Accueil > En cours > Vironsussi mon beau souci

Vironsussi mon beau souci

Il semble que mon prochain livre sera Vironsussi, co-écrit par Olivier Destéphany, roman d’épouvante, extension, réinvention, explosion et implosion du spectacle intitulé Du sang sur l’archet que nous donnâmes ensemble et en musique au début de cette année. Je ne me serais pas cru capable d’écrire en duo, ni, surtout, d’y puiser autant de plaisir. Voici, en gros, comment le travail se déroule.

« Vomir un doigt ».

Olivier se pointe, sautillant, l’oeil brillant, il se penche un peu en avant comme un comploteur et il me dit ça, sûr de son effet : « Vomir un doigt ». Puis il se redresse et développe : « Je ne sais pas d’où me vient l’image, je préfère ne pas savoir, mais je la vois comme si j’y étais : le gars, il vomit, mais alors, il vomit grave, toutes ses tripes, beuââârk, et il vomit quoi ? Il vomit un doigt humain. T’imagines ? C’est dégueu, non ? » Il est tout content, l’Olivier. Il a un spasme, il vomit un doigt dans sa tête.

Ah certes tu m’étonnes c’est dégueu, c’est baroque, c’est monstrueux, c’est surréaliste au sens premier, vomir un doigt c’est un peu comme trancher un oeil avec le fil d’un rasoir, c’est fort et brutal et onirique et inouï, mais ça n’est pas encore une histoire. Alors on se monte le bourrichon, on te l’invente l’histoire, on s’y met à deux, l’un surenchérit l’autre modère puis réciproquement, on tisse la trame, on ajoute des détails, ce sera un doigt féminin, avec un ongle manucuré rouge-rouge, et puis tiens, même, on lui enfile une alliance en argent, l’un a trouvé ça, immédiatement l’autre trouve pourquoi : c’est peut-être l’alliance l’élément indigeste, mais oui, tu penses, l’argent, on empile, on bouche les trous, ça y est, on y est, tout s’explique, on comprend ce qui s’est passé, et ça ne pouvait plus désormais se passer autrement, notre héros était obligé de finir par vomir un doigt le malheureux, c’était fatal, horrible et triste, sans rédemption.

Reste à écrire. Olivier écrit, me donne le texte. Je le désécris et le réécris, je vérifie la tenue générale par rapport au reste de l’ours, le lui rends, il commente, je remets une couche, on ajoute qui une angoisse qui une obsession, on en rit, et de fil en aiguille on a bouclé un chapitre. Le chapitre-clef où le vironsussi vomit un doigt. On passe au suivant, qui se situe bien très en amont dans l’intrigue. Justement, pour celui-ci j’ai une idée. À moi de servir. Je raconte à Olivier, un peu penché en avant, comploteur.

Dans quelques jours, je dirais, vu d’ici, deux ou trois semaines max, à force de chapitres nous aurons écrit un livre. Il nous faudra alors décider qu’en faire. Je me voyais lancer immédiatement sa production au Fond du tiroir, un bon gros pavé illustré avec, derrière son rabat arrière, un emplacement réservé pour insérer le CD de la bande originale… Mais là,  je redescends aussi sec sur terre parce que je me fais engueuler par madame la Présidente du Fond du tiroir : « Tu arrêtes un peu de fabriquer des nouveaux livres avant de vendre les précédents, le garage déborde de cartons, alors celui-ci, tu commences par le proposer à des éditeurs ! »

Bon, admettons. Je ne l’éditerai au FdT que lorsque ils l’auront tous refusé. On ne sait jamais, après tout. Je pourrais bien tomber sur un éditeur qui n’attendrait qu’une chose, publier un roman où l’on vomit un doigt.

  1. 22/04/2013 à 09:04 | #1

    Bonjour Fabrice, j’en ai bien reçu moi, un livre (plutôt jeunesse, je dis ça uniquement pour vous titiller) avec un avis de recherche, une bande jaune « Police line do not cross » et un doigt -en plastique-, alors pourquoi pas ? (http://lyvres.over-blog.com/article-i-hunt-killers-116910701.html)

  1. Pas encore de trackbacks

*