef d’orchestre il a travaillé avec Pierre Dervaux à l’Ecole Normale de Musique de Paris. Il est licencié en Philosophie de la faculté de Nanterre. Intéressé par toutes les formes de pratique musicale, il a composé des œuvres de styles contrastés: des mélodies pour voix et piano sur des poèmes de Prévert et Lorca ; Rap pour voix d’ados , cordes et saxophones ; des gingles pour diverses formations ; TANGONORA , pièce chorégraphique pour 6 instruments. APPELLATION CONTRÔLEE est sa 1ère musique de film publicitaire pour les « Côtes du Ventoux » qui a fait l’objet d’un prix. Il a écrit de nombreux arrangements pour différents spectacles. Il a été professeur de piano, puis directeur des Conservatoires de La Rochelle, Grenoble et Valence.
Fabrice Vigne, texte et voix Fabrice Vigne est écrivain. Son premier roman, intitulé TS, paraît en 2003 aux éditions l’Ampoule. Une vingtaine de titres suivront, les plus remarqués en édition jeunesse (Les Giètes, éditions Thierry-Magnier, prix du livre Rhône-Alpes 2008). En 2008 il dilapide ses revenus littéraires dans une structure d’auto-édition, Le Fond du Tiroir, où il invente librement et confidentiellement des livres avec divers artistes. Dernier titre paru : La théorie de la compote, éditions l’Atelier du Poisson Soluble, 2023. L’écriture lui est indispensable mais, exercice solitaire et de longue haleine, elle ne lui suffit pas. Aussi, il s’adonne aux arts de la scène, plus immédiats et plus collectifs : il est comédien, conteur, musicien, et conçoit divers spectacles soit à partir de ses propres textes, soit à partir d’autres. Il est en outre président d’un label de musique (MusTraDem). Parmi ses fertiles collaborations avec des musiciens, il co-anime régulièrement des ateliers d’écriture de chansons avec l’autrice-compositrice-interprète Marie Mazille. Dans le civil, il est également, parfois, bibliothécaire.
Programme de salle, verso (clic droit pour agrandir) :
Programme de salle, recto (clic droit pour agrandir) :
Ensuite [après Goya], commence la peinture moderne.
André Malraux, Saturne, le destin, l’art et Goya
Trilogie Un peintre en musique(s) – 1 (création 2022)
Espagne, crépuscule du XVIIIe siècle. L’époque regorge de splendeurs et d’horreurs. De fastes et de guerres. D’or et de sang. D’illusions et de désillusions. De rêves autant que de cauchemars. Un homme, familier de la cour puis paria, a tout vu de son temps, tout absorbé et tout sublimé dans sa peinture. Il s’appelle Francisco de Goya. Ses tableaux, qu’ils soient nés d’une commande au grand jour ou bien d’une recherche secrète et cachée, mais également ses gravures, les Caprices et les Désastres de la guerre, sont autant de témoignages sur une époque tourmentée, mais aussi sur un inconscient collectif qui est encore le nôtre :
« Le sommeil de la raison engendre des monstres… »
Au fil de ce spectacle, la vie, l’œuvre et l’époque de Goya (1746-1828) sont évoquées à la fois par le récit, par les images, et par la musique, sur une partition espagnole et latino-américaine.
Christine Antoine : violon Bernard Commandeur : arrangements et piano Fabrice Vigne : texte et voix
Durée approximative : 1h20
– Coupure de presse, journal Les Affiches, 2023 –
– Biographie des artistes –
Christine Antoine, violon Christine Antoine a fait ses études au CNR de Grenoble, dans un cursus complet couronné de plusieurs prix, dont celui de violon dans la classe de C. Munch. Elle se perfectionne à Paris auprès de Jean Lenert pendant 5 ans, puis entre à l’orchestre des Pays de Savoie. Après deux années avec de grands chefs, comme Patrice Fontanarosa, Tibor Varga ou Reinhart Goebel, elle se passionne pour la musique ancienne et entre au Conservatoire de Genève. Là, elle se confronte à la technique du violon baroque avec Chiara Banchini, Odile Édouard, Gabriel Garrido, Enrico Gatti, les frères Hantaî, Jaap Schrôder. Après son Diplôme mention très bien de musique ancienne, c’est tout naturellement qu’elle collabore avec divers ensembles baroques comme Ad Fontès (Allemagne), Swiss Consort (Genève) Anachronismes (Valence), l’Hôtel-Dieu (Lyon), Acorte Musicale (Lausanne). On peut l’entendre au Festival d’Ambronay, Royaumont, Sylvanès, Mont-Blanc, Jean de la Fontaine, souvent en duo avec la claveciniste Irène Assayag. Elle fonde en 2007 l’ensemble « Le Jardin Musical » qui promeut la musique ancienne et la musique contemporaine. Titulaire du C.A de violon, elle est actuellement professeur au Conservatoire d’Eybens et dirige l’orchestre symphonique « OSE ! » ainsi que le chœur « Vox Clamans ».
Bernard Commandeur, arrangements et piano Bernard Commandeur a eu un parcours musical diversifié: comme pianiste il a été l’élève d’Aldo Ciccolini au Conservatoire supérieur de Musique de Paris; comme chef d’orchestre il a travaillé avec Pierre Dervaux à l’Ecole Normale de Musique de Paris. Il est licencié en Philosophie de la faculté de Nanterre. Intéressé par toutes les formes de pratique musicale, il a composé des œuvres de styles contrastés: des mélodies pour voix et piano sur des poèmes de Prévert et Lorca ; Rap pour voix d’ados , cordes et saxophones ; des gingles pour diverses formations ; TANGONORA , pièce chorégraphique pour 6 instruments. APPELLATION CONTRÔLEE est sa 1ère musique de film publicitaire pour les « Côtes du Ventoux » qui a fait l’objet d’un prix. Il a écrit de nombreux arrangements pour différents spectacles. Il a été professeur de piano, puis directeur des Conservatoires de La Rochelle, Grenoble et Valence.
Fabrice Vigne, texte et voix Fabrice Vigne est écrivain. Son premier roman, intitulé TS, paraît en 2003 aux éditions l’Ampoule. Une vingtaine de titres suivront, les plus remarqués en édition jeunesse (Les Giètes, éditions Thierry-Magnier, prix du livre Rhône-Alpes 2008). En 2008 il dilapide ses revenus littéraires dans une structure d’auto-édition, Le Fond du Tiroir, où il invente librement et confidentiellement des livres avec divers artistes. Dernier titre paru : La théorie de la compote, éditions l’Atelier du Poisson Soluble, 2023. L’écriture lui est indispensable mais, exercice solitaire et de longue haleine, elle ne lui suffit pas. Aussi, il s’adonne aux arts de la scène, plus immédiats et plus collectifs : il est comédien, conteur, musicien, et conçoit divers spectacles soit à partir de ses propres textes, soit à partir d’autres. Il est en outre président d’un label de musique (MusTraDem). Parmi ses fertiles collaborations avec des musiciens, il co-anime régulièrement des ateliers d’écriture de chansons avec l’autrice-compositrice-interprète Marie Mazille. Dans le civil, il est également, parfois, bibliothécaire.
Programme de salle, verso (clic droit pour agrandir) :
Programme de salle, recto (clic droit pour agrandir) :
Toute l’histoire de l’art depuis cent ans peut être étudiée du point de vue du schisme qui s’y établit entre fidèles de Courbet et ennemis de Courbet. (…) La bataille pour Courbet, la bataille pour le réalisme, fait éclater cette vérité, qu’il n’y a pas deux choses distinctes, l’histoire et l’histoire de l’art, qu’il n’y a que l’histoire. Louis Aragon, L’exemple de Courbet
Le fou de peur, vers 1844, musée national d’Oslo (bouche en cul de poule, figure A)
« Gustave Courbet : Je fais comme la lumière » (note d’intention du spectacle)
Gustave Courbet, géant de la peinture aux yeux (encore) plus grands que le ventre, a toujours été en décalage, plus moderne que son époque ou, peut-être, que la nôtre. Jamais consensuel, on l’a dit scandaleux, humaniste, vulgaire, socialiste, orgueilleux, violent, prétentieux, outrancier, radical, provocateur, obscène, libre… Il était surtout pétri de contradictions : paysan de Paris, féministe misogyne, matérialiste athée saisis d’élans mystiques, égocentrique obsédé du bien commun, âpre au gain et infiniment généreux, solitaire en perpétuelle quête de reconnaissance, ne jurant que par la révolution de l’art mais s’engageant dans la Commune de Paris, persuadé que l’art ne s’enseigne pas mais ouvrant un atelier pédagogique, profondément français mais plaidant pour la création des États-Unis d’Europe en pleine guerre franco-allemande, né trop tard pour le romantisme et mort trop tôt pour l’impressionnisme… Une seule chose réconcilie ces paradoxes : Courbet ne fut peut-être rien d’autre que peintre, passionné.
“Je n’ai jamais eu d’autres maîtres que la Nature, et mon sentiment.”
Notre spectacle, entrelaçant les toiles de Courbet, le récit de sa vie et les musiques de son temps, entre mélodies romantiques et chansons de la Commune, vient conclure une trilogie d’art, de musique et de politique débutée avec « Goya : démons et merveilles“ et poursuivie avec ”Chagall : l’ange à la fenêtre ». Christine Antoine : violon Bernard Commandeur : arrangements et piano Fabrice Vigne : texte et voix. »
Sans atteindre les sommets de morgue et de fatuité de Courbet lui-même, homme le plus fier et le plus orgueilleux de France, j’avoue éprouver un enthousiasme délirant pour ce spectacle, volet le plus long, le plus politisé, et le plus personnel (personne ne s’en rendra compte, mais j’y ai copié-collé une page entière du blog du Fond du tiroir, consacrée à la Commune, et j’y récite Le Temps des cerises comme dans Les Giètes) de notre trilogie.
Représentations : * Vendredi 27 juin, 19h, au château de Seyssins * Samedi 28 juin, 11h, chez Mme Evelyne Reinhart, Claix (coordonnées par MP) * Dimanche 21 septembre, deux séances : 16h & 18h (dans le cadre des journées du patrimoine), en l’église Notre-Dame des Vignes, Sassenage … d’autres à venir.
Addendum juillet 2025
De gauche à droite : moi ; L’homme à la pipe (autoportrait de Courbet, 1849, Musée Fabre, Montpellier) ; Christine (bon anniversaire) ; Bernard (invisible, caché derrière son piano)
Le spectacle a beau être enfin créé et avoir trouvé sa forme définitive (ah ah ah ah !) je ne puis m’arrêter de bûcher, je continue d’engranger compulsivement les informations sur l’affreux réaliste et communard. Je dévore l’essai de Louis Aragon, L’exemple de Courbet (1952), excellent, malgré l’obsolescence de sa vaine et stalinienne tentative de valider une filiation problématique entre le réalisme de Courbet et le réalisme soviétique qui n’était absolument pas réaliste, mais idéaliste et idéologique, tout ce que Courbet détestait. Je prélève et approuve l’épigraphe placée en entête du présent article. Et aussi, je complète ma collection d’injures endurées par Courbet. Cette somme d’indignités est fascinante, y compris en tant que moteur d’un destin. Courbet s’en est longtemps régalé, avant d’en être détruit. Depuis L.-F. Céline, je ne m’étais pas passionné pour un artiste à ce point couvert de crachats, de pissats, de diarrhée. Aragon cite ce bijou d’anthologie écrit par Alexandre Dumas fils, le jour même (quelle classe) où Courbet est déchu, à terre, emprisonné :
De quel accouplement fabuleux d’une limace et d’un paon (…) peut avoir été générée cette chose qu’on appelle Monsieur Courbet ? De quelle mixture de vin, de bière, de mucus corrosif et d’œdème flatulent a pu pousser cette courge sonore et poilue, ce ventre esthétique, incarnation du Moi imbécile et impuissant ?
Aragon commente :
Quel principe pouvait être celui de ce genre d’écrivain, sinon la haine basse, la bassesse dans l’injure ? Il y a aura longtemps qu’on ne lira plus La Dame aux camélias, que ces phrases resteront dans la mémoire des hommes à titre d’exemple de la critique bourgeoise, pour montrer jusqu’où peut descendre le porte-monnaie enragé.
Prochaine représentation : 21 septembre, 16h puis 18h en l’église Notre-Dame des Vignes, Sassenage (dans le cadre des Journées du patrimoine).
Pendant ce temps (1), rincez-vous bien l’oeil avec le tableau ci-dessous, La femme aux bas blancs (1864, Coll. de la Fondation Barnes, Philadelphie) qui NE FAIT PAS partie du spectacle puisque je ne saurais citer ni toutes les audaces, ni toutes les insultes. Pendant ce temps (2), le précédent spectacle du trio formé par Christine Antoine, Bernard Commandeur et moi, Chagall : l’ange à la fenêtre, court toujours. Trois dates à l’automne : samedi 20 septembre 11h au château de Valbonnais (38) ; dimanche 21 septembre 11h à Venon (38) ; vendredi 3 octobre 20h, à Bourg de Péage (26), salle François-Mitterrand.
La femme aux bas blancs (bouche en cul de poule, figure A)
Vu le dernier Mission: Impossible. J’espère vivement que, vrai de vrai, c’est le dernier, parce que celui-ci est complètement con. Si j’ai bien compris, l’ennemi suprême est une IA, mais pas celle qu’on croit : plutôt celle qui a écrit le scénario. En gros : un tiers de logorrhée amphigourique incompréhensible ; un tiers d’invraisemblances, incohérences et MacGuffins divers aboutissant systématiquement aux mêmes gimmicks (on dénombre quatre ou cinq occurrences du compte à rebours égrené pendant que Tom Cruise court) ; enfin un tiers de flashbacks qui renouent maladroitement les fils de la saga (la vengeance du fils de Jim Phelps, sérieux ?) et desservent plutôt ce film-ci parce qu’on se rappelle vaguement ce qu’on avait aimé dans certains des précédents. Une scène pourtant, je l’avoue, m’a saisi et a accompli la possible mission d’accélérer mon rythme cardiaque : celle du sous-marin. Je me suis laissé faire un instant dans mon fauteuil et y ai trouvé de l’inédit cinématographique – notamment parce qu’enfin on était dans le monde du silence, on n’avait plus à subir leurs laïus idiots. Scène finalement métonymique, de même que les cabrioles aériennes, du problème fondamental : ce film est hors-sol. Déconnecté, contrairement à la série d’espionnage éponyme créée en pleine guerre froide, des véritables enjeux géopolitiques contemporains. Le seul héritage sensible que les films ont apparemment reçu de la vieille série télé si peu spectaculaire est l’absence absolue de psychologisation des protagonistes de la Mission: Impossible Force. Sauf que dans les années 60, cette froideur psychologique était un parti pris narratif très fort pour décrire des personnages professionnellement déshumanisés, menant une guerre psychologique, jouant avec les nerfs et les failles de leurs ennemis… Tandis qu’en 2025 « Ethan Hunt » n’a tout simplement aucune personnalité, aucune intériorité, aucune motivation, aucun affre, aucun affect (à part quelques principes mécaniques et dévitalisés, répétés à l’envi : « Prends soin de ton équipe », « Tu travailles pour les inconnus »), aucun passé et aucun avenir puisqu’il est identique depuis 30 ans. Il n’existe pas. Comment s’intéresser huit fois à un personnage qui n’existe pas ? Aussi, je préfère mille fois un bon film Marvel (il en existe de mauvais, je parle ici des bons) dont l’atout a toujours été l’empathie qu’on éprouve pour les personnages, l’attachement aux paysages psychologiques qu’ils dessinent, l’identification aux aventures toutes psychiques qu’ils traversent sous couvert de métaphores surnaturelles. Ainsi, le dernier en date, Thunderbolts*, était excellent parce que son véritable sujet caché était la bipolarité, et que ce qu’il en montrait de noirceur était plus poignant que le témoignage de Nicolas Demorand.
(photo Marie Mazille) « J’étais proche il n’y a pas de doute, un des plus proches. On me voit sur les vidéos « AA ». Souvent de dos mais si on connaît mon dos on me reconnaît. » (Ainsi parlait Nanabozo, chap. I)
Encore un lundi très (et bien) rempli : cinq classes à la suite, miam-miam, cette fois-ci dans une école élémentaire au Grand Lemps. Et à la fin de la journée : une chanson par classe, une bonne s’il vous plaît, bien ficelée, entraînante et intelligente, on ne bâcle jamais… Stakhanovisme créatif qui est à la fois une routine d’atelier et un miracle perpétuel, avec ma partenaire de jeu Marie Mazille.
Particularité et émerveillement du jour : les élèves de CM2 à qui nous demandions sur quel sujet ils souhaitaient composer leur chanson nous ont répondu : « Jules Ferry ». Pardon ? Vous êtes sûrs ? Bon, d’accord, va pour Jules. Quel étrange centre d’intérêt pour des enfants de 11 ans. Ces mômes très sages avaient l’air sortis d’ailleurs, d’un autre siècle peut-être, ou au minimum d’un cours de sensibilisation à la République façon hussards noirs, et nous avons écrit avec eux l’hymne de gratitude dont on lira les paroles ci-dessous.
J’avoue que j’ai trouvé rafraichissant, reposant et inespéré cet exercice politiquement correct : se souvenir fugitivement que l’école publique, gratuite, laïque, obligatoire (oui, les enfants m’ont récité l’intégralité du chapelet), la seule authentique école libre, est une bien belle invention.
Ces élèves de CM2 auront tout le reste de leur vie, ou bien de l’année scolaire, pour découvrir la complexité du monde et le côté obscur de Jules Ferry, qui était aussi un affreux idéologue du colonialisme, méritant sans aucun doute déboulonnage (« La France a le devoir de civiliser les races inférieures« , etc.).
« Merci Jules ! »
REFRAIN L’école c’est gratuit Depuis Jules ferry Un siècle et demi L’école c’est la vie
COUPLET 1 Nous en avons bien de la chance De pouvoir passer notre enfance Au Grand Lemps ou partout en France Ailleurs ignorance et souffrance Sierra Leone ou Éthiopie Gambie Mali ou Djibouti Et dans combien d’autres pays Pas assez d’écoles aujourd’hui
REFRAIN
COUPLET 2 Égalité fraternité Sans oublier la liberté Trois mots d’amour à partager Dans la classe ou à la récré Égalité fraternité Sans oublier la liberté Trois mots d’amour à partager Trois mots que nous allons chanter
REFRAIN
COUPLET 3 Se cultiver s’améliorer Bien conjuguer savoir compter Apprendre à lire et à écrire Nager courir et convertir Pour tous ces mots en préambule Du matin jusqu’au crépuscule En minuscule en majuscule Je le dis fort comme un Hercule : Merci Jules !
Cette nuit, j’étais dans un pays en guerre. Je traversais une ville en ruine, j’arpentais des rues effondrées, j’escaladais des gravats sous un ciel gris. Je n’espérais pas croiser quiconque et j’étais prêt au contraire à me planquer à la moindre rencontre, attentif à tous les bruits qui d’en haut ou d’en bas précèderaient une menace. Je guettais surtout les aboiements, car je cherchais des chiens errants. J’étais censé capturer des chiens pour les transformer en chiens de guerre, c’était cela ma mission, ou mon gagne-pain, qui m’écoeurait tellement qu’au fond je n’étais pas fâché de ne débusquer aucun animal, j’accomplissais ma ronde par acquit de conscience, sans espoir. Puis je rentrais chez moi, bredouille. Chez moi aussi, c’était gris, comme le ciel, comme la ville et comme les décombres. Dans ma cuisine, je caressais mon chat et je lui annonçais qu’il allait falloir partir, qu’on ne pouvait plus rester ici. À peine ai-je fait mine de le saisir pour l’enfermer dans sa boîte de transport couleur bordeaux qu’il se hérisse et se met à grogner, cracher, battre l’air de ses crocs et de ses griffes. La lutte dure, mes mains sont lacérées, j’empoigne brutalement le chat tout en lui parlant gentiment et malgré ses résistances et ses pattes accrochées aux rebords, je réussis à le placer au fond de la boîte, qu’enfin je scelle en appuyant de tout mon poids sur le couvercle pendant que je fais glisser par à-coups la tirette de la fermeture Éclair le long du pourtour. Je masse mes poignets tailladés. La crise n’est pas terminée pour autant. Le chat se démène tellement que la boîte couleur bordeaux sursaute sur le sol gris, tournoie, rampe, hurle. Je m’agenouille et, horreur, je constate à travers les trous d’aération que l’intérieur baigne dans le sang. Je me résous à libérer la pauvre bête, je fais glisser la fermeture Éclair aussi vite que je peux… Une tête de chien noir surgit. Il me fixe mais il a l’air calme. Je bredouille : « Tu… Tu es prêt à partir, maintenant ? » Il me répond en hochant la tête : « Oui ». Qu’ai-je fait, malheur à moi ? J’ai transformé mon chat en chien de guerre qui parle comme un homme. Je me réveille.
Sac disposable pour celles qui saignent (j’ai des teignes)
Serge Gainsbourg, Les locataires
UN
Moi dont l’heure est globalement passée (je suis un homme blanc hétéro cisgenre de plus de 50 ans), j’ai un peu de mal à savoir si je suis déconstruit ou si ce travail-là reste à faire, j’ai des doutes dans la mesure où j’ai toujours rechigné à me construire. Dès ma plus tendre enfance et surtout ma plus rugueuse adolescence, parmi ce que l’on m’inculquait je flairais en permanence des injonctions suspectes, des loucheries discutables, notamment sur les rôles genrés (non non non, je ne veux pas jouer au foot, j’ai plutôt envie de faire un collier de perles, merci).
Quoi qu’il en soit, j’ai suivi l’an dernier une passionnante formation afin de devenir le référent VHSS (violences et harcèlements sexistes et sexuels) de la structure que j’ai l’honneur de présider, formation durant laquelle j’ai appris ou ré-appris bien des choses, en me foutant bien de savoir si les apprendre me construisait ou me déconstruisait puisqu’après tout la construction n’est pas un interrupteur on/off mais un potard réglé de 0 à 10 (voire à 11, comme dans Spinal Tap).
Parmi ces choses : il convient de garder en tête que l’énonciation de tout préjugé attribuant une caractéristique psychologique à l’un des deux sexes est toujours une assignation, par conséquent toujours une violence, Y COMPRIS SI CE PRÉJUGÉ EST POSITIF.
Par exemple. J’ai toujours tendance à partir du principe que les femmes ont nettement plus de qualités que les hommes : elles sont plus intelligentes, plus justes, plus mesurées, plus généreuses, plus spirituelles, plus courageuses… (Au fait c’est l’année de mes 18 ans que Renaud a créé sa chanson Miss Maggie sur laquelle je n’ai jamais changé d’avis : elle est géniale – même si un peu plus tôt et pareillement géniaux, Fontaine & Areski avertissaient en vain : Si vous croyez que les femmes sont moins bêtes que les hommes vous n’êtes pas encore au bout de vos peines). Eh, bien, malgré toutes les anecdotes que je pourrais donner pour démontrer la supériorité des femmes en arguant qu’il s’agit de mon expérience, il s’agit malgré tout d’un préjugé en moi, pur et simple. Préjugé que Renaud et moi-même ferions mieux de garder pour nous. Ou de déconstruire peut-être : car des hommes, y en a des bien, et des femmes, y en a des mauvaises, ah, oui, c’est vrai. Il suffit de s’en souvenir, le temps de tourner sept fois sa langue avant de proférer.
Je réalise que dans toutes les histoires que j’ai écrites, et que j’écris encore, les filles sont plus malines, plus dégourdies que les garçons, c’est dire si les préjugés sont chevillés en moi et voilà sans doute un indice de l’état modeste de ma déconstruction.
Existe-t-il des différences réelles, profondes, objectives, entre les hommes et les femmes ? Oui, bien sûr, mais elles ne sont pas psychologiques, elles sont physiques. Pourtant, en chaque être humain, le physique induit le psychologique, la frontière est poreuse, nous sommes des corps et non des purs esprits, et ici le casse-tête commence : le sang.
Je me souviens d’un jour où je donnais mon sang, et je devisais paisiblement avec l’infirmière qui me siphonnait (avec mon consentement). Elle me dit : « Oui, ça arrive, on voit parfois des gens tourner de l’oeil. Mais ce sont pratiquement toujours des hommes. Les femmes sont plus dures à cuire lorsque le sang coule, elles ont l’habitude, elles voient leur sang couler une fois par mois, elles endurent…«
Son argument m’a immédiatement convaincu et je l’ai répété maintes fois. Mais est-il licite ? Est-ce un préjugé ou non, fût-il positif ? Cette infirmière énonçait-elle des caractéristiques physiques ou psychologiques ? Ah, comme c’est compliqué. Puisque je ne trancherai pas ici, parlons plutôt d’autre chose ! Souhaitons la bienvenue au nouveau pape fraichement émoulu ! En son honneur, consultons ce que dit la Bible à propos de ce flux menstruel qui constitue une préoccupation pendant la moitié de la vie pour la moitié de l’humanité ! (soit, résultat de l’équation : les règles = 1/4 de la vie humaine)
« L’Éternel parla à Moïse et à Aaron, et dit : […] [soulignons, c’est important, que Dieu en personne nous parle] La femme qui aura un écoulement de sang restera sept jours dans la souillure de ses règles. Si quelqu’un la touche, il sera impur jusqu’au soir. Tout lit sur lequel elle couchera pendant ses règles sera impur et tout objet sur lequel elle s’assiéra sera impur. Si quelqu’un touche son lit, il lavera ses vêtements, se lavera dans l’eau et sera impur jusqu’au soir. Si quelqu’un touche un objet sur lequel elle s’est assise, il lavera ses vêtements, se lavera dans l’eau et sera impur jusqu’au soir. S’il y a quelque chose sur le lit ou l’objet sur lequel elle s’est assise, celui qui y touchera sera impur jusqu’au soir. Si un homme couche avec elle, si la souillure des règles de cette femme vient sur lui, il sera impur pendant sept jours et tout lit sur lequel il couchera sera impur. La femme qui aura un écoulement de sang pendant plusieurs jours en dehors de ses règles, ou dont les règles dureront plus que d’habitude, sera impure pendant toute la période de son écoulement, comme pendant ses règles. » (Lévitique, 15, 9-25)
Quel incroyable tombereau de conneries ! Ces superstitieuses débilités seraient désopilantes si l’on ne se souvenait avec angoisse que de nombreuses personnes sur terre tiennent la Bible, non pour un réservoir d’histoires, un recueil de contes traditionnels diversement subtils et riches d’enseignements, mais pour un guide pratique ! Cette obsession patriarcale de l’impureté des femmes (partagée évidemment par les deux autres monothéismes, dans la Torah qui comprend le même Lévitique, et dans le Coran, sourate 2, verset 222), impureté notamment prouvée par les règles, est une source éminemment toxique de tous les préjugés genrés que nous subissons depuis 2000 ans. Il serait temps de l’assécher – je veux dire la source des préjugés, pas le sang. En quoi le sang qui sort de nos corps serait-il autre chose que purement naturel ? (« Si vous nous piquez, ne saignerons-nous pas ? » Shakespeare, Le Marchand de Venise)
DEUX
The Substance de Coralie Fargeat restera peut-être mon film de 2024. J’ai lu et entendu ici ou là bien des réserves, des « mais », des « tout de même », des « quel mauvais goût », des « c’est écoeurant », des « trop c’est trop ». Trop de quoi ? De sang, manifestement. C’est vrai qu’elles sont pénibles ces femmes qui saignent, elles en foutent partout, elles éclaboussent, elles ne savent pas rester à leur place, elles sont impures (voir ci-dessus).
Quant à moi je n’ai pas trouvé qu’il y avait une goutte de trop. Ce film est tout simplement ce que j’espère du cinéma. La poésie par l’image en mouvement, le choc visuel qu’on attend dans la scène suivante, qu’on désire, qu’on redoute… et qui pourtant nous prend sans qu’on l’ait vu venir, un objet à la fois unique esthétiquement et indispensable sociologiquement, mais qui pour autant ne se laissera réduire ni à son esthétique ni à sa sociologie. Double critère. Définition tellement générale de l’oeuvre d’art ou de la beauté que je pourrais affirmer aussi bien que c’est ce que je recherche dans les livres. Ou dans la vie. Alors je précise et contextualise.
* Grand A, je tente de décrire ce que j’ai compris de l’esthétique de ce film : l’excès des années 70, fondu puis moulé dans la rage (féministe, mais pas que) de 2024, pour une fable morale et punk, originale mais au fond traditionnelle, qui emprunte ses archaïsmes à Kubrick (oh cette obsession géométrique), à De Palma, mais aussi à Freaks, au Portrait de Dorian Gray, à la Métamorphose de K., ou à Cendrillon ou à n’importe quel conte qui nous avertit que l’aiguille tourne (Je suis en retard en retard dit le lapin blanc), voire à la Bible (je suis persuadé que la scène de Sue et les actionnaires dans le couloir procède de Suzanne et les vieillards et que c’est même l’origine du prénom du personnage).
* Grand B, je tente de décrire ce que j’ai compris de la sociologie de ce film : notre époque entière est dedans.Le patriarcat toujours lui éléphant couillu dans la pièce, mais aussi les mass media, l’industrie du divertissement pascalien, l’âgisme (étant d’un âge avancé, je me prends dans la figure la leçon que ce film balance dans la gueule des vieux : ne vous comparez pas aux jeunes, Y COMPRIS au jeune que vous étiez – mais la leçon est réversible car, si les vieux ont leur jeune intérieur, l’inverse est vrai aussi, implacable métaphore du film), la chirurgie esthétique, le riche business de la peur de mourir, la folie transhumaniste, le corps-marchandise des femmes – et surtout la colère. Tout ça. Plus une mèche. Boum.
Je viens de rattraper en DVD Revenge, premier film de la réalisatrice, réalisé sept ans avant The Substance.
Les deux films forment un magistral et cohérent diptyque sur l’objectivation du corps des femmes par les hommes, qui ne peut que finir dans l’horreur et l’hémoglobine… Ce premier volet est toutefois plus simple, plus linéaire (c’est « seulement » une histoire de vengeance exécutée jusqu’au bout), plus série B, moins riche du point du vue imaginaire. Mais tout aussi abouti formellement. Images magnifiques et atroces, à la limite du soutenable, avec flots de sang bien gore, notamment grâce au CinémaScope, à la lumière, au désert, et au peyotl. Quel dommage que Coralie Fargeat ne fasse un film que tous les sept ans – certes, entre temps elle a réalisé un épisode de The Sandman, personne ne lui reprochera de cachetonner à Hollywood pour financer ses films personnels.
TROIS
OUIN OUIN BOOGIE Paroles et interprétation : Chloé Delaume Musique : Eric « Elvis » Simonet Extrait de l’album « Sentiments Négatifs » (2024, Dokidoki Éditions)
… alors que je n’ai rien foutu du tout, c’est uniquement parce qu’il y a quelques mois, j’ai filé une poignée d’euros en souscription pour que le tournage ait lieu. Ben franchement, tout l’honneur est pour moi, c’est moi qui remercie, voilà encore une bonne claque sur le museau des porcs. Bravo les filles !
Kirby est un tel créateur de mondes, d’images et d’imaginaires, qu’inlassablement je suis curieux de la moindre de ses œuvres, sûr et certain que même la plus mineure, la plus contrainte, la plus oubliée, la plus anecdotique recèlera une étincelle qui allumera mon œil. Je ne suis jamais déçu.
C’est ainsi que je viens, et avec quelle joie, de mettre la main sur un lot d’une extrême bizarrerie : Devil Dinosaur, la toute dernière contribution de Kirby à l’univers Marvel (en 1978) – sachant que la toute première était Captain America (en 1940). Kirby, juste avant, donc, de claquer la lourde, et cette fois définitivement, d’une compagnie qui l’aura pressé comme un citron durant quatre décennies sans jamais lui reconnaître aucun droit mais en lui décernant le titre honorifique et gratuit de King, n’est pas corporate pour un sou : il ne nourrit plus la moindre appétence ni pour les super-héros de la maison ni pour l’univers partagé Marvel (ce gimmick reconduit à l’identique sur écran depuis que Marvel est aussi un studio de cinéma), et cherche au contraire une niche où on lui foutra la paix, où il pourra poursuivre ses obsessions narratives et graphiques sans se faire envahir par un Spider-Man ou un Hulk au détour d’une page. C’est ainsi qu’il se (et nous) retrouve en pleine préhistoire. Mais quelle préhistoire.
Devil Dinosaur est une histoire délicieuse, impossible, saugrenue, orageuse, pop, un peu débile, un peu kitsch, mais merveilleuse, pleine de bruit, de fureur, de points d’exclamation et de Kirby krackles. L’histoire de l’amitié entre un T-Rex rouge nommé Devil, et un jeune mammifère hominidé, poilu comme un singe mais malin comme un homme, nommé Moonboy. Les deux compères caracolent à travers les âges farouches, l’un à califourchon sur l’autre, échappant à d’innombrables dangers parmi lesquels : des ptérodactyles, des tricératops, des volcans, des tremblements de terre, des fourmis de 18 mètres (sans chapeau sur la tête), des hordes d’humain primitifs, cruels et superstitieux, des envahisseurs extra-terrestres et leurs robots tueurs… À peu près aussi stupéfiant, et scientifiquement suspect, que si l’on mixait la première séquence de 2OOI: A space Odyssey, où un proto-humain invente l’humanité en même temps que l’outil, avec Godzilla.
Rappelons qu’entre la disparition du dernier dinosaure et l’apparition du premier hominien se sont écoulés environ soixante millions d’années – mais, bah, rappelons aussi qu’un précédent existe, Rahan, lui aussi, croisait de temps en temps un dinosaure survivant et résiliant, peu importe la chronologie, que sont soixante millions d’année du moment qu’on raconte une bonne histoire. Or on reconnaît une bonne histoire à ce qu’elle parle de nous.
Et, oui, Devil Dinosaur parle de nous, donne à lire un mythe fondateur qui rêve et métaphorise ce que nous sommes, ce que nous devenons en tant qu’espèce. Je prélève une page de l’épisode 6 et je prétends qu’il s’agit, sous nos yeux, ni plus ni moins de l’invention du patriarcat allié à la religion. Une brute épaisse s’approprie une femelle farouche, et explique tout en la violant que c’est parce que les esprits l’ont conduite jusqu’à lui et qu’elle n’a qu’à bien se tenir, elle n’a pas intérêt à blasphémer contre les esprits :
Traduction de mon cru :
– Si tu ne peux pas respecter ce que je suis, alors tu apprendras que je suis plus dangereuse que les monstres que nous affrontons ! – Dans ce cas tu mérites que moi, Main-de-Pierre, te donne une bonne leçon ! Viens ici ! – Voilà une femelle pleine de volonté. – Pas touche, espèce de serpent des marais ! Sache que dans ma tribu, les femelles ne sont pas des possessions ! – Ta tribu a été exterminée ! Personne ne m’empêchera de te revendiquer pour mienne ! Ne comprends-tu donc pas ? Tu me plais ! Je te veux ! Ce sont les esprits qui nous ont réunis ! Oserais-tu les défier ? – Les esprits t’ont peut-être parlé, mais pas à moi ! Lâche-moi ! – Fais comme elle te demande, Main-de-Pierre ! Si tu la forces à rester près de toi, tu attireras sur nous de bien sombres jours ! – La ferme, vieillard !
Saynète formidable, non ? Dire qu’à l’heure même où j’écris ceci, et comme une apogée de l’histoire débutée chez les hommes-singes hirsutes, un conclave de 133 vieux messieurs visités par les esprits est en train, au Vatican, de choisir celui qui les guidera, afin de continuer à statuer sur ce que sont les femmes et ce qu’il convient d’en faire, guettons la fumée blanche.
Et ce n’est pas tout ! Dans le même lot de vieux comics, plus exactement dans le numéro suivant Devil Dinosaur #7, je débusque un éditorial de Stan Lee tout aussi édifiant. En 1978, Stan Lee, ex co-auteur et meilleur ennemi de Jack Kirby, n’écrivait quasiment plus de scénarios de bandes dessinées mais seulement des éditos, une chronique intitulée Stan’s soapbox insérée dans tous les fascicules Marvel, laïus autosatisfait où il faisait ce qu’il savait faire le mieux : le mariole, le vantard, le représentant de commerce qui parle de la pluie, du beau temps et de lui-même, et d’ailleurs tu tombes bien, il en a une bonne à te raconter. Sauf que pour une fois, le sujet était sérieux :
Traduction de mon cru :
Vu de ma fenêtre, le sectarisme [bigotry en VO] est l’une des diverses taches qui souillent le blason humain et devront être grattées et éradiquées si un jour nous voulons nous prétendre réellement civilisés. Le sectarisme prend d’innombrables formes et déguisements, mais là où on le reconnaît le plus aisément c’est dans sa forme de généralisation malveillante et décervelée. Par exemple, quand vous entendez un abruti proférer « Tous les Italiens sont comme ci » ou bien « Tous les Allemands sont comme ça », ou bien « Les femmes sont toujours ceci-cela », ou bien « Tous les Noirs, ou les catholiques, ou les juifs, ou les peaux-rouges, liste non exhaustive, sont comme je te dis ! » Eh, bien, les tarés qui s’expriment ainsi, toujours avec une intention de rabaissement, de dénigrement, ne s’en rendent sans doute même pas compte, mais ils sont ni plus ni moins des sectaires [bigots en VO]. N’importe qui doté d’un QI légèrement supérieur à celui du crétin sait fort bien que toute catégorie d’humains est forcément hétérogène. Elle comprend des bonnes personnes, des mauvaises personnes, et l’infinité des nuances entre les deux – et vous trouverez de tels spécimens parmi toutes les races, religions, formes, tailles, et sexes. Vous avez envie de détester quelqu’un ? Je vous en prie. It’s a free country. Mais faites-le parce que lui ou elle vous en a donné de sérieuses raisons, et non à cause d’une couleur de peau, une religion, un arbre généalogique, la forme de ses orteils, ou tout autre prétexte débile, confus et bas du front !
Conclusion et CQFD.
Cette planche et cet édito sont indéniablement datés. Ils ont sans doute perdu, non leur actualité, mais leur légitimité, leur intelligibilité, ringardisés qu’ils sont par le zeitgeist et par les libéro-fascistes au pouvoir en 2025, dans leur propre pays et ailleurs. Peut-être seraient-ils fired, ou canceled. Mais réciproquement, que penserait Jack Kirby, qui en 1944 avait dû interrompre sa carrière de dessinateur pour combattre l’armée nazie en Normandie, du salut nazi d’un vice-président officieux et non élu ? Dans les années 60 et 70, Kirby, Stan Lee et les autres, incarnaient et dispensaient via les comics Marvel un humanisme pour les masses sous enveloppe imaginaire et vivement colorée, une ouverture d’esprit archéo-woke expliquée aux enfants, un soft power tolérant et progressiste… Leurs dessins et leurs textes constituent le témoignage exotique d’une époque où les USA méritaient parfois l’admiration. Et qui aujourd’hui peuvent être relus en tant que contraire absolu, et dans l’idéal comme antidote, de la monstruosité Trmumpsk, ce bigot tenant d’un obscurantisme plus proche d’un Main-de-Pierre attrapant sa femelle par la chatte que d’un brave dinosaure, cette force sombre et destructrice qui mène ces jours-ci, avec sa cravate aussi rouge qu’un T-Rex du diable, son pays et le monde au bord du chaos.
Comme nous sommes dimanche, jour des morts, et qu’il faisait beau, je suis allé me promener dans un cimetière. Je connaissais déjà (un peu) le Père Lachaise et Montparnasse, donc j’ai opté pour celui de Montmartre, au pif.
J’ai rendu hommage en m’inclinant, la main sur le coeur, sur quelques cher(e)s disparu(e)s : Berlioz (tombe noire et grave comme un requiem), Truffaut (tombe noire aussi mais très sobre), Rivette (tombe grise et encore plus sobre, effacée, très difficile à trouver, m’étonne pas de lui, toujours le goût du caché), Stendhal (tombe gravée en italien, Milanese soi-disant, ah ah tu parles, je citais déjà cette tombe menteuse il y a 25 ans sans l’avoir jamais vue dans ma nouvelle Lorsque je m’appelais Jean), les soeurs Boulanger et les frères Goncourt, Emmanuel Bove, H.-G. Clouzot, Siné (le plus beau sépulcre de Paris sans conteste, pierre tombale en forme de cactus et de doigt d’honneur : Mourir ? Plutôt crever !, tombe qu’il partage d’ailleurs en colloc non seulement avec sa femme Catherine mais aussi avec Delfeil de Ton, tous deux toujours de ce monde mais leurs noms sont déjà inscrits et patientent), Jeanne Moreau, Claire Brétecher, Daniel Darc, Offenbach…
Et puis, lorsqu’en fin de parcours je suis passé devant la tombe de Fred Chichin, j’ai vu une petite vieille accroupie devant le marbre. Je me suis dit ah merde, jamais tranquille, on ne peut donc pas se recueillir tout seul un dimanche, qu’est-ce qu’elle fabrique la vioque, elle en a pour longtemps… Sauf que… Mais ! Mais merde ! Mais oui ! C’est Catherine Ringer ! Putain Catherine Ringer en train d’arroser et de tailler un rosier sur la tombe de Fred Chichin ! Il n’y a pas que moi pour qui dimanche est le jour des morts !
La dame s’est retournée sur moi et sur les autres badauds en goguette nécrologique, elle nous a regardés, nous a souri et s’est campée dans cette pose qu’on lui connait et qu’on admire, cette pose de fierté, prête à en découdre, menton levé, mains sur les hanches. Je suppose qu’elle aurais volontiers discuté mais je me suis abstenu de la déranger, j’avais la larme à l’oeil. Ces deux-là, je les ai vus deux fois sur scène, à vingt ans d’écart et ce sont parmi les meilleurs concerts de ma vie. La première fois c’était « Les Rita Mitsouko », et la seconde « Catherine Ringer [veuve] chante les Rita Mitsouko ». Et là, c’était comme une troisième et dernière fois, quelle fidélité tous les deux, et moi aussi finalement. Je n’ai pas pris de photo, il y a des limites, j’ai écrasé ma larme et je suis sorti discrètement du cimetière.
Addendum : la scène narrée ci-dessus a eu lieu le 28 avril 2025. Or, selon Wikipedia, « Frédéric Alexis Alphonse Chichin est né à Clichy et déclaré né le 1er mai 1954 alors qu’il a vu le jour le 29 avril 1954 (quelques sources indiquent même le 28 avril 1954) ».
Dernier jour à Paname, 2
Puisque j’étais à Montmartre, et comme il faisait toujours beau, j’ai encore sillonné la Butte de haut en bas et du nord au sud, en crachant mentalement (pfouah c’est malin je m’en suis mis partout dans le cerveau) sur l’ignoble Sacré Coeur, insulte à la Commune, triomphe de l’obscurantisme et de la haine de la liberté, à chaque fois que sa pointe honnie dépassait à l’horizon.
J’ai arpenté l’avenue Junot, émaillée de plaques commémoratives : ici ont habité Tristan Tzara, Pierre Dac, Edith Piaf, Gen Paul, Prévert, Nougaro, ici a été tourné (soi-disant mais le numéro 21 n’existe plus) L’assassin habite au 21 tout au bout la place a changé de nom et s’appelle désormais « Place Marcel Aymé » avec un beau passe-muraille en bronze (Marcel Aymé habitait donc place Marcel Aymé ? Ah ben c’est comme le professeur Choron alors ?)…
Et puis, à l’endroit où l’avenue Junot croise la rue Girardon, au numéro 4 de celle-ci, il n’y a pas de plaque « Ici a vécu Louis Destouches, dit Louis-Ferdinand Céline, écrivain et médecin. De ces fenêtres il a décrit les bombardements sur Paris dans le roman Féérie pour une autre fois. Ici ont été dérobées de nombreuses liasses de manuscrits qui ne sont réapparues qu’en 2021″.
Tout-seigneur-tout-honneur : le premier épisode de cette célébration d’un art en déclin (est-ce bien ainsi qu’il faut entendre le titre générique ?) est consacré à la série des séries. Il s’intitule : Le secret de Twin Peaks. À la faveur d’un séjour à Paname, je l’ai vu il y a quelques jours, en avant-première, dans une vraie salle de cinéma en présence de l’auguste Pacôme himself.
L’émission débute par une hyperbole que d’aucuns pourraient juger inconvenante et impossible à digérer. Mais pas moi, moi ça va, moi j’encaisse et opine :
Twin Peaks n’est pas qu’une série télé, c’est l’oeuvre d’art la plus importante de ces cinquante dernières années.
La méthode de Thiellement (sa démarche, sa discipline, son yoga), qui produit des gerbes d’étincelles à perte de vue lorsqu’il l’applique à l’Histoire de France (L’empire n’a jamais pris fin) demeure ici inchangée : il se dit exégète – ni historien ni critique. C’est-à-dire qu’il raconte, puis interprète. Tout en voix off ou face caméra, il ajoute l’intuition à l’érudition (n’était-ce pas, du reste, la caractéristique de l’agent Dale Cooper ?). Il accumule les faits puis tire entre eux des fils et des flèches, en une multitude de signaux comme ceux dont les enquêteurs des séries télé recouvrent leurs murs. Il révèle ou invente (c’est pareil) les liens qui manquaient, il met au grand jour les tendances lourdes ensevelies sous la surface des longues durées. Bref, il donne du sens.
Or, en ce qui concerne le chef d’oeuvre ultime de David Lynch, Twin Peaks (1990-2017), dont le coeur palpitant est l’apparemment si abscons épisode 8 de la saison 3, donner du sens est salutaire. Ne serait-ce que pour clouer le bec à tout esthète paresseux qui se contenterait de prétendre que Lynch ça ne s’explique pas, ça se ressent et puis c’est tout (entendons-nous bien : il n’y a aucun mal à être un esthète paresseux… mais on peut aller un peu plus loin). Thiellement ajoute du sens sans rien gâcher du mystère ni de la beauté – au contraire, en les augmentant.
Alors, qu’est-ce que ça veut dire, tout ça ? Twin Peaks aurait donc un sens, en plus de sa poésie fulgurante ? Oui : et, de surcroît, un sens utile, un sens pratique. Une éthique. De la munition psychique pour nous aider non seulement à penser mais à agir. En plus d’être un whodunit, une série policière, un thriller, une série fantastique, une série de science-fiction, une sitcom, une romance, une série expérimentale, un bloc de poésie pure, et à peu près tout ce qu’on voudra… Twin Peaks est en fin de compte une série politique.
Alerte au spoïl : ci-dessous je partage ce qui, ce soir-là dans mon fauteuil bleu de cinéma, constitua mon illumination, mon plus grand choc, ma découverte princeps. Quiconque préfèrerait s’initier par ses propres moyens, en regardant à son tour les images de Thiellement ou a fortiori celles de Lynch, est invité à interrompre sa lecture ici.
Pour mémoire et pour clore ce préambule, je précise qu’outre la découverte majeure détaillée dès le prochain paragraphe, j’ai reçu, toujours dans mon fauteuil bleu, un certain nombre de découvertes mineures, – dont celle-ci : Twin Peaks, oeuvre télévisuelle, parle bel et bien de la télévision en tant que monde-miroir, mais à un endroit inattendu et caché, dans la Loge Noire, qui reproduit derrière le rideau rouge un dispositif de talk-show (simulacre d’intérieur confortable, fauteuils, hôte et invités, intermèdes musicaux et dansés…) ; – dont celle-là : Non mais c’est pas possible de proférer une ânerie pareille quel connard ce Quentin Tarantino ; – et dont cette autre : au moment des questions-réponses avec la salle, une jeune femme exprimant une susceptibilité bien de son (de notre) époque a déclaré, je cite, La façon dont le viol de Laura Palmer est filmée dans Fire walk with me m’a gênée et m’a parue très problématique, on ne peut plus aujourd’hui érotiser le viol de cette façon – ce à quoi Pacôme a répondu sans se démonter que non, désolé, il ne voyait aucune érotisation dans cette scène de viol qui avait le grand mérite de montrer enfin l’horreur qu’on pressent depuis le début de la série ; je suis entièrement d’accord avec lui, je pense que montrer le mal n’est pas faire son apologie (malentendu sempiternel), je pense aussi que seul un maboul chez qui le mal est déjà fait banderait en regardant cette scène, et ce débat utile m’a rappelé une chose sur moi-même : certes, par principe je me rangerai toujours du côte des « woke » parce que les « antiwoke » sont décidément trop cons et ont fait leur temps, plusieurs sens à cette expression… Toutefois, de temps en temps, ce n’est tout simplement pas le sujet.
Au long des deux premières saisons de Twin Peaks, le mal est incarné par la figure inoubliable, démoniaque et ricanante de Bob, qui rôde sur la terre et dans les âmes pour répandre le sang, la peur, la douleur et le chagrin, ingrédients de la substance dont il se repaît, le Garmonbozia. Bob est une abstraction, une pulsion, il est le meurtre, le viol, la folie, l’horreur. Bob, c’est le mal que font les hommes, ainsi que le diagnostique très justement Albert Rosenfeld, le médecin légiste du FBI, interprété par feu Miguel Ferrer, quelque part dans la saison 2. Le Fond du Tiroir a déjà glosé sur Bob, ici.
Pourtant, lorsque Twin Peaks revient en 2017 pour une saison 3, ou plutôt lorsque nous retournons à Twin Peaks, Bob a disparu. Est-ce à dire que le mal n’existe plus ? Certainement pas. Le mal a seulement changé de forme. Selon une logique finalement très conforme aux contraintes industrielles, compatible avec le cahier des charges à l’oeuvre dans la production des séries télé à rallonge (aussi surprenant que cela paraisse, Lynch joue le jeu !), le passage d’une saison à l’autre est marqué par un changement de main antagonist (ennemi principal), le nouveau se révélant encore plus redoutable que l’ancien, encore plus coriace, impitoyable et invincible. Bob était le mal en liberté ? Las ! Nous tombons de Bob en Judy.
Judy, entité énigmatique citée dès le film Twin Peaks: Fire Walk with me (1992), reste invisible. Elle est pourtant partout, insidieuse et omnipotente. Bob était le mal que font les hommes les yeux ouverts (il était par exemple Leland Palmer, le père de Laura)… Judy est bien pire : elle est le mal que les hommes laissent faire les yeux fermés (elle est par exemple Sarah Palmer, la mère de Laura). Il suffit de jeter un oeil par la fenêtre, dans les journaux ou, surtout, à l’intérieur de soi pour constater que le mal qu’on laisse faire est infiniment plus vaste que le mal que l’on fait, réellement. On aura beau plaider qu’on n’a rien fait de mal (on a un alibi en béton, on est resté devant la télé à regarder des séries) pourtant le désastre en cours est plus grand que sous l’effet de ce que l’on a fait. Judy est une démone bien plus puissante que Bob.
Ne rien faire alors que quelque part, sous notre fenêtre, dans notre journal ou à l’intérieur de soi, on tue et on viole, voilà l’authentique mal absolu à côté duquel tuer ou violer réellement n’est qu’une manifestation contingente, folklorique, un épiphénomène.
Le personnage de Dale Cooper, beaucoup plus intéressant et tragique à la fin de la série qu’au début, incarne quant à lui cette nécessité, cette volonté suprême de faire plutôt que de ne rien faire, de faire jusqu’au sacrifice de soi ou en tout cas au sacrifice de toute gratification, de toute récompense, de toute certitude d’avoir fait le bien. Le véritable héros ne saura jamais qu’il a fait le bien, il aura fait tout court, sans se préoccuper du fruit de ses actions. D’ailleurs « Un héros, c’est celui qui fait ce qu’il peut. Les autres ne le font pas. » (Romain Rolland) Je me le tiens pour dit. Je fais.
Si Lynch et son co-scénariste Mark Frost ont besoin d’exégètes c’est qu’ils ont créé une mythologie : Bob et Judy sont comme tous les autres dieux ou démons de toutes les cosmogonies que les humains, partout, toujours, ont inventées pour parler d’eux-mêmes (ceci est valable aussi pour les trois monothéismes, évidemment). Peu importe qu’ils n’existent pas réellement, puisqu’ils existent en tant que symboles, en tant que métaphores, en tant que forces métaphysiques, en tant que produits de notre psyché. Or les symboles et les métaphores sont agissants, ils ont des effets en retour sur notre psyché. Nous ne pouvons que constater les effets du mal que les hommes font, et ceux du mal que les hommes laissent faire. Appelons-les Bob & Judy, ou bien appelons les nos vices et nos veuleries, aucune importance : ils sont là.
Éditeur et blogueur depuis avril 2008.
Treize livres au catalogue. Deux épuisés, onze en vente. Tous remarquables, achetez-les en lot.
Près de 800 articles à lire gratuitement en ligne. Pas tous indispensables, choisissez soigneusement.
Commentaires récents